Au-delà du drame humain, les accidents de circulation coûtent au moins 74 milliards F Cfa à l’Etat et aux assureurs, selon une enquête réalisée par l’Observatoire de la qualité des services financiers.

Les accidents de circulation ont aussi un coût financier, au-delà du drame humain : selon les estimations, c’est entre 1 et 2% du Pib, soit presque 74 milliards de francs qui sont dépensés en termes de réparation, d’indemnisation, d’immobilisation des véhicules. Alors que les sociétés d’assurances déboursent un peu plus de 13 milliards de francs Cfa. Ces chiffres ont été dévoilés hier à Saly lors de la validation du Rapport d’analyse de l’enquête sur la typologie des causes d’accidents de la route organisé par l’Observatoire de la qualité des services financiers (Oqsf).
Bien sûr, ces détails chiffrés ne peuvent pas marginaliser les pertes en vies humaines, mais les pertes économiques sont considérables. D’après Ndèye Coura Sèye, expert financier à l’Oqsf, «l‘Observatoire a donc décidé d’aller au fond des choses pour essayer, au lieu de s’attarder sur les conséquences, d’aller vers les causes». «Nous avons ainsi étudié les procès-verbaux d’accidents pour avoir des statistiques fiables d’abord et pour savoir quelles mesures prendre pour baisser la sinistralité. En matière de prime d’assurance, la sinistralité a une importance parce que les primes servent à régler les sinistres. Si ces derniers diminuent, les primes diminuent», déclare-t-il.
En écho à ces propos, Matar Faye, Directeur exécutif de l’Association des assureurs du Sénégal, estime que «les accidents nécessitent des traitements coûteux et entrainent une perte de productivité et de revenus pour les victimes et les membres de leurs familles». Cette situation nécessite alors une mutualisation des efforts pour inverser la courbe, qui ne cesse de monter.  «La sécurité routière est un combat que nous devons inscrire dans la durée. Les assureurs se sont engagés dans ce combat depuis plus de 30 ans. Sur un chiffre d’affaires annuel d’environ 175 milliards de francs, plus de 13 milliards sont consacrés chaque année au remboursement et à la prise en charge des victimes», rapporte M. Faye, interloqué par les chiffres de la mort. En tout cas, le Directeur exécutif de l’Association des assureurs du Sénégal espère que «cette étude permettra de comprendre la réalité du terrain pour mieux agir». Selon lui, ces sommes pouvaient être utilisées dans la construction d’écoles, le renforcement du plateau technique des hôpitaux. Hélas ! «Malheu­reusement, on constate que les accidents continuent à se produire. Et c’est un peu plus de 600 morts qui sont déplorés chaque année. C’est trop et je pense qu’on devrait réguler tout ça. Car s’il y a moins d’accidents, la prime pourrait baisser. C’est un combat que nous devons mener tous ensemble afin de faire de la route, un espace de rêve mais aussi qu’on arrive à faire des conducteurs, des usagers aux comportements responsables et citoyens», espère-t-il.
Interpellé sur le retard dans le paiement  en cas d’accident, Matar Faye précise : «Il tient principalement à deux choses : s’il n’y a pas de procès-verbal  en cas d’accident, on ne peut pas s’appuyer sur un document pour procéder à une indemnisation. L’autre aspect, c’est que beaucoup de ces usagers méconnaissent le processus d’indemnisation en cas d’accident de la circulation. Donc il faut voir si le sinistre pour lequel on a été interpellé a une garantie et en deuxième lieu, voir si on a situé les responsabilités : est-ce que l’expert a été commis dans cette affaire pour pouvoir procéder à un remboursement.»
Cette enquête est un outil, qui pourrait servir à toutes les personnes impliquées dans ce combat. Pape Cissé, expert financier à l’Oqsf et coordonnateur de cette enquête, estime que «cela  pourrait servir aux assureurs mais également à l’Etat qui ambitionne de mettre en place une agence qui sera chargée de gérer la sécurité routière». Il dit : «Cette enquête permet de mieux comprendre la réalité sur le terrain pour mieux agir. En termes de chiffres, cette enquête a révélé beaucoup de choses : chaque année plus de 500 personnes meurent sur nos routes par accidents faisant également de milliers de victimes. Les accidents de circulation sont la dixième cause la mortalité dans le monde. Il faut noter que les causes prépondérantes sont liées à divers paramètres, pour les jours c’est le jeudi et le lundi ou il y a plus d’accidents sur nos routes. Pour ce qui est des périodes, c’est le mois du Ramadan qui est le plus accentogène. Il concentre à lui seul 37% des accidents.»
Evidemment, l‘enquête a pointé la responsabilité des chauffeurs dans les accidents à cause surtout de la somnolence. Gora Khouma, Secrétaire général de l’Union des routiers du Sénégal, fait son plaidoyer : «Nous voulons que l’Etat ou les maires aménagent des aires de repos dans toutes les grandes villes pour qu’il n’y ait plus de stationnement des véhicules. Cela permet aussi aux conducteurs de pouvoir se reposer et dormir. Mais dans tout le Sénégal, il n’y a pas d’aire de repos, pas de parking où se reposer. Il faut donc quitter le point A vers le point B sans pouvoir se reposer. Puisque dans toutes les villes, les maires ont mis des arrêtés d’interdiction et la police veille au respect de ces interdictions. Les pressions mises sur les chauffeurs par les propriétaires pour plus de profit entrainent de la précipitation sur les routes mais aussi, le non-respect du Code de la route. Il y a également la vétusté des véhicules qui est une réalité.» Incontestable !