Le Sénégal est un pays de départ et d’accueil des migrants. Selon l’étude faite par la Fondation Konrad Adenauer dans les régions de Dakar, Ziguinchor et Kédougou, 7750 déplacés sont sans état civil dans la région de Ziguinchor. Par Justin GOMIS –

La recrudescence de la mi­gration irrégulière interpelle toutes les autorités étatiques, les organismes non gouvernementaux et la Société civile. Dans le cadre de son programme national qui couvre tout le Sénégal, la Fondation Konrad Adenauer a commandité dans ce sens une enquête sur les régions de Dakar, Ziguinchor et Kédougou pour se faire une idée des migrants qui ont choisi le Sénégal en provenance d’autres pays africains pour améliorer leurs conditions de vie.

Cette étude, faite sur «l’analyse de la migration sénégalaise dans le développement des régions de Dakar, Ziguinchor, Kédougou», a été réalisée par le Centre africain d’appui au leadership, aux droits humains et à l’innovation sociale (Caldhis). Elle a permis de voir l’impact des migrants dans les trois régions de Dakar, Zi­guinchor et Kédougou. D’après El Hadji Abdou Karim Cissé du Caldhis, deux éléments importants ont été notés dans les régions de Ziguinchor et de Kédougou qui sont frontalières. «C’est d’abord la conception des populations des deux régions, qui pensent qu’elles ne sont pas dans une volonté de migration parce que c’est culturel, mais aussi des aspects d’ordre sécuritaire qui nécessitent une prise en charge de cette question. Le rôle des collectivités territoriales, pour prendre en compte la dimension migration de manière globale, avec les différentes catégories, est essentiel», a expliqué le coordonnateur de l’enquête.

Toujours selon lui, «l’étude a montré les acteurs qui étaient présents (les services étatiques, les Ong, des associations et des dispositifs au niveau du territoire), pour voir qui fait quoi, avec qui, et avec quelle cible. Elle a permis de voir les services qui étaient disponibles (les services de financement, de formation, d’accompagnement, d’accès à l’état civil), et beaucoup d’autres services qui ont été identifiés et qui étaient disponibles pour certains et qui ne l’étaient pas pour d’autres. Elle a ressorti le déficit d’accès à des services pour des émigrants et pour certaines personnes déplacées». Quant à la région de Dakar, l’étude a montré qu’elle regroupe l’essentiel des activités économiques du pays, avec une forte densité de la population.

Selon Caroline Hauptmann, le choix de ces régions n’est pas fortuit. «A Kédougou, nous avons un grand projet sur la sécurité. Ce qui resurgit toujours, ce sont les thématiques de la migration. On voulait en savoir un peu plus. Il en est de même à Ziguinchor. Dans cette région, nous y travaillons depuis 2008. Il y a beaucoup de questions autour de la migration qui se posent, mais qui ont un peu une certaine complexité parce qu’elles sont très liées au conflit en Casamance. La troisième région, Dakar, est la plus grande. Elle inclut toutes les communautés autour, qui sont des points de départ importants, dans lesquelles vivent à peu près un quart de la population entière du Sénégal», a expliqué la représentante-résidente de la Fondation Konrad Adenauer au Sénégal.
A en croire M. Cissé, les données qu’ils ont eues dans le cadre de cette étude, «signalent que les immigrants interrogés, pour l’essentiel, soutiennent qu’ils sont au Sénégal dans un cadre apaisé, un pays tranquille». Cependant, «l’étude montre qu’il y a un peu de racisme, de xénophobie qui a été noté», a-t-il tenu à préciser. Avant de montrer que «cela nécessite une sensibilisation».

Par ailleurs, l’étude a montré aussi la forte présence de migrants de retour dans certaines régions. Et pour chaque catégorie, «elle a ressorti des chiffres pour la perception par rapport aux questions posées, par rapport à la réintégration, par rapport à l’apport qu’ils peuvent avoir au niveau territorial», a-t-il souligné.

L’étude a aussi montré que 7750 déplacés peinent à avoir un état civil, surtout dans la région de Ziguinchor. Une situation qui ne facilite pas leur intégration et la cohabitation de ces migrants dans cette partie méridionale du pays. En tout cas, «ce projet, qui va se dérouler de 2023 à 2026, nécessite de trouver les secteurs d’intervention pour ne pas répéter ce que font déjà d’autres acteurs, ce que fait l’Etat qui aussi introduit beaucoup de programmes», a fait savoir Caroline Hauptmann, la représente-résidente de la Fondation Konrad Adenauer au Sénégal. L’idée, «c’est de trouver les points de départ qui sont notés à Dakar et à Ziguinchor, à cause de leur proximité avec les côtes», a-t-elle ajouté.

Mais pour la migration à Kédougou, «nous notons qu’il y a des groupements qui se déplacent, qui sont des points de départ aussi, ou qui se dirigent à travers le Mali et qui vont sur Dakar», a-t-elle poursuivi. Dans la région méridionale, il y a aussi des personnes déplacées, tout comme c’est le cas à Kédougou où des immigrants sont dans les mines.
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