Samedi soir, dans les rues de la Médina, du centre-ville et de la banlieue, c’est le retour à la vie normale, après la fin de l’état de catastrophe sanitaire entrée en vigueur vendredi à minuit. Et sans mesures barrières.
C’est un samedi soir pas comme les autres : C’est le premier après la fin de l’état de catastrophe sanitaire au Sénégal qui met ainsi fin aux restrictions telles que le couvre-feu à Dakar et Thiès, les rassemblements etc. La ville n’a pas mis du temps pour renouer avec ses vieilles habitudes. A la rue 15X6 de la Médina, la séance de danse traditionnelle organisée à l’honneur d’une fille donnée en mariage bat son plein. De petits bâtons entre les doigts, un groupe de batteurs de tambours est à fond. En face, des jeunes filles nostalgiques sans doute du «sabar» se trémoussent sous les yeux d’un public féminin.
A l’intérieur de la maison, de la musique distillée à travers les baffles. Depuis les restrictions imposées aux habitants de la capitale en janvier dernier, les chants, danses et autres avaient quitté les rues de Dakar. Profitant de cette liberté retrouvée, les populations de ce quartier occupent la devanture des maisons, en famille ou par groupe de jeunes, autour du thé. Le climat de fraîcheur est à leur faveur. Beaucoup ne portent même plus de masque. On se croirait en période post Covid-19 qui a déjà emporté un millier de personnes au Sénégal. Les vendeuses de couscous et autres aliments destinés au dîner servent leurs clients sans aucune pression liée au couvre-feu qui est désormais derrière elles depuis vendredi à minuit. Par endroits, on voit des lavandières en train de repasser les habits sous des lampadaires solaires qui illuminent Médina depuis quelque temps.
Il est 23 h passées. En remontant vers le centre-ville, on pense être à l’heure du crépuscule en voyant les gens vaquer à leurs occupations en toute tranquillité. Munis de pelles et de brouettes, les éboueurs nettoient l’avenue Blaise Diagne. Derrière eux, les camions de ramassage d’ordures, estampillés Ucg (Unité de coordination de gestion des déchets solides), procèdent à la collecte de la saleté de toute sorte. A côté de la chaussée, des gargotières accueillent les noctambules. Près de l’arrêt de bus Dakar dem dikk situé à Sandaga, El Hadji Ba et Amadou Ba, deux jeunes originaires de la région de Kolda, sont sur le point de rentrer après une longue journée qui a commencé à 6h du matin. Deux bombonnes de gaz, une tablette d’omelettes à moitié vide, des ingrédients destinés à la préparation de fataya trônent sur leur pousse-pousse. Ils circulent sans penser au couvre-feu. «On attendait la fin du couvre-feu. Vraiment c’est une bonne chose pour nous. On est content maintenant», se réjouit El Hadji. A quelques jets de pierre d’ici se trouve une dibiterie haoussa en face du centre commercial El Malick.
A l’entrée, deux personnes d’un âge avancé, des non-voyants, font du bruit avec les pièces de monnaie reçue en guise d’aumône. La fumée, associée à l’odeur de la viande grillée, enveloppe la pièce. Plus de places assises. Des caisses de boisson coca-cola vides, un carreau tacheté, des clients sans masque, des posters d’un guide religieux accrochés au mur, c’est le décor qui s’offre aux visiteurs. L’ambiance dans cet endroit, et autres lieux visités, montre que les gens attendaient avec impatience la levée des restrictions.
Dans la banlieue dakaroise, les costumes des samedis soirs sont ressortis. Privés de sorties nocturnes pendant plusieurs mois, les jeunes ont envahi les avenues en jetant les masques. «Je vais rendre visite à ma copine. Cela fait des mois que je n’ai pas goûté à ce plaisir de sortir la nuit et de rentrer quand je veux», savoure un bonhomme, vêtu d’un jean bleu et d’un tee-shirt noir assorti de baskets bleus. Mais il a oublié le plus important : son masque. Et il n’est pas le seul à aller à la conquête de la nuit en renonçant à toutes les mesures barrières.