D’habitude à Tract, peu nous chaut d’entendre les battements et sarabandes des tam-tam politiques avec lesquels nos chercheurs de voix rameutent le présumé bétail électoral. Nous ne sommes pas sensibles à cette musique. Mais j’avoue que quand le mur du «çon» est dépassé, nous ne pouvons pas ne pas entendre : aussi ai-je appris avec consternation et désolation l’appel aux meurtres par fusillade des anciens dirigeants du Sénégal, proféré par Ousmane Sonko de Pastef. Je l’appelle instamment à l’exercice de plus de responsabilité et de nuance dans ses propos publics. D’abord et surtout, parce qu’il représente un atout non négligeable pour susciter la troisième alternance politique, dont nous pensons qu’elle est souhaitée par une majorité de Sénégalais pour février 2019. Face à la minorité présidentielle de Macky Sall et ses (déjà !) 49% aux législatives. A cet égard, Sonko pourrait mordre sur des segments importants de l’électorat à la Présidentielle de 2019. Obligeant, avec d’autres, Macky Sall à un second tour, pour une alternance qui serait alors inéluctable.
Cependant, nous ne saurions rester indifférents devant l’apologie du meurtre d’anciennes personnalités politiques qui ont eu à gérer ce pays, promue par cet allié objectif de l’alternance. Le porte-parole du gouvernement a condamné, le porte-parole du Pds a condamné. Le fait que les condamnations des propos de Sonko viennent de tous les camps nous rassure d’ailleurs sur le fait que nous, Sénégalais, saurons toujours nous retrouver autour de l’essentiel. Et cet essentiel, c’est d’abord la tempérance et le sens du juste milieu. Nous appelons Sonko à assumer son statut de contributeur potentiel à la future alternance. Et donc de ne pas se «dansokhoïser». Pour évoquer mon ami et aîné Dansokho qui, alors ministre dans le gouvernement de Diouf, déclara en un certain hivernage : «Le pays est mal gouverné.» Se retrouvant à l’accueil du chef de l’Etat à l’aéroport, obligé de fuir le regard du Président Diouf de retour de vacances, avant d’être défénestré (selon ses propres mots) du gouvernement quelques jours plus tard. Dansokho, encore défénestré du gouvernement du Prési­dent Wade. Retrouvant son vivier naturel qu’est l’opposition systématique, Dansokho accusera Abdoulaye Wade d’être le commanditaire du casse de la Bceao de Korhogho, puis son fils Karim Wade d’avoir voulu faire entrer des quantités de F Cfa hors de l’entendement dans un aéroport français, soit 3 000 milliards. Chose matériellement impossible. Seul le grand âge et les rhumatismes (dont nous lui souhaitons de se relever) semblent avoir réussi à assagir l’octogénaire Amath. Pourvu que ça dure.
De l’outrance verbale à la galéjade ridicule, il n’y a qu’un pas. Vite franchi. Monsieur Ousmane Sonko, vous ne pouvez pas vous abaisser non plus à devenir le Assane Diouf de l’opposition sénégalaise, pour évoquer l’insulteur public «américain» numéro 1, qui aura fini par être expulsé des Usa pour finir dans la geôle de Rebeuss. A cet égard, oui, on ne vous mènera pas en prison, car autant je salue le fait que mon ami le ministre porte-parole Seydou Guèye condamne vos propos et que nous nous retrouvions dans ce même camp de la condamnation ferme, autant je ne comprends pas que le même ministre Seydou Guèye appelle «l’Etat à prendre ses responsabilités». Comme s’il n’était pas en charge d’annoncer les décisions et responsabilités prises par l’Etat en toute affaire. Le régime Sall ne courra pas le risque de vous «victimiser» (encore plus), M. Sonko. Ce n’est pas une raison pour vous complaire dans les chemins de traverse de la violence verbale. Qui n’ont jamais mené à rien, sinon réveillé l’hydre de la violence physique incontrôlée.
Ousseynou Nar GUEYE
Directeur de publication et de la rédaction de Tract