HOMMAGE – Le fondateur du magazine économique «Réussir» enterré hier : Baye Dame Wade, c’était un «homme pieux»

Hier, les journalistes ont rendu un ultime hommage à l’un des leurs, décédé jeudi à Dakar des suites d’une longue maladie. Après la levée du corps à l’hôpital Principal, la dépouille de Baye Dame Wade, fondateur du magazine «Réussir», a été acheminée à Nguith où il a été inhumé.
Baye Dame Wade a été inhumé hier, aux côtés de ses aïeux à Nguith, région de Louga. A Dakar où il servait, un ultime hommage lui a été rendu par ses confrères et proches. A la morgue de l’hôpital Principal, la belle et sublime voix d’un homme récitant le saint Coran berçait les cœurs. Des moments qui rappellent que toute âme qui goûte à la vie est condamnée à mourir. Devant l’épreuve, le vieux Khalifa Ababacar Wade, père du défunt, main posée sur le cercueil enveloppé d’un drap, est resté un vrai croyant. Pas de larmes. Sinon des prières pour un fils qui a pleinement accompli son devoir vis-à-vis de son père, mais aussi de l’ensemble des membres de sa famille. Au nom de ses pairs, le journaliste Issa Sall a salué la mémoire d’un confrère qui l’a marqué par «sa piété, sa droiture. Et un journaliste doit avoir beaucoup de droiture. Je crois que Baye Dame en était un exemple». Les témoignages se succèdent et se ressemblent. Les uns installés sous la bâche, les autres debout sous le soleil du vendredi saint, écoutaient tous religieusement les qualités retenues de l’homme. S’exprimant au nom des personnes du milieu économique, Mansour Kama a parlé d’un «modèle, une icône» de la presse qui a accompli sa mission sur terre.
Et pour Elimane Kane, chargé de Programme à Oxfam, «c’est une grosse perte parce que c’était quelqu’un qui contribuait de manière efficace et positive à la marche de notre pays à partir de son domaine, c’est-à-dire le journalisme». Et de renchérir : «C’était un vrai musulman, pieux, une personne affable, respectueuse et toujours à l’écoute des autres avec aussi un esprit critique qui servait beaucoup. Ce qui m’a le plus marqué, c’est quand on avait ensemble voyagé à Bruxelles dans le cadre du Forum économique mondial, et c’est dans ce cadre-là que j’ai découvert l’humilité de la personne et sa rigueur dans le travail.» Baye Dame Wade, le désormais ex-patron du magazine de référence en économie au Sénégal Réussir, a laissé derrière lui deux enfants et une épouse éplorés. Cette femme que le fondateur et directeur de publication de Réussir de son vivant ne manquait jamais de rendre hommage à chaque occasion, comme rapporté par un membre de la famille. Amaye Badji connaît aussi le disparu pour avoir été le rédacteur en chef du magazine Réussir. Il nous raconte : «C’était un de ces mentors-là, un de ces encadreurs-là qui te forment concomitamment sur l’aspect professionnel, mais aussi humain. Baye Dame, ses références, c’était le Coran, son grand-père Abass Sall. Tout ce qu’il nous apprenait en termes d’éthique et de déontologie, il le faisait passer à travers des anecdotes religieuses.» Selon lui, cette rigueur qui doit être la compagne de tout professionnel de l’information, Baye Dame Wade ne badinait pas avec. «Réussir a réussi la prouesse de faire 13 ans sans procès en diffamation parce que simplement il fallait toujours vérifier, confirmer avant de publier une information. L’information économique est plus sensible que celle politique parce qu’elle est là, plus durable. Tous ceux qui sont passés entre les mains de Baye Dame sont maintenant assez outillés dans d’autres organes pour pouvoir traiter comme il se doit l’information économique. Et c’était ça Baye Dame», témoigne-t-il. Ceux qui l’ont côtoyé retiennent de lui également son sourire légendaire. Et Issa Sall, ancien patron de la rédaction de l’ex-hebdomadaire Nouvel Horizon, raconte une anecdote. Il dit : «Chaque fois qu’il priait, je venais lui dire faux marabout. Et quand qu’il sortait de sa prière, il me disait, toi, tu es un païen. Je ne suis pas un païen, mais c’était notre dialogue régulier.» Hier, des prières ont accompagné le corbillard qui a pris la direction de son lieu d’inhumation, laissant derrière lui des proches soumis à la volonté divine.
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