Passionné de littérature, de lecture et d’écriture, le journaliste, Ibou Diouf, propose un recueil de 51 poèmes, intitulé «Viatique d’un confinement». Dans ce recueil de poèmes, Ibou Diouf invite à voyager à travers cette période particulière qui a marqué l’humanité, la pandémie du Covid-19.Viatique d’un confinement, de quoi s’agit-il exactement ?

Cet ouvrage, comme son nom l’indique, est un viatique et qui parle de viatique, parle d’un voyage. J’ai défini donc cette période du confinement comme un voyage parce que tout simplement, on était tous obligés de surseoir à nos activités. Il y avait un virus qui était là, qui circulait et qui menaçait l’humanité. Voilà pourquoi j’ai opté pour ce titre : Viatique d’un confinement. En latin, «viatique», ce sont les provisions qu’on donne souvent aux voyageurs. Et le confinement, je le définis souvent dans cet ouvrage, comme une virée forcée pour fuir un mal qu’on a nommé «coronavirus». Donc Viatique d’un confinement, c’est le titre de ce recueil de poèmes qui en forme le premier mouvement et sans équivoque apparente, puisqu’il oriente d’emblée tout ce que j’ai voulu montrer à travers ces lignes. Il s’agit donc de notre vécu, du vécu de nos proches, de ces moments de peur, de tristesse. De ce que j’ai pu observer, ce que j’ai lu et vu à la télé. Et surtout de solitude dans les situations difficiles liées à ce virus inconnu : le coronavirus.

Le coronavirus, sujet principal de l’ouvrage, com­ment l’avez-vous vécu ?
Comme tous les citoyens du monde, mais avec la particularité que j’ai été confiné à un moment. Et c’était un choc, c’était terrible de rester en quarantaine parce que je me disais, comme mon ami est à l’hôpital, bientôt, ce sera mon tour. Mais Dieu merci, j’ai été épargné par le virus. Mais à un certain moment, je suis resté à la maison et ça a duré. J’étais en télétravail et c’est ce qui m’a permis également de pouvoir utiliser ce temps libre à travers la lecture, pour ne pas rester tout ce temps à suivre la télé ou connecté au smartphone. Voilà ce qui m’a inspiré pour revenir sur ces moments de peur, de tristesse, d’angoisse. Alors, je m’étais dit que ça serait intéressant que je puisse un jour faire ce travail. Donc, c’est ce qui m’a motivé à revenir, retranscrire, retransmettre ces moments phares de cette page noire de l’humanité, pour proposer aux lecteurs un recueil de poèmes.

Auriez-vous le temps d’écrire ce livre, s’il n’y avait pas eu le confinement ?
Oui et non. J’aurais peut-être eu l’opportunité d’écrire sur d’autres thématiques puisque tout simplement, je suis un passionné de littérature et d’écriture. Dès que l’occasion se présente, je prends mon stylo, mon carnet et notes pour écrire quelques lignes. Mais parler du coronavirus n’aurait peut-être pas été possible s’il n’y avait eu pas cette pandémie. Et s’il n’y avait pas eu ce confinement, la quarantaine qu’on a vécue à un moment ou bien le fait de rester à la maison, je pense que le temps que j’ai utilisé pour pouvoir écrire ce recueil de poèmes, je n’allais pas l’avoir. A toute chose, malheur est bon. Le coronavirus a permis à beaucoup de créateurs, d’artistes surtout, de fouetter leur inspiration, de se mettre à la création pour, à la fin, pouvoir proposer des œuvres, des productions littéraires, des documentaires.

