Les acteurs de la filière mangue se plaignent de la baisse des exportations. Ils se sont réunis la semaine dernière, pour éplucher les contraintes auxquelles la commercialisation internationale de la mangue est confrontée.Par Justin GOMIS – 

Le volume des exportations de mangues du Sénégal est toujours très en deçà des attentes. A preuve, «le volume des exportations du marché sénégalais est passé de 24 000 tonnes en 2021 à 16 mille tonnes en 2022, soit une diminution de plus de 20%, en raison simplement des phénomènes climatiques occasionnant un retard de floraison. Ce volume est très faible si l’on sait que la production annuelle est estimée à 18 millions de tonnes», a relevé la semaine dernière, la Directrice générale de l’Agence sénégalaise de promotion des exportations (Asepex), Zahra Iyane Thiam, lors d’un atelier sur les contraintes de la filière.
Concernant la zone Cedeao, souligne le directeur de l’Environnement, export et de la facilitation au sein de l’Asepex, Serigne Aliou Diop,  «sur une production de plus d’1 million 500 mille tonnes par an,  moins de 150 mille tonnes seulement sont exportées et moins de 100 mille tonnes  font l’objet de transformation».
Pour renverser cette tendance baissière, recommande M. Diop, «nous devons faire beaucoup d’efforts pour davantage structurer la filière en chaîne de valeurs pour permettre à tous les maillons de bien tirer profit de leurs activités, à travers la mutualisation et la contractualisation pour une meilleure mise en marché de nos produits soutenue par un tissu solide de notre société, à l’instar des schémas aujourd’hui mis en œuvre partout dans le monde et qui atténuent les inégalités en renforçant la solidarité entre les acteurs d’un même secteur». Le directeur de l’Environnement, export et facilitation plaide aussi pour le renforcement du professionnalisme dans ce sous-secteur.  Car, d’après lui, «l’exportation est un métier à part, qui de­mande une certaine maîtrise de certains éléments  liés aux produits, mais aussi au marché».
Et c’est pour cerner tous ces aspects qu’un atelier a mobilisé les acteurs de la filière, les collectivités locales, les administrations territoriales, les structures d’appui, les partenaires au développement, pour mener une réflexion approfondie permettant de mieux comprendre les contraintes et difficultés du secteur.  Ce besoin est plus que nécessaire.
En effet, explique le directeur de l’Environnement, export et de la facilitation à l’Asepex, «l’ensemble des pays  de la zone Afrique  viennent de vivre avec le nombre jamais égalé d’interception de containers de mangues  par les services de contrôle  aux frontières  de l’Europe, entraînant des pertes énormes pour le secteur, mais surtout mettant nos pays dans une situation très problématique pour l’avenir des exportations des mangues vers l’Union européenne». A l’en croire, «le Sénégal a enregistré 32 interceptions la saison passée, pour moins de volume exporté par rapport aux an­nées antérieures».
Une situation  qui place notre pays  «au rang de premier pays  en termes d’interception  de la zone Afrique», se désole-t-il.  Avant de suggérer de lever les problèmes et contraintes de la filière mangue qui ne se limitent pas aux dégâts liés à la mouche.
Pour qu’un modèle de gouvernance adapté soit mis en place,  où le privé se devra d’obtenir une place de choix, «nous devons renforcer le professionnalisme dans ce sous-secteur et accepter que les acteurs  ne soient  pas forcément des  professionnels», a soutenu Serigne Aliou Diop.  C’est dans ce sens qu’il suggère de lever les contraintes d’ordre commercial et de diversifier les destinations.
«A ce jour, nous n’avons pas mis un kilogramme de fruits et légumes sur le marché des Etats-Unis. Le marché de l’Europe de l’Est, notamment de la Russie, n’est pas encore accessible.  Contrairement au Maroc, qui a bien compris et qui s’est installé sur ce marché depuis lors. L’Asepex et les services compétents ont même réglé le volet administratif pour que notre  certificat d’origine et notre certificat  phyto sanitaires soient  élus et acceptés par ces pays.  Mais nous n’y sommes pas et cela fait partie  des problèmes que nous devons régler. Nous espérons conquérir la destination Asie, avec notre participation  prochaine au Qatar, après Dubaï de l’année dernière.  Pour les Etats-Unis,  la pénétration du marché passera certainement par  la réalisation d’une station de traitement des produits au départ de Dakar. Nous avons le soutien de l’ambassade des Etats-Unis à Dakar pour appuyer  une mission en Afrique du Sud  pour bien nous inspirer de leur exemple, parce qu’ils l’ont déjà réalisée», a-t-il renseigné.
Serigne Aliou Diop recommande, en outre, de résoudre «les problèmes entre les exportateurs et importateurs entraînant chaque année des pertes énormes pour les chargeurs sur l’absence de contrats bien négociés avant tout chargement…».  Il n’a pas occulté par ailleurs l’absence de financement pour le secteur des exportations de fruits et légumes en général. «Le dernier financement qui nous a accompagné remonte à 1995, entraînant jusqu’à aujourd’hui des  emprunts auprès des banques comme La Banque agricole, et exposant les exportateurs à devoir solliciter  chaque année des avances auprès des  importateurs».
De l’avis de la Directrice générale de l’Asepex, «le développement de la filière mangue aidera à freiner l’exode rural et contribuera largement à la stratégie de lutte contre la pauvreté».
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