Amis, proches ou fans sont venus honorer la mémoire du leader de Kassav’, lors d’une messe à l’Eglise Saint-Sulpice. Un moment poignant mais teinté de joie.
«Tapez avec vos mains», lance le chef de chœur aux proches, amis ou fans venus rendre hommage à Jacob , samedi matin à l’Eglise Saint-Sulpice. Les chœurs entonnent énergiquement la liturgie finale, un chant en créole, accompagnés du ka, ce tambour typiquement antillais. Deux spectatrices, debout, esquissent quelques pas de danse tandis qu’une dame, assise, essuie une larme qui a roulé sous son masque noir. S’il ne fallait qu’une scène pour saisir l’atmosphère de la messe, ce serait celle-là. Une fête en la mémoire d’un monument de la culture antillaise, tragiquement décédé le 30 juillet dernier des suites du Covid-19.
Bien sûr, parfois la tristesse est palpable. A un moment, Migail Montlouis Félicité, amie de l’artiste, trop émue, doit interrompre son discours. «Non Kassav’ n’est pas mort mais amputé d’un membre», martèle la photographe. Elle finit son intervention par un tremblotant «Merci Jacob. Merci M. Desvarieux». Un autre ami de l’artiste, qui a hésité à venir, confie au Figaro : «J’ai eu peur que ce soit triste mais ça ne l’était pas.»
Pour lui et le reste de l’audience, les blagues du Père Marcel Crépin, originaire de Fort-de-France et qui a fait le voyage pour l’occasion, sont une bouffée d’oxygène. «J’ai une confidence à vous faire… avant j’étais disc-jockey et je passais du Kassav’», confesse le prêtre provoquant l’hilarité générale. Il a aussi un mot pour les personnes atteintes du coronavirus et le personnel soignant. Des mots qui résonnent terriblement avec l’actualité, alors que les Antilles sont confrontées à une quatrième vague de l’épidémie particulièrement violente.
Guadeloupéens, Martiniquais et Guyanais de métropole sont venus en nombre. Patricia 52 ans et ses deux filles Sarah 15 ans et Tess 11 ans, originaires de Guadeloupe, ont fait le déplacement de Pontoise. «Kassav’ ça représente toute ma vie, toute ma jeunesse, toute mon adolescence, toute ma vie de jeune femme», résume la mère avant d’ajouter «Sarah a eu la chance de les voir en concert, elle a adoré». Mauricette et Monique, deux belles-sœurs originaires de Guadeloupe et Martinique regrettent-elles que plus de monde n’ait pas assisté à cette «belle cérémonie». Harry Jeanne tempère : «On a imprimé 900 flyers et on n’en a pas assez.» Mais tout le monde s’accorde à dire que cette cérémonie était nécessaire.
«Un Dieu vivant»
«J’ai connu Jacob, il y a bien longtemps. Curieusement il était discret, timide. Il savait pratiquer l’autodérision», explique Victorin Lurel. L’humilité de l’homme contraste avec son statut : «Jacob était déjà une star planétaire (…) A Abidjan, on l’appelait le Dieu vivant», confie le sénateur Ps de Guadeloupe.
«Aujourd’hui, il fallait honorer un pan de notre histoire, un monument, un compatriote qui a rassemblé la communauté et à contribuer à nous faire connaître», déclare Babette de Rozières, cuisinière, animatrice et conseillère régionale Lr d’Île-de-France. «C’est dommage, que ce n’est qu’à un moment pareil, que nous faisons un», regrette-t-elle.
Le Figaro