Après avoir jeté un regard rétrospectif sur la situation qui a prévalu avant l’adhésion du Sénégal à l’Itie en 2013, quatre anciens membres de cette institution ont rappelé les acquis, avant de formuler un certain nombre de recommandations, pour un «repositionnement stratégique» de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives, après dix ans de mise en œuvre au Sénégal.Par Dialigué FAYE –
Dans la mise en œuvre de la Norme Itie (Initiative pour la transparence dans les industries extractives), le Sénégal a réalisé d’importants progrès.
Mais, «au regard de sa position transversale et du rôle central des données dans la planification et le suivi des politiques publiques, le Sénégal pourrait tirer bien plus de cette belle institution qu’est l’Itie dont la valeur inestimable des données fournies n’a d’égale que sa contribution à la gouvernance des secteurs minier, pétrolier et gazier, voire au pilotage de la politique économique du pays». C’est l’avis de quatre anciens membres de l’Itie. A travers un texte dont Le Quotidien a eu copie, El Hadj Amath Diallo, ancien représentant du secteur privé au Cn-Itie, Abdou Aziz Diop, ancien représentant de la Société civile, Dr Moustapha Fall, ancien responsable des Affaires juridiques et Cheikh Tidiane Touré, ancien Secrétaire permanent, plaident pour le repositionnement stratégique de l’Itie.
En effet, expliquent-il, «pour réaliser pleinement son potentiel, l’Itie ne doit pas se cantonner à la production de rapports destinés à suivre les exigences de la Norme. De même, elle ne saurait continuer à subir le débat sur le secteur extractif face à un public de plus en plus demandeur et une presse engagée».
Ces co-auteurs considèrent que l’Itie «peut jouer un rôle de conseil pour l’Etat dans les processus de révision des contrats ; renforcer l’analyse des exigences de l’Itie mondiale (déclaration des bénéficiaires effectifs, divulgation des coûts et des réserves, analyse des scénarios budgétaires…) ; aider dans l’implémentation et le suivi des fonds que le Sénégal peine à mettre en œuvre ; assurer un suivi des investissements réalisés à partir des fonds intergénérationnels ; identifier les réformes à mettre en œuvre pour renforcer la régulation, éviter les conflits sociaux ou prendre en charge les défis émergents, liés à l’exploitation pétrolière et gazière…
En plus d’élargir le périmètre des entreprises et entités déclarantes permettant à l’Etat d’avoir une vision globale du secteur, l’Itie peut être un cadre de dialogue avec les administrations permettant aussi de remonter les préoccupations des investisseurs».
De telles orientations, disent-ils, «ne seraient possibles que si les nouvelles autorités envisageaient les mesures suivantes : transformer la structure de l’Itie en une autorité administrative indépendante avec une obligation de soumettre des rapports circonstanciés et conjoncturels sur l’évolution des dynamiques du secteur pétrolier, gazier et minier ; institutionnaliser l’Itie comme organe consultatif et comme un partenaire-clé pour les ministères (Mines, Finances, Environnement) en matière d’évaluation des politiques publiques extractives ; promouvoir des partenariats avec l’Assemblée nationale, les milieux de recherche et Centres d’excellence pour l’innovation et l’expérimentation de projets-pilotes impliquant les communautés». En outre, ces anciens membres de l’Itie suggèrent au gouvernement, «d’utiliser les ressources offertes par le mécanisme de l’Itie au service de la nouvelle vision stratégique du secteur extractif orientée vers la maximisation des retombées socioéconomiques tant au niveau national qu’à l’échelle régionale ; élargir la portée et l’impact des données collectées en intégrant des mécanismes d’analyse prédictive pour anticiper les tendances du secteur (par exemple, les flux de revenus ou les besoins en infrastructures). Cela pourrait se faire via des partenariats avec des institutions de recherche telles que l’Ansd ; d’utiliser l’Itie au service de la captation de la valeur ajoutée et du développement durable».
Sur les acquis, de l’adhésion du Sénégal à la Norme Itie, ils ont rappelé le fait que le pays puisse «évaluer ses textes et sa pratique à l’aune des bonnes pratiques internationales, offrant une opportunité de benchmark avec plus de 50 pays. Après dix 10 ans de mise en œuvre de l’Itie et en dépit des efforts de mainstreaming, l’Itie reste la première source d’information de qualité sur le secteur extractif (paiement des entreprises, données de production et exportations, déclaration des régies financières, statistiques sur l’emploi et les transactions avec les fournisseurs, contribution au Pib, etc.) ; ce qui permet de renforcer le débat public».
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