Le silence, qui enveloppe l’hôpital El Hadji Abdou Aziz Sy Dabakh de Tivaouane, est brusquement déchiré par des cris de douleur. Il est 20h. Un incendie d’une violence inouïe s’est déclaré au cœur du centre hospitalier et le bilan est lourd : 11 bébés ont été brûlés vifs, sur les 15 qui étaient en observation, dans le service de néonatologie. La structure sanitaire, théâtre des faits, est fig=ée dans un drame qui a plongé tout le Sénégal dans l’émoi.Par Ndèye Fatou NIANG (Correspondante) –

Ce sont des images d’apocalypse : des murs calcinés, une douzaine d’extincteurs épuisés, tout le matériel du service néonatologie brûlé, des corps complètement cramés… C’est le chaos. Sous les décombres, il y a les témoins du drame inouï survenu dans la nuit du mercredi à jeudi à l’hôpital El Hadji Abdou Aziz Sy Dabakh. Il y a un an, une tragédie similaire était survenue à l’hôpital Maguette Lô de Linguère et avait mis le Sénégal en émoi. Difficile d’identifier ou de mettre un nom sur un cadavre, tant les visages ont été défigurés sous l’effet de l’incendie qui s’est déclaré aux environs de 20h, ce mercredi. Rien n’a résisté aux ravages du feu qui a avalé tout sur son passage. La puissance des flammes était dévastatrice.
Alertés par la fumée âcre et la touffeur de l’atmosphère, quelques accompagnants de malades se sont emparés des extincteurs pour maîtriser le feu et essayer de sauver les nouveau-nés. Ibrahima, le premier à être sur les lieux du drame, qui dit n’avoir trouvé aucune infirmière sur les lieux, avoue avoir défoncé la porte du service de néonatalogie. Mais l’épaisseur et la densité de la fumée ont bloqué le sauveteur qui n’a pu exfiltrer un seul bébé. La même situation a aussi empêché, selon les autorités hospitalières, les deux infirmières en garde d’intervenir. Elles ont été étouffées par la fumée après l’explosion des bouteilles d’oxygène qui étaient dans la salle. Evacuées aux urgences, elles s’en sont sorties avec quelques points de suture. A l’intérieur de l’hôpital, à la première alerte au feu, c’est la débandade totale.
Désemparés et affolés, attirés par les cris d’hystérie, les syncopes et autres pleurs des parents, malades, accompagnants et même du personnel, les voisins se ruent sur le feu pour jouer aux secouristes, en attendant l’arrivée des sapeurs-pompiers. Bras sur la tête, étreinte par la tristesse, le regard vide, la mine serrée, la maman d’une des victimes a du mal à contenir sa rage. Son fils, baptisé il y a juste 9 jours, a péri dans l’incendie. Complètement carbonisé par les flammes. Elle regarde devant elle, mais semble ne rien voir. Le temps est lourd et dur à la fois. Tivaouane la sainte porte ses habits de deuil, ceinte par une douleur incommensurable.
Elle a pleuré toute une nuit. Et si on devait résumer ce qui s’est passé, on dirait simplement que «dans cette ville, les gens ont souffert dans leur chair». Les larmes ont perlé avec abondance et des cris de détresse se sont fait entendre tout le long de cette aube. Les coqs ont chanté et le jour a paru, mais les populations n’ont pas fermé l’œil de la nuit. Le lendemain, cernes autour des yeux rougis, portées par des silhouettes fatiguées et attristées, elles sont debout à l’hôpital Dabakh, figées dans un deuil éternel. Mais, il y a paquet de questions à régler : quelle est l’origine de l’incendie ? Où était le personnel de garde ? Les installations sont-elles aux normes ? Ces mêmes interrogations ont été posées à Linguère, il y a un an. En apparence, rien n’a changé, avec des hôpitaux devenus des mouroirs…

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