A cause des changements climatiques, les périodes de chaleur sont devenues longues et s’étirent de mars à juillet. Au Nord du pays, cela impacte fortement les conditions d’études avec des températures qui peuvent atteindre plus de 40 degrés entre mai et juin. Pour les enseignants et les élèves, c’est un moment de souffrance qui remet en cause leurs performances. Ils terminent mal l’année, mais aucune mesure d’adaptation n’est encore à l’ordre du jour. En attendant, certains prennent sur eux de débuter les cours à 7h pour terminer avant 15h. Si les examens par académie ne sont pas à l’ordre du jour, certains établissements ont décidé de ne pas faire de devoir ou composition au-delà de 12h.Par Demba NIANG  –

Le thermomètre affiche plus de 40o à 16h. C’est l’heure pour des élèves, qui tirent leurs lourds sacs à dos, de retourner à l’école. Au début du mois de juin, la chaleur étouffe tout le monde, notamment potaches, personnel enseignant et administratif des établissements scolaires dans la partie nord du pays. Chaque année, au retour des vacances de Pâques, les enseignants et leurs élèves du Fouta se retrouvent pour passer le dernier trimestre dans des journées très longues et excessivement chaudes. Et à cette période de l’année, le soleil est haut à 6 heures du matin. Pour avoir adopté la journée continue (8 heures-14 heures ou 16h) dans les 4 inspections de l’éducation et de la formation (Podor, Pété, Matam et Kanel) durant toute l’année scolaire, le problème a été réglé à moitié. Mais, l’heure du démarrage des cours de la matinée (8 heures) devient tardive dans une zone où le temps à cette heure est similaire à 10 ou 11 heures à Dakar.
En ce début de semaine marquant le démarrage des compositions du troisième trimestre pour l’élémentaire et du second semestre pour le moyen-secondaire, les enseignants en service au Fouta et leurs élèves sont heureux que l’année scolaire connaisse son épilogue. Car ils le montrent si justement qu’ils en ont déjà assez des salles de classe, avec la forte chaleur de ces trois dernières semaines. Mais, la souffrance des enseignants et des élèves pour cause de chaleur débute au mois d’avril. Dans des salles pour la plupart en tôle, mal aérées, inadaptées au climat de la région, les enseignants et les élèves souffrent dès la reprise des enseignements-apprentissages du dernier trimestre de l’année scolaire. Si dans les écoles élémentaires, les après-midi de mardi et jeudi, les maîtres et leurs apprenants affrontent la chaleur extérieure et intérieure entre 16 et 18 heures, dans les collèges et lycées, la chaleur ingérable pèse sur eux entre 8 et 14 heures. Pour un thermomètre qui affiche quotidiennement entre 32 et 36 degrés jusqu’avant midi, plus de 40 degrés en début d’après-midi et un soleil accablant dès 6 heures. A la fin des longs congés du deuxième trimestre (deux semaines en général), les enseignants, en déplacement à l’intérieur du pays, reviennent pour affronter les rigueurs de l’harmattan. Les plus anciens expliquent même que mai-juin est un moment de tensions. «C’est une période où le climat entre collègues est toujours tendu du fait quelque part de la forte chaleur. Les chefs d’établissement ne gèrent que des problèmes entre enseignants durant ces deux derniers mois de l’année scolaire», dit un enseignant.

Début des cours à 7h entre avril, mai et juin ?
Aujourd’hui, il devient urgent de s’adapter aux changements climatiques pour de meilleures conditions de travail. Au cours du dernier trimestre de l’année scolaire, au Fouta, les journées débutent bien avant même 6 heures, avec un soleil très matinal. Ensuite, il refuse de se coucher, car il est visible jusqu’à 19h passées. Pour cette raison, un changement d’horaire de démarrage des cours dans la matinée dans cette partie du Sénégal sera le bienvenu pour les enseignants et les apprenants. Si dans les collèges et lycées du Fouta, l’horaire du démarrage des cours reste maintenu, dans certaines écoles élémentaires, les maîtres de Cm2 convoquent leurs élèves à 7h à partir du mois de mai. Il suffit de faire une petite visite dans les cours des écoles élémentaires à cette période pour constater que les élèves y sont présents de façon matinale. Et justement, dans ces écoles, des enseignants ont expérimenté depuis plusieurs années la possibilité du démarrage des cours à partir de 7 heures. M. Faye, qui tient une classe multigrade (Cm1-Cm2) dans le département de Matam, explique : «Cette année encore, je démarre, depuis mi-avril, mes cours à 7 heures pour descendre à 13 heures. Et entre 11 et 13 heures, c’est la croix et la bannière pour rester dans les salles.» Ils sont nombreux dans le Fouta à faire comme lui. A .S, un directeur d’école dans l’Inspection de l’éducation et de la formation de Pété et tenant une classe, révèle : «Je termine deux leçons avant l’arrivée à l’école de mes collègues. Même si les autres démarrent leurs cours à 8 heures, je sais qu’à 7 heures, tous les élèves sont présents. Mais puisqu’il n’y a rien d’officiel, mes collègues maintiennent l’horaire de 8 heures, mais moi, en fonction des conditions climatiques, je commence mes cours à 7 heures, et cela depuis 4 ans.»
Comme eux, beaucoup de maîtres de Cm2 se sont déjà habitués à cette pratique officieuse, mais les autres titulaires des classes intermédiaires confient qu’ils sont favorables pour éviter aussi aux élèves «la souffrance entre 12 et 13 heures et le calvaire de la chaleur sur le chemin de retour à la maison à 13 heures». «Nous sommes favorables à une dérogation pour la partie nord, afin de remonter d’une heure l’horaire de démarrage des cours pour le dernier trimestre de l’année scolaire», se confie un enseignant. «Ce serait une idée ingénieuse de la part du ministère de l’Education nationale», poursuit un autre.