Quelles sont les questions que vous avez abordées dans ce livre ?
Cet ouvrage de 51 poèmes vient de vous, de moi, et d’autres peut-être. Et pour la plupart, il s’agit du lexique qu’on avait tendance à utiliser pour parler de cette pandémie du Covid-19. Alors, on a parlé du confinement, des masques, de la mise en quarantaine, des cas communautaires, asymptomatiques, du couvre-feu, du télétravail. On a parlé également de la solitude, de la mélancolie, de la poésie, de l’hôpital… Bref, il s’agissait de regrouper tout ce qu’on avait l’habitude d’utiliser en termes de lexique pour communiquer sur cette pandémie. Et c’était une manière aussi de s’intéresser à tout ce qui avait été utilisé pour pousser la population à être consciente du danger qui la guettait et à prendre les précautions nécessaires. Voilà, entre autres, ce que nous avons essayé de regrouper dans cette production, tout en sachant qu’il y avait d’autres thématiques liées à l’amitié, les liens familiaux, les hommages que j’ai rendus au corps soignant, à la presse. L’hommage que j’ai rendu à ma mère, à mon défunt grand-frère, entre autres. Ces moments de solitude qui te faisaient penser souvent à des proches qui, à un moment, tu te dis que s’ils étaient là, peut-être ils pourraient t’apporter réconfort et t’accompagner dans ces périodes de doute.

Du roman à la poésie, qu’est-ce qui a été plus déterminant pour vous ?
Que ce soit la poésie, le roman ou la nouvelle, ces genres permettent à l’auteur de pouvoir s’exprimer, parler d’un fait, d’une situation donnée, comme ce fut le cas avec le coronavirus. Je pouvais bel et bien opter pour le roman, voire même un recueil de nouvelles, mais je me suis dit que peut-être, cette poésie pouvait me permettre de parler de faits dramatiques, de faits douloureux, tout en utilisant cette forme libre ou classique, soit à travers des sonnets, des alexandrins, entres autres. Et c’est vrai que la poésie est un genre littéraire assez complexe, mais avec cette forme libre, je pense que les aspects recherchés tels que la musicalité, les rimes, pour faire comprendre aux lecteurs, se trouvent dedans.

Quel regard avez-vous sur la presse audiovisuelle ?
La presse audiovisuelle, c’était même l’objet de mon premier ouvrage, un essai que j’avais intitulé : «Programme de télévisions au Sénégal : le wolof, un acquis, et le français pour s’ouvrir aux autres.» Et ça m’avait permis de faire un diagnostic de la production audiovisuelle sénégalaise, surtout la télévision, et ce rapport qui existe entre l’utilisation du français et du wolof. L’objectif était de voir comment permettre aux chaînes de télévision de pouvoir exporter leur production tout en restant avec le wolof. Et c’est ce qui me permet aujourd’hui de revenir sur le champ médiatique audiovisuel sénégalais, et qui a connu une floraison depuis les années 2000. L’idée était de démocratiser l’information et permettre à tout un chacun de comprendre ce qui se fait et se dit en termes d’information. Mais aujourd’hui, j’ose dire qu’on assiste à une forme de revers de la médaille, parce que tout simplement tout le monde peut devenir aujourd’hui journaliste. On a plus besoin d’être un «Cestien», un diplômé de l’Institut supérieur d’entrepreneurship et de gestion (Iseg) ou de l’Institut supérieur des sciences de l’information et de la communication (Issic) pour pouvoir être un journaliste.

Pensez-vous que les nouvelles cartes nationales de presse pourront aider à réguler ce secteur ?
Pas forcément, parce que ça sera juste un maillon de la chaîne. Cette carte, peut-être, ça va servir de tamis à certaines organisations qui pourront identifier les professionnels avec qui ils souhaiteraient travailler. Mais quant à assainir globalement ce secteur, je pense que seul le Code de la presse peut le faire ; cette Carte nationale de la presse sera juste un maillon de la chaîne et ne peut pas, à elle seule, réglementer ce secteur qui traverse des moments difficiles. A l’image des autres secteurs, la presse mérite des assises. Et pour cela, peut-être, il faut donner la parole aux experts, qui ont une expérience de la gestion des médias, pour réfléchir sur un canevas qu’on va forcément proposer aux décideurs pour essayer de voir comment on peut arriver aujourd’hui à règlementer ce secteur. La carte de presse est un outil très important, mais il faudra d’ores et déjà accélérer les travaux pour permettre à ce Code de la presse d’être effectif et qu’on puisse mettre en branle cette machine qui, forcément, aura un impact dans la manière de faire le journalisme au Sénégal.
Propos recueillis par Ousmane SOW