Ndjira Sarr n’en est pas à sa première grossesse. Elle a déjà connu l’enfantement, avant de divorcer de son premier mariage où elle a eu deux enfants de 3 et 7 ans. Mais cette fois-ci, après avoir contracté une nouvelle grossesse non désirée, elle a choisi de jeter son nouveau-né dans les égouts. Consé­quen­ce : la bonne dame répondait devant la Chambre criminelle du chef d’infanticide.
Des faits qu’elle a d’ailleurs avoués à la barre sans ambages. Engrossée par son amant qui a refusé d’assumer la paternité de cet enfant, Ndjira Sarr a caché à son entourage sa grossesse. Une prouesse qu’elle a réussie jusqu’à son accouchement. En fait, selon le procès-verbal d’enquête, c’est au courant du mois d’avril 2018 qu’elle a accouché dans sa chambre, vers les coups de 3 h du matin. Quand les contractions ont commencé, elle s’est retirée pour ne pas éveiller de soupçons. Et c’est sans assistance qu’elle a mis au monde son enfant en coupant elle-même le cordon ombilical à l’aide d’une lame.
Ayant déjà en tête son projet funeste, elle a mis son bébé dans un seau avant de le jeter dans la fosse septique de leur maison. Mais comme un crime n’est jamais parfait, ce pauvre enfant innocent, dont elle s’était débarrassée, est apparu dans les égouts de la maison voisine deux jours plus tard.
Cette découverte du nouveau-né de sexe masculin dans un égout a suscité l’émoi dans le quartier. Mis au parfum, le délégué du quartier Arafat a informé les policiers de Grand-Yoff qui ne se sont pas fait prier pour faire une descente sur les lieux. Ainsi, après avoir retiré l’enfant de la fosse septique, les pompiers ont déposé le corps à l’hôpital. Les résultats de l’autopsie ont fait état d’un enfant qui est né vivant.
C’est suite à une dénonciation anonyme que la police a interpellé la dame Ndjira Sarr. Mis aux arrêts, cette dernière a été placée sous mandat de dépôt pour infanticide. Soumise à un interrogatoire serré, elle est passée aux aveux.
Devant le prétoire, Ndjira Sarr a déclaré qu’elle n’avait jamais eu l’intention de tuer son enfant. «C’est une erreur, monsieur le juge», dit-elle à voix basse. A l’en croire, personne n’était au courant de sa grossesse parce qu’elle avait honte d’en informer son entourage. D’après elle, son ventre ne se développe pas trop quand elle tombe enceinte.
Et le juge de lui demander si elle n’avait pas mûri en amont ce plan pour se débarrasser de l’enfant à sa naissance. Ce qui fait qu’elle ne l’a révélé à personne. La réponse de Ndjira Sarr ne s’est pas fait attendre. «Non», a-t-elle répondu.
Elle poursuit : «Ce jour-là, j’étais seule dans la chambre. Ma tante était à un mariage. Pendant la nuit, j’ai eu de terribles maux de ventre. J’ai accouché à 3 h du matin. Le nouveau-né n’a ni bougé ni crié. J’ai coupé le cordon ombilical avec une lame. Je l’ai mis dans sceau pour le jeter dans un égout», se souvient-elle en se désolant d’avoir gardé le secret et agi de la sorte.
D’après elle, le père de son enfant répond du nom de Yancoba Dieng. Mais elle était loin de convaincre le procureur, qui a requis 5 ans de travaux forcés à l’encontre de la dame. Pour le représentant du ministère public, si l’accusée a accouché en catimini et choisi d’enrouler le nouveau-né dans un seau, de l’enfoncer dans un trou d’eaux usées, tout en faisant comme si de rien n’était, c’est parce qu’elle a mûri son acte.
«Pour ses deux premiers enfants, elle a fait des visites prénatales, mais pour celui-ci elle n’en a pas voulu. Elle n’a rien fait pour montrer sa bonne foi», souligne le parquetier pour asseoir la culpabilité de Njira Sarr.
Me Nidal Kamal, avocat de la défense, a plaidé l’acquittement au bénéfice du doute. Pour lui, «le fait de cacher sa grossesse ne signifie pas qu’elle (l’accusée) avait l’intention de tuer son enfant. On ne peut pas l’accuser parce qu’il n’y a pas eu d’autopsie dans cette affaire».
En attendant, la dame Ndjira devra s’armer de patience jusqu’au 16 juin prochain pour savoir le sort qui lui sera réservé.
Par Justin GOMIS – justin@lequotidien.sn