A Thiès, l’édition 2022 de la commémoration du départ en exil au Gabon, en 1895, du très vénéré fondateur de la confrérie musulmane des Mourides (Al Mouridiyya), Cheikh Ahmadou Bamba, est marquée par une économie au ralenti. Dans toute la Cité du Rail, durant cette période, l’on constate une rareté des produits de consommation, en particulier les denrées alimentaires de première nécessité. Non seulement l’activité commerciale est momentanément bloquée à Thiès, mais, depuis Dakar, tout est directement acheminé vers la capitale du Mouridisme qui, le temps du Magal, devient la capitale économique du Sénégal.Par Cheikh CAMARA – Le Grand Magal, une grande fête rythmée par des actions de grâce

conformément aux recommandations du Cheikh-fondateur, donc un moment de réjouissances à l’occasion de laquelle chaque famille accueille ses proches, des amis, parfois des inconnus, reste un événement excessivement vital pour surtout les Petites et moyennes entreprises qui se frottent bien les mains avec des chiffres d’affaires intéressants. «C’est le secteur du commerce qui certainement se taille la part du lion durant cet événement, au moment où le reste du pays est paralysé», note ce commerçant grossiste au marché Moussanté, Doudou Ndir. Constatant «l’impact de la célébration du Magal sur l’économie thiessoise», notre interlocuteur note que «l’évènement bloque de nombreuses ressources économiques, principalement pour les marchands, les transporteurs, les éleveurs, les transferts de fonds, les emplois….». La ménagère Fatou Diop, croisée au Marché central, évoquant les effets négatifs de l’une des fêtes musulmanes les plus importantes au Sénégal, le Magal de Touba, sur l’économie locale, de dénoncer «une hausse délibérée des prix des produits alimentaires exercée par quelques commerçants véreux restés sur place. Lesquels, sachant que la fête occasionne de multiples dépenses auxquelles les chefs de famille doivent faire face pour satisfaire les membres de la famille, veulent à tout prix mettre à profit l’évènement religieux pour augmenter leurs chiffres d’affaires».

Le transport et le commerce, les secteurs les plus touchés
Ce responsable de famille à Grand-Thiès, Mactar Cissé, lui, de considérer que «cette fête, qui engendre une augmentation des dépenses, est une vraie aubaine pour beaucoup de commerçants qui, soucieux d’augmenter leurs chiffres d’affaires, pensent devoir se rendre très tôt dans la ville sainte pour prendre d’assaut les rues de la capitale du Mouridisme». Et du coup, de constater que «presque toutes les Petites et moyennes entreprises sont restées fermées durant cette période. Dans tous les coins et recoins de la ville, les boutiques d’alimentation générale sont à 75% fermées, les restaurants, gargotes et autres «petits bons coins» comme les Maïgas ou Tanganas ont cessé de fonctionner. Les tables-restaurants qui ornaient le décor le long des rues, ont disparu des trottoirs». Et de regretter : «Rien ne marche, économiquement parlant.» Au plan économique toujours, Fallou Tine, commerçant au marché Kheulga, remarque que «l’occasion a été synonyme de fortes exportations de certaines denrées vers la Cité de Bamba, notamment les poulets de chair qui, la veille, étaient devenus un luxe à Thiès». Une ville où nombre de gens ont choisi de passer la fête en famille, l’on note une faible effervescence au niveau des marchés Moussanté, Grand-Thiès, Kheulga, Central, Thialy, etc., qui se sont très tôt vidés de leurs populations de commerçants. Du coup, la plupart des produits alimentaires, enregistrant une hausse de leur prix le temps du Magal, ont subi les effets de l’évènement. Une augmentation des prix attribuable à l’augmentation de la demande. Il explique qu’en effet, «si l’économie demeure paralysée dans la ville aux-deux-gares en cette période de Magal, c’est dû au fait que le transport et le commerce, les secteurs les plus touchés, sont détenus à presque 65% par des fidèles-talibés mourides venus, pour la plupart, du Baol».

A Thiès, avec le Magal, plane une ambiance de ville morte
Le temps du Magal, est presque déserte toute la Cité du Rail qui, en la circonstance, se vide de sa très forte communauté mouride, paralysant toutes les activités économiques. Pendant l’évènement, le commerce ne marche presque plus, la plupart des boutiques et autres cantines étant fermées. Le panier de la ménagère souffre. Le secteur du transport tourne le dos aux nombreux usagers de la route, aux voyageurs, vers d’autres horizons. «Un calvaire qui a sérieusement impacté l’économie locale», déplore le jeune Badou Ndiaye, étudiant, qui constate qu’«à Thiès, avec le départ des pèlerins mourides, rares sont les boutiques ouvertes dans les marchés et quartiers, paralysant le secteur commercial. Aussi, le secteur du transport est bloqué, les mini-gares routières établies dans les quartiers pour les taxis «Jaune-noir», les «clandos» et les «Allô-Dakar», ainsi que les lieux d’attroupement des mototaxis «Jakarta», sont toutes vides». Difficile de trouver un moyen de transport. Tous les véhicules étant en location pour Touba.
Correspondant