15h : Une heure compliquée pour les examens
Les enseignants des collèges et lycées des 4 inspections de l’éducation et de la formation du Fouta, contrairement à leurs collègues de l’élémentaire, n’ont pas expérimenté le démarrage des cours à 7 heures. Mais, ils révèlent que chaque année à cette période de l’année scolaire, cela fait partie des discussions. «Le système a fait que les décisions se prennent d’en haut pour être exécutées à la base. Et selon les spécificités de chaque zone (liées surtout au climat), il devrait y avoir une gestion différenciée», regrette un professeur. Les enseignants et leurs élèves espèrent que les syndicats vont plaider pour le décalage de l’horaire de démarrage des cours à 7 heures entre avril, mai et juin au niveau des autorités académiques du Sénégal. Pour les potaches et leurs formateurs qui viennent à l’école les après-midi exceptionnellement à partir de 17 heures, ils sont obligés de se présenter pour les compositions et les examens à une heure où les populations ne s’imaginent pas sortir de chez elles. Un professeur d’histoire et de géographie explique : «Entre 14 et 16h, il est impossible de faire un cours normal. Les élèves passent tout leur temps à demander la permission pour aller boire. Et tu ne peux le refuser car il fait excessivement chaud.» Quid des enseignants ? «En vérité, il est impossible d’enseigner correctement à cette heure. Au bout de trente minutes, tu es épuisé, tu as la gorge sèche, tu transpires. Et les élèves ne sont plus concentrés», ajoute-t-il. Pire, il n’y a pas de mesures d’accompagnent pour permettre à tout le monde d’affronter les rigueurs climatiques : pas de rafraîchissement, pas de climatisation.

Examen par académie ?
Pour maintenir les performances des élèves, les devoirs et examens ne se tiennent pas dans certains établissements au-delà de 12h.
Mais, ils devront composer à 15h lors des examens de fin d’année. Comme tous les autres potaches du pays. Les élèves de troisième et de terminale et leurs surveillants terminent l’année dans la souffrance de la chaleur. Ces deux dernières semaines, ils sont obligés de se présenter à l’école à 15 heures pour les besoins des compositions du second semestre. Bien sûr à cette période où, entre 12 et 17 heures, le soleil est accablant. Et les populations se terrent chez elles. Pour la dernière ligne droite, les élèves de 3ème et de terminale doivent souffrir pour regagner des salles de classe, en transpirant pour composer, en se ventilant à l’aide de feuilles de cahiers ou avec un éventail. Si les surveillants (enseignants) sortent des salles pour un instant de prise d’air, les élèves affrontent, pour la durée de l’épreuve, les particules de chaleur laissées par le soleil sur les tôles qui couvrent leur salle.
Moins d’un mois après les compositions, les candidats au Bac et au Bfem seront confrontés à cette même situation pour passer ces examens. Pour des élèves déjà habitués à des journées continues ou des cours exceptionnellement dans l’après-midi qui démarrent à 16 ou 17 heures, les épreuves de 15 heures au Bac et au Bfem sont éprouvantes. «Les gens ne sont pas mis dans les mêmes conditions de performance que les autres. Passer un examen à 15h en transpirant, ça remet en cause la concentration», regrette un enseignant.
En attendant l’instauration des examens par académie, les candidats au Bac et au Bfem des départements de Podor, Matam et Kanel continueront d’affronter la forte chaleur de 15 heures et ses conséquences sur leurs performances dans l’après-midi.