La 117e édition du Gamou de Tivaouane a été close par un message fort du khalife général des Tidianes, Serigne Mbaye Babacar Sy Mansour. Il a demandé aux Sénégalais de refuser d’être les boucliers des responsables politiques va-t-en-guerre, après avoir sermonné une partie de la classe politique sénégalaise.
Le khalife général des Tidianes a insisté sur les mots pour parler des maux de la classe politique. Très remonté, il a clos la 117e édition du Gamou de Tivaouane ce lundi par un discours très critique qui met en lumière son rôle de guide religieux. Serigne Mbaye Babacar Sy Mansour invite les hommes politiques à «cesser leurs divergences» pour une élection présidentielle apaisée. Il est catégorique : «Mon vœu, c’est qu’il faut faire preuve d’honnêteté, taire toutes nos divergences, bannir certaines tares comme les barbaries, les tueries, les calomnies, les médisances et mensonges, l’hypocrisie, la fourberie, entre autres maux qui gangrènent aujourd’hui notre société. Le pays a plus besoin d’éducation, de santé…» Il exhorte les leaders de parti à prendre leurs responsabilités durant la Présidentielle de 2019. En un mot, il les invite à éviter les dérapages et écarts de langage, sources de tensions sociales, à se vouer un respect mutuel. Un appel dans le sens de sauvegarder la concorde nationale pour ne pas «brûler le pays» en perspective de cette compétition qui charrie les passions. Il a demandé à ses compatriotes de cultiver la cohésion sociale en cette période de précampagne, leur a suggéré de ne jamais s’amuser à semer le moindre trouble dans ce pays qui a toujours été stable.
En priant pour une élection présidentielle 2019 apaisée, le religieux attire l’attention des acteurs politiques sur le fait que «les ambitions et les envies de pouvoir ne doivent pas prendre le dessus sur l’intérêt général. Il nous faut œuvrer rien que pour la paix et évitons les déchirements. Notre pays ne peut avoir que la stabilité, parce que l’œuvre de nos aïeux ne peut et ne saurait être engloutie, personne ne peut y parvenir, et qui oserait forcer le barrage le ferait à ses risques et périls». Il rappelle les règles du jeu : «Chacun a le droit d’aller à l’assaut du pouvoir, ce qui est tout à fait légitime.» En revanche, il conseille : «Qu’on y mette un peu d’élégance d’autant que le pouvoir est entre les mains de Dieu qui le donne à qui il veut !» Le religieux qui rappelle que «le Sénégal est un et indivisible» demande aux politiques d’éviter de «prendre en otage les citoyens», car on serait tous perdants parce que, souligne-t-il, «le Sénégal nous appartient à tous et c’est un bien que nous nous devons de préserver. C’est pourquoi on les appelle à se donner la main, mais aussi à jouer le jeu de manière démocratique».
Dans cette compétition, ce sera le citoyen qui va arbitrer les ambitions. Il leur demande de «refuser d’être les boucliers des hommes politiques, ceux surtout va-t-en-guerre». Le ministre de l’Intérieur, Aly Ngouille Ndiaye, à la tête d’une forte délégation gouvernementale, écoute religieusement les paroles du patriarche. Très en verve, le khalife général des Tidianes, qui n’a pas fait dans la langue de bois, a exprimé ses inquiétudes par rapport à une «certaine tension qui prévaut actuellement dans le champ politique sénégalais, avec des leaders qui passent le plus souvent de leur temps à verser dans les dérives, les invectives». Il les invite à «cultiver la paix et la stabilité dans le pays» pour une pacification de l’espace politique. Par contre, il a tenu à souligner l’exemple du Président Macky Sall qui, selon lui, «est d’une responsabilité et d’une sagesse impressionnante». «Il est au-dessus de la mêlée et ne gaspille pas son énergie dans les invectives et d’autres actes condamnables», salue Serigne Mbaye Sy.
Rappelant que «mieux vaut prévenir que guérir», Serigne Mbaye Babacar Sy Mansour, qui n’a pas manqué de prier pour la paix dans la sous-région, se désole surtout du fait que «de nos jours les gens versent trop dans les médisances, la méchanceté, le mensonge», entre autres tares de la société sénégalaise qu’il faut, pense-t-il, «combattre par tous les moyens». Il a aussi beaucoup insisté sur la nécessité de lutter contre la crise des valeurs émaillée, entre autres, par les dérives sur internet dues certainement à un manque de formation de la jeunesse. Le marabout, exaspéré par les dérives sur le net, les réseaux sociaux, les obscénités via les écrans de télé, s’est désolé d’un certain «libertinage». Qui, en fait, n’est qu’une «aliénation née de toutes les agressions via le net et les écrans de télé». Il a également insisté sur «un retour aux valeurs, surtout du côté des jeunes en crise de repères», sur la nécessité pour «les adultes d’avoir plus d’égard à l’endroit des enfants».
Concluant sur le thème de l’édition 2018 du Mawlid, «Sur les traces de Al Amine : Ensemble pour la paix», le khalife a prié pour une paix durable au Sénégal et pour des élections apaisées, d’autant que «rien ne peut se faire, se construire, se bâtir sans l’unité, la paix et la cohésion sociale». Embouchant la même trompette, le porte-parole de la famille Sy est largement revenu sur l’actualité sociale, en invitant les fidèles à un retour aux préceptes de l’islam. Serigne Pape Malick Sy a exhorté les musulmans à se donner la main, s’accorder le pardon, le respect mutuel, une considération réciproque. Il insiste sur le fait que «l’heure n’est pas à la division, à la discorde».