Les rideaux sont tombés hier sur le Forum mondial de l’Economie sociale et solidaire (Ess). Après 5 jours d’échanges, les participants ont, dans une déclaration, fait part des recommandations permettant de tracer «un chemin allant dans le sens d’une bifurcation écologique, sociale et économique». Dans le document, les auteurs sont revenus sur la nécessité d’accorder une importance capitale à l’économie solidaire. Ainsi ont-ils souligné : «Nous ne sommes pas toutes égales et tous égaux face au modèle économique dominant. Il y a des gagnantes et des gagnants, mais il y a surtout des perdantes et des perdants. Les jeunes, les femmes, les personnes des économies informelle, populaire et de l’économie des plateformes en sont particulièrement victimes. L’Economie sociale et solidaire, proposant un modèle économique fondé sur la coopération et non la concurrence, sur la primauté des personnes et de la nature avant les profits, est un moyen fort d’inverser cette tendance.»
Attirant l’attention sur le fait que «notre monde est rythmé aujourd’hui par l’augmentation des inégalités et de la pauvreté, les guerres, les discriminations…», les auteurs de la Déclaration de Dakar soutiennent qu’il nous faut «un changement de paradigme donnant la priorité aux personnes et à la planète».
Dans la série de recommandations, il est préconisé de : «Faire confiance aux nouvelles générations en leur permettant d’exercer leur pouvoir d’agir, lutter contre toute forme de discrimination qui viendrait remettre en cause l’autonomie des individus et leur capacité à porter des initiatives socio-économiques, valoriser une économie sociale et solidaire en poursuivant sa co-construction dans les territoires par les populations locales, renforcer l’économie collective comme moyen privilégié d’améliorer la condition des personnes dans des situations précaires et informelles.» Il est également conseillé de «préserver les ressources naturelles et la biodiversité en promouvant les communs, lutter contre les changements climatiques et promouvoir l’économie circulaire». En outre, dans la déclaration, il est demandé d’institutionnaliser «des espaces de co-construction des politiques publiques intersectorielles à chaque niveau gouvernemental, permettre la bonne articulation entre échelon local et échelon national afin d’assurer un développement soutenable de l’Economie sociale et solidaire». Autres recommandations formulées, c’est «d’initier des campagnes de sensibilisation et promotion à l’égard des pouvoirs publics, des populations et des actrices et acteurs de l’économie et de la Société civile, afin de mieux faire connaitre l’Ess et ses principes, de mettre en œuvre des outils d’accompagnement des gouvernements locaux et nationaux qui souhaiteraient s’engager dans un processus de soutien au développement de l’Ess sur leur territoire».
L’Ess, pourvoyeuse d’emplois
Dans ce même ordre d’idées, les participants veulent «inciter à la création et au développement de programmes d’enseignement de l’Ess à chaque niveau d’enseignement et de formation, et renforcer la recherche-action autour de l’Ess, ainsi que le partenariat entre le milieu de la recherche et l’Ess». Dans le document, il est aussi formulé le vœu de «mettre en place un écosystème intégré d’accompagnement technique et financier de proximité adapté aux besoins des entreprises collectives, notamment pour des projets portés par des jeunes et/ou des femmes». Les auteurs de cette déclaration souhaitent la création de «plateformes de capitalisation, de diffusion et de valorisation des initiatives, des expériences et des connaissances afin de renforcer la capacité de celles et ceux qui agissent, et de celles et ceux qui décident».
La ministre de la Microfinance et de l’Economie sociale solidaire, qui a entendu les différentes préoccupations, a reconnu que «les réponses classiques ne sont pas les plus adaptées face à la diversité des problématiques et des publics concernés». D’où, selon Victorine Ndeye, «l’importance d’accroître le poids de l’Economie sociale et solidaire dans la définition et la mise en œuvre des politiques publiques et de faire preuve davantage de souplesse et d’inclusion, notamment vis-à-vis de deux pans de la société, en l’occurrence les femmes et les jeunes». Elle reste convaincue que «cette forme d’entreprendre s’impose à nos sociétés et à nos populations, avec la claire vision qu’elle est la clé de la nécessaire transition de l’économie informelle vers des économies collectives et durables pour les territoires».
Le secteur de l’Ess est pourvoyeur de croissance, créateur d’emplois décents et générateur d’inclusion sociale. Dès lors, indique Mme Ndeye, «le travail de cadrage juridique, d’identification d’obstacles et de promotion de la vertu d’une économie résiliente et durable doit être promu dans nos Etats sensibles aux chocs exogènes».
Par Dieynaba KANE – dkane@lequotidien.sn