On s’achemine vers deux journées difficiles dans les structures de santé la semaine prochaine. Le Sames, qui dénonce l’ouverture d’une information judiciaire contre les agents de santé suite à l’incendie du Service néonatalogie de l’hôpital de Linguère et le non-respect des normes édictées dans les structures de santé, a décrété 48h de grève les 10 et 11 mai.Par Dieynaba KANE
– Le Syndicat autonome des médecins, pharmaciens et chirurgiens-dentistes du Sénégal (Sames) déplore l’ouverture de l’information judiciaire contre l’ex-directeur de l’hôpital Magatte Lô de Linguère et deux autres agents pour homicide involontaire présumé après la mort de 6 nourrissons, lors d’un incendie de l’unité de néonatalogie. Analysant cette décision, les syndicalistes y voient une façon «d’absoudre maladroitement les véritables responsables de la santé au Sénégal que sont le ministre de la Santé, responsable du secteur, et