Une confusion totale ! C’est la conséquence de la décision du président de la République d’annuler la tenue de l’élection présidentielle. Il doit organiser l’élection 30 à 45 jours avant la fin de son mandat. Qui ne peut être prolongé par l’Assemblée nationale au regard de la Constitution. `Par Malick GAYE –

Pour la première fois depuis 1963, l’élection présidentielle ne sera pas organisée au Sénégal à date échue. Cette situation inédite a été décidée par le président de la République. Macky Sall a estimé que «notre pays est confronté depuis quelques jours à un différend entre l’Assemblée nationale et le Conseil constitutionnel, en conflit ouvert sur fond d’une supposée affaire de corruption de juges».

Fort de ce constat, il a pris un décret abrogeant celui qui avait convoqué le collège électoral. En effet, le Conseil constitutionnel est visé par une supposée affaire de corruption, la Commission d’enquête parlementaire n’a pas encore commencé ses travaux pour faire la lumière. Qu’est-ce qui explique l’urgence de reporter la Présidentielle ? En attendant d’y voir clair, on peut s’interroger sur les conséquences d’un tel acte. En effet, l’article 31 de la Constitution affirme ceci : «Le scrutin pour l’élection du président de la République a lieu quarante-cinq jours francs au plus et trente jours francs au moins avant la date de l’expiration du mandat du président de la République en fonction.»

Partant de là, le mandat de Macky Sall prendra fin le 2 avril. Peut-on respecter cette disposition de la Constitution ? Il n’est pas évident. Dans cette logique, l’Assemblée nationale a été convoquée aujourd’hui pour acter le report de la Présidentielle. Seulement, en voulant modifier cet article 31 de la Constitution, l’Hémicycle risque de créer un autre débat. En effet, l’alinéa 7 de l’article 103 de la Constitution stipule : «La forme républicaine de l’Etat, le mode d’élection, la durée et le nombre de mandats consécutifs du président de la République ne peuvent faire l’objet de révision. L’alinéa 7 du présent article ne peut être l’objet de révision.»

Par ailleurs, Macky Sall, dans son adresse à la Nation, a appelé à un dialogue avec toutes les forces vives du pays pour trouver une solution à cette crise. A l’issue de ce dialogue, si les accords nécessitent la modifion du Code électoral, la Présiden-tielle pourrait être repoussée d’au moins 6 mois. Car  le Protocole A/SP1/12/01 sur la démocratie et la bonne gouvernance de la Cedeao, ratifié par le Sénégal, interdit toute réforme de la loi électorale «dans les six (6) mois précédant les élections, sans le consentement d’une large majorité des acteurs politiques».

En d’autres termes, la tenue de la Présidentielle ne peut se faire au mois d’août prochain pour deux raisons. Organiser une élection en plein hivernage équivaudrait à prendre le risque d’exclure des pans entiers du territoire. La 2ème raison, c’est qu’il ne peut y avoir une modification de la loi électorale à moins de 6 mois de la tenue de l’élection.

Il faut aussi dire que la condition d’une tenue de la Présidentielle au mois d’août est tributaire de la question sur le mandat. Va-t-on prolonger le mandat de Macky ? Si oui, par quel mécanisme ? Toutes ces interrogations installent la confusion.
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