Le Sénégal ne pouvait pas rêver mieux que ça ! Youssoupha, Booba, Gims, Toumani et Sidiki Diabaté, entre autres, sont venus se produire au Sénégal en 2016. Loin de faire l’unanimité, l’arrivée de ces artistes a fait grincer des dents surtout du côté des cultures urbaines. Nombreux sont les acteurs qui se sont offusqués des montants déboursés pour attirer ces étoiles de la musique mondiale. Les sorties  de Davido et de Booba ont affolé les stars locales qui ont été touchées dans leur orgueil. Aujourd’hui, les locaux veulent plus de soutien et en appellent à la solidarité citoyenne. Comment en sont-ils arrivés là, quand on sait qu’ils remplissent les mêmes salles que ces stars mondiales ? La question aux spécialistes…

En concert à Dakar, le rappeur Booba avait secoué le rap sénégalais qui s’est classé troisième mondial après celui des Etats-Unis et de la France. «Le rap sénégalais n’est pas connu, c’est comme le rap polonais.» Cette phrase de Booba a réussi à plonger le mouvement hip-hop sénégalais dans un débat sans fin. L’orgueil des «pères fondateurs»  a été sérieusement touché. A-t-il raison ? Si la question reste posée, elle divise par contre. D’aucuns approuvent et y voient l’opportunité de s’interroger sur ce qui le freine, tandis que d’autres soutiennent mordicus que ce n’est pas la réalité. Dans tous les cas, une chose reste sûre : depuis Bidew Bou Bess vers la fin du siècle passé, le rap n’a pas eu de disque d’or. Donc aucun artiste issu de ce milieu n’a pu vendre 100 mille exemplaires. Peut-on parler d’une reconnaissance étrangère alors qu’on ne parvient pas à vendre 100 mille exemplaires ? La poussée de la nouvelle génération permet d’entrevoir un lendemain meilleur.

Capitale mondiale du rap en 2016 ?
Armée de Skills, d’un flow dément et de nouvelles techniques d’écriture sur une musique ultra moderne, la nouvelle génération a les moyens  de sa politique qui est d’inscrire le rap galsen au tableau des meilleurs au monde. Seulement, cette ambition, quoi que légitime, nécessite un investissement qui commence par une exposition médiatique. Ngaaka Blindé, Dip, Alkhou brick et Elzo, les portes drapeaux d’une génération pétrie de talent, l’ont tous compris. Les trois derniers nommés ont, à tour de rôle, fait salle pleine au théâtre Daniel Sorano. Ngaaka a inscrit son nom comme le premier jeune à remplir les 1800 places du Grand théâtre, chose assez facile dira-t-on. Seulement, des gens qui ont fait plus de 20 années de carrière et qui sont considérés comme des grands du hip hop galsen y ont lamentablement échoué. Cependant, cette performance semble prendre plus de place qu’il n’en faudrait pour certains et créer des envies chez d’autres. Dès lors, les clashes entre artistes deviennent un formidable outil de promotion. Lancer des piques est devenu le thème du moment ! Hakil gagne en notoriété en déclarant la «guerre» à Ngaka. Bi Bolla réplique sévèrement sur Dip avec une vidéo agressive, et par la même occasion, il met une image à ce rappeur dont on dit «prometteur». Phénoménal ! Ces échanges verbaux diffusés sur internet n’enchantent pas tout le monde. Si les amateurs n’y voient aucun problème, les anciens du mouvement parlent d’une faille sur le plan organisationnel et mettent en garde contre les conséquences de ces actes.
Aujourd’hui, les «voix aînées» essayent d’inonder leur expertise dans d’autres secteurs. Xuamn et Keyti, qui font partie des géniteurs du mouvement, ont trouvé une nouvelle voie : le journal rappé. Diffusé sur la toile, il affiche des millions de vue sur You Tube et s’exporte dans plusieurs pays.
Recomposé selon une nouvelle vision musicale, Daara J Family est un succès mondial. Loin de la touffeur dakaroise, Ndongo et Faada croulent sous les louanges dans plusieurs capitales mondiales en laissant le…. chant libre au Sénégal aux nouveaux loups. Awadi, itou.  Ces rappeurs ont enflammé le début des années 90 où les «podiums» faisaient partie du décor dakarois. 20 ans, ils ont passé le micro en essayant de redonner un autre souffle. Eloigné des estrades.  C’est le temps de la révolution, mais les mauvaises habitudes ne sont pas gommées par cette race de jeunes rappeurs.