Le Crafs rejette les propos, qui lui ont été prêtés par la loi sur le domaine national, selon lesquels les terres doivent être attribuées aux collectivités territoriales. Il s’agit d’une désinformation qui n’existe nulle part dans le document de la Société civile qui souhaite, au contraire, que les terres restent dans le domaine national.

Par Khady SONKO – Le document remis au chef de l’Etat concernant la réforme de la loi sur le domaine national, est-il celui de la Commission nationale de réforme foncière ? La réponse à cette question serait négative, selon le Cadre de réflexion et d’action sur le foncier au Sénégal (Crafs). Cette frange de la Société civile ne se retrouve pas sur une partie du discours de Macky Sall, prononcé à l’occasion de la Rentrée solennelle des Cours et tribunaux : «Si j’avais mis en place les rapports de cette commission, en moins de 12 mois, il n’existerait plus un seul mètre carré public sur les terres du domaine, puisque les collectivités allaient délibérer et octroyer toutes les terres.»
Sur la forme, le Crafs apprécie la déclaration du chef de l’Etat, puisqu’elle répond à leur attente de pouvoir enfin remettre le document sur la table et discuter. Au moins, écouter la Société civile s’exprimer sur comment mettre en place cette vision. Sur le fond du discours de Macky Sall, le Crafs rejette des propos qui lui ont été prêtés et qui ont désinformé le président de la République. «Jusqu’à aujourd’hui (hier), nous ne savons pas quels sont les éléments qui ont désinformé le chef de l’Etat sur la teneur des documents qui lui ont été proposés. Nous n’avons jamais compris les propos qui ont été prêtés au chef de l’Etat et qu’il a réitérés en disant que le document de politique foncière et la Commission nationale de réforme foncière suggéraient qu’on donne les terres aux collectivités territoriales», s’est défendu Amadou Kanouté.
Le directeur exécutif de la Cicodev s’exprimait en conférence de presse, pour clarifier la position du Crafs par rapport à la réforme de la loi sur le domaine national. «Le document que nous avons soumis au chef de l’Etat à travers la Commission nationale de réforme foncière, nulle part, il n’est dit que les terres doivent être données aux collectivités territoriales», signe M. Kanouté. Le Crafs dit avoir pourtant pris une position claire par rapport à l’immatriculation tous azimuts des terres. «Nous avons des craintes par rapport à cette gestion solitaire et c’est pourquoi nous avons demandé à ce que l’esprit de la loi sur le domaine national, puisse être conservé. Nous avons demandé à ce qu’il y ait des comités paritaires au niveau des délibérations», persiste M. Kanouté.
Ces camarades et lui ignorent les sources du chef de l’Etat par rapport au contenu de leur document, mais leur souhait est que les terres restent dans le domaine national. «Nous avons encore la chance que dans ce pays, 95% des terres soit encore dans le domaine national, nous voulons que cela reste en l’état», déclare Amadou Kanouté.
Se voulant «clair et limpide», le Crafs appelle au dialogue et aux échanges sur son document et à aller sur une réforme et une gouvernance foncières centrées sur la personne, les paysans, la sécurité alimentaire …, afin d’harmoniser les points de vue. «Une réforme qui prend en charge les préoccupations de la base, avec une gestion rationnelle, en tenant en compte de l’aspect genre, une réforme qui ne marginalise pas les populations», aspire Amadou Kanouté.
Pour le directeur exécutif de l’Ipar (Initiative prospective agricole et rurale), les décisions du chef de l’Etat sont conformes à ce que le Crafs avait proposé, du moins sur le principe de la loi sur le domaine national. Cheikh Oumar Bâ note une reconnaissance de l’esprit de la loi. Ce qui constitue un premier point d’accord entre le Crafs et les propos du chef de l’Etat. Le deuxième point d’accord réside dans le souci de Macky Sall, d’avoir une gestion durable des terres. Le troisième point d’accord a trait à la nécessité d’aller vers un dialogue consensuel apaisé, pour que l’ensemble des acteurs puissent négocier.
Cheikh Oumar Bâ estime cependant qu’il faut adapter la loi sur le domaine national, au contexte actuel. «La loi sur le domaine national interdisait les transactions, la vente, le prêt, l’achat de terres. Aujourd’hui, on reconnait que dans certaines zones, il est nécessaire qu’on le fasse pour que les femmes et les jeunes accèdent à la terre», signale M. Bâ. L’autre critère à corriger dans cette loi sur le domaine national, est l’appartenance à la zone pour être attributaire d’une terre de cette zone. «Là, il faut voir les conditions d’attribution, de valorisation de ces terres», plaide le directeur exécutif de l’Ipar.
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