«La première maison qui ait été édifiée pour les gens, c’est celle de Bakka (La Mecque) bénie et une bonne direction pour l’univers. Là se trouvent des signes évidents, parmi lesquels l’endroit où Ibrahim s’est tenu (Maqama Ibrahim) ; et quiconque y entre est en sécurité. Et c’est un devoir envers Allah pour les gens qui ont les moyens d’aller faire le pèlerinage de la Maison. Et quiconque ne croit pas… Allah se passe largement des mondes.» Sourate Ali Imran, versets 96/97.
Voici le verset (96) cité et tronqué par Idrissa Seck. Tronqué parce que le monsieur n’est pas allé au bout de la citation en omettant volontairement (ou pas) la suite du texte dont le contenu sémantique est un prolongement et une explication sous forme de précision géographique et juridique du lieu nommé Bakka qui est sans aucun doute un homonyme de Makka. Il ne suffit même pas d’être arabophone pour savoir que les formes «B» et «M» sont interchangeables parce qu’ils sont bilabiales. C’est comme les labio-dentales «V» à la place du «F» des lecteurs de Coran mauritaniens de langue Hassanya bien connus de tous. Mais tout cela est compliqué peut-être. Vous aurez simplement remarqué que le passage qu’il cite lui-même le condamne sans appel : «Là se trouvent des signes évidents, parmi lesquels l’endroit où Ibrahim s’est tenu (Maqama Ibrahim)» et plus loin (…) Et quiconque ne croit pas… Allah se passe largement des mondes.» Il n’y a pas à chercher loin, la réplique se trouve dans le passage qu’il cite. Apparemment, Idrissa Seck ne se contente pas de l’évidence en religion. S’il préfère le doute, il n’a qu’à se débarrasser de sa paresse intellectuelle et affronter l’immense espace du doute, de la réflexion et même de la spéculation qu’autorise l’islam appelé Ijtihad et qui a donné en partie toutes les écoles juridiques connues. Point d’Ijtihad en matière de dogme, où la règle est la prescription et l’autorisation textuelle, alors que dans l’espace des pratiques communes, c’est le principe de la permission originelle qui fonctionne, la règle étant la permission et l’interdiction étant l’exception. Il n’y a aucun système, qu’il soit juridique, politique, religieux où la réflexion n’obéit pas à une tradition, des règles et des méthodes. Même en philosophie, la spéculation n’est pas vide, elle n’est pas aussi libre qu’on le dit. Elle obéit à des systèmes, traditions et écoles philosophiques. Toutes les interprétations sont normées et savantes. La philosophie est métier comme la théologie. Bref, Idrissa Seck ne sait rien de ce qu’il dit. Comment peut-on penser que lui qui ne connaît pas la langue arabe peut contredire un imam de la Mecque qui est un savant diplômé des grandes universités ? Soyons sérieux ! Il existe des milliers de mots dans sa langue maternelle, le wolof, dont il ignore totalement l’évolution sémantique. Le français, n’en parlons-pas ! Ce n’est pas du tout sa spécialité. La simple modestie et la peur de la gloriole auraient pu sauver le bonhomme. Mais à force de se gargariser de culture et de science qui n’existent que dans les formules mielleuses, on tombe très bas.
Où se trouve Maqama Ibrahim si ce n’est à la Mecque, près de la Kabba ? Où se trouvent les lieux Safaa et M’arma nommément cités dans le Coran, si ce n’est dans le lieu de pèlerinage que le sieur Idrissa Seck a remis explicitement en cause en disant avec une désinvolture inqualifiable que Bakka signifie «pleurs» et que le lieu indiqué par Dieu est ailleurs et qu’il va le révéler ? On attend la grande révélation de Idrissa Seck. Ses plates excuses qui sont feintes et teintées d’ironie et de menaces ne suffisent pas. Quand il affirme que Makka n’a pas été cité par le Coran, tout en sachant qu’il l’est à la Sourate Al Fath qui vient avant la Sourate Ali Imran dans le processus d’apprentissage du Coran, la chose est très claire. Idrissa Seck reprend mot pour mot les thèses farfelues, que personne ne prend au sérieux, de Dan Gibson qui s’est choisi pour spécialisation la discréditation de l’islam.
C’est alors que les sceptiques tapis dans l’ombre se sont engouffrés insidieusement dans le débat, insinuant intolérance, refus de débat ou autres formules déblatérées par des intellectuels qui ne prennent même pas le temps de lire le texte du Coran, ne serait-ce que pour s’informer et qui ignorent royalement l’histoire de idées en islam. L’islam, les confréries et les daaras sont pour eux des formes éculées. J’en connais qui ont étudié jusqu’au doctorat et qui n’ont jamais fait de logique, de rhétorique, de lexicologie, de philosophie du droit, de métrique et d’astronomie, enseignées dans les daaras. Il n’y a aucun oustaz qualifié et digne de ce nom qui enseigne le Fiq aujourd’hui et qui n’a pas étudié la logique (Al Mantiq), c’est indissociable. Alors, nous autres «intellectuels» prétentieux, remballons nos grands airs et continuons à chercher, à lire sérieusement !
Idrissa Seck a failli créer un clash confrérique, mais tous ceux qui ont dérapé sur ce sujet manquent de jugement et de clairvoyance. Ils ne savent pas que c’est en ce même lieu Bakka-Makka que Serigne Cheikh Mbacké Gaïndé Fatma et El Hadji Abdou Aziz Sy Dabakh ont effectué ensemble le pèlerinage en prenant le même bateau. C’est ici que El Hadji Oumar Tall, Mame Maodo Malick Sy, Mame Abdoulaye Niasse et plus tard Cheikh Tourad Aïdara Ould Abass, Serigne Fallou Mbacké, Mame Cheikh Anta Mbacké, El Hadji Mansour Sy Maodo ont fait le Hadji. C’est là à Bakka-Makka que Baye Niasse a fait ses nombreux pèlerinages. Idrissa Seck peut-il en savoir plus qu’eux ?
Indépendamment de ce sujet regrettable, ces mémorables pèlerinages seront l’objet de la prochaine chronique. InchAllah !