L’ancien président de l’Uefa a bénéficié de la part de la justice, d’une mansuétude et d’une célérité dont on n’a pas jugé digne Lamine Diack, maintenu dans un flou intolérable depuis bientôt trois ans.

L’ancien président de l’Union européenne de football association (Uefa), Michel Platini, a repris du poil de la bête depuis que la justice suisse a décidé, la semaine dernière, de le «laver de toute suspicion de corruption» concernant le paiement de deux millions de dollars qu’il avait reçu de Sepp Blatter, l’ancien président de la Fifa. Michel Platini veut dans la foulée, obtenir la levée de sa suspension de toutes les activités liées au football, imposée par la Fifa.
On peut féliciter l’ancien capitaine de l’Equipe de France de 1984 de cette issue heureuse pour lui, dans une affaire assez infamante. Et dans le même temps, s’indigner de ce que la célérité avec laquelle son affaire a été conduite ne se ressente pas dans un cas comme celui de l’ancien président de la Fédération internationale d’athlétisme (en anglais Iaaf).
Bloqué en France depuis bientôt 3 ans, par la justice de ce pays, depuis sa mise en examen pour des faits similaires à ceux qui ont été reprochés à Michel Platini, Lamine Diack, depuis la fin de son mandat à l’Iaaf, est clairement pris en otage par les autorités françaises. Placé sous contrôle judiciaire, on lui a retiré son passeport et interdit de sortie du territoire français. Depuis lors, on a l’impression que les choses n’ont pas bougé. L’instruction du dossier n’avance pas. Est-ce parce que son fils Massata Diack, également mis en examen, mais résidant au Sénégal, n’a pas daigné comparaître devant le juge français ? On ne saurait le dire, bien qu’on ait l’impression que l’on retient le père pour contraindre le fils à se représenter.
Pourtant, Lamine Diack, qui a été président de la Fédération internationale d’athlétisme pendant plus de dix ans, et qui avant cela, a été ministre dans son pays, et maire de la capitale Dakar, offre toutes les garanties de représentation. La justice française doit-elle le punir pour les fautes de son fils ? Massata Diack n’est-il pas responsable de ses actes ? Dans des cas similaires, impliquant des hautes personnalités françaises de rang et de dignités égaux, la justice française n’a pas eu la main aussi lourde. On a vu dernièrement, avec quelle rapidité de tortue elle s’est empressée de mettre en examen l’ancien Président Sarkozy, pour des faits beaucoup plus graves et attentatoires à la sécurité nationale française.
Et ce dernier n’a même pas eu à passer une nuit en garde à vue, contrairement à Lamine Diack, dont les gens n’ont même pas tenu compte de son âge avancé pour l’humilier en prévention. Blatter et Platini, sanctionnés par la Fifa, et poursuivis par la justice suisse, n’ont jamais passé une seule nuit en cellule. Le fils de Laurent Fabius, président du Conseil constitutionnel de France, fait souvent les titres de journaux à sensation pour des questions d’argent. On n’a jamais eu l’indécence de mêler son père à ses affaires. Mais le «Nègre» Lamine Diack, on peut le confiner à vivre dans un petit appartement en France, en attendant un jugement qui ne se dessine pas. Cela n’est pas tolérable et ne devrait plus être accepté. Il est temps que toute l’opinion sénégalaise, au-delà de ce que chacun peut avoir à penser de ce qui est reproché à Lamine Diack, se mobilise pour que lui soit réservé un traitement humain, et digne des fonctions qu’il a occupées dans son pays et à l’international. Qu’il soit jugé et condamné, ou alors qu’on lui rende sa liberté de mouvement. Ce que les Occidentaux n’acceptent pas de faire subir à leurs dirigeants, pourquoi devraient-ils le faire subir aux nôtres ?
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