A Dubaï, le Président Sall a affiché son opposition à la volonté des pays développés de vouloir imposer aux autres de «choisir entre la protection de la planète et le développement». C’est une réponse à la décision de certains gouvernements d’interdire le financement à l’étranger de sources d’énergies fossiles. Pour lui, c’est une «position de fermeté». Par Justin GOMIS –
Macky Sall a passé la journée d’hier à faire des discours, à participer à des panels avec l’ouverture de la Cop28 à Dubaï. Le constat est le même, presque 10 ans après l’adoption en 2015 de l’Accord de Paris. Pour lui, «l’urgence climatique reste entière, grave et préoccupante. Au lieu de ralentir, le réchauffement de la planète s’accélère et nous rapproche dangereusement de la limite des 2°C à ne pas franchir». Macky Sall assure qu’il faut des actes concrets pour que ce «28e rendez-vous ne soit pas juste une Cop de plus». «Mais celle des engagements tenus, il nous faut, enfin, prendre les bonnes décisions en matière de réduction des émissions de gaz à effet serre, de gestion des pertes et dommages, de mobilisation des ressources, de transition énergétique juste et équitable, et de mobilisation des ressources. Faisons en sorte que les financements annoncés soient disponibles, et accessibles selon des procédures et modalités diligentes et transparentes.» Pour les engagements, il cite «le doublement du financement de l’adaptation, tel que décidé à la Cop26 Glasgow, pour mobiliser 40 milliards de dollars d’ici 2025 et l’opérationnalisation effective du Fonds créé à la Cop27 et dédié aux pertes et dommages associés aux changements climatiques».
Aujourd’hui, le débat sur la transition énergétique va diviser les pays développés et ceux en voie de développement. «Le Sénégal reste préoccupé par les mesures unilatérales visant à interdire les financements à l’étranger de sources d’énergies fossiles, y compris le gaz, pendant que les principaux pays pollueurs continuent de faire usage de sources plus polluantes comme le charbon. Conformément à la Déclaration de Nairobi issue du Sommet africain sur le climat, nous appelons à une transition énergétique juste et équitable.» Il enchaîne : «Nos pays ne doivent pas être condamnés à choisir entre le développement et la protection de l’environnement. C’est dans cet esprit que le Sénégal a signé en juin dernier, notre Partenariat pour une transition énergétique juste, (Jetp), dont l’ambition est de porter la part des énergies renouvelables dans notre mix énergétique de 31 à 40% d’ici 2030. Je remercie le Groupe des partenaires internationaux (Allemagne, Canada, France, Royaume-Uni et Union européenne) qui accompagnent la mise en œuvre de ce Jetp, pour mobiliser 2, 5 milliards d’euros sur une période initiale de 3 à 5 ans, afin de financer des projets verts.»
Lors de la réunion sur le financement de l’adaptation pour l’Afrique au changement climatique auquel elle est vulnérable, il a mis l’accent sur les lenteurs du processus à cause de la faiblesse des financements concessionnels et des investissements verts dont le continent bénéficie, malgré l’existence de mécanismes dédiés. «Les pays africains s’endettent pour financer leurs projets verts, ce qui constitue une double peine pour le continent qui pollue le moins. L’Afrique ne demande pas une faveur particulière, mais une approche juste et équitable de la lutte contre le réchauffement climatique. Quand nos pays sont appelés à renoncer aux schémas pollueurs que d’autres ont empruntés pendant plusieurs siècles pour mettre la planète dans son état d’urgence actuel, il est juste qu’en contrepartie, le coût de l’adaptation soit équitablement partagé», insiste-t-il.
Pour l’Afrique, le constat est accablant : «les derniers chiffres des Nations unies montrent en effet que les flux de financements publics internationaux de l’action climatique vers les pays en développement ont chuté de 15%, et plafonnent à 21 milliards en 2021. Il y a donc urgence à mobiliser les ressources annoncées selon des conditions et modalités diligentes et transparentes», ajoute le chef de l’Etat.
Pour le Président, le Sénégal va continuer à intensifier des efforts dans la lutte contre le réchauffement climatique en promouvant le mix énergétique avec 31% d’énergies renouvelables, le reboisement dans le cadre de la mise en œuvre de la Grande muraille verte et «la réalisation de projets sobres en carbone et résilients au changement climatique». A chaque fois, il donne en exemples le Ter et le Brt, «tous deux électriques». «De même, dans le cadre de son Jetp, le Sénégal est disposé à examiner avec le Fmi, les pays partenaires et le Centre mondial pour l’adaptation, la possibilité de réorienter des ressources prévues pour le remboursement de la dette vers le financement de l’action climatique», note le Président Sall.
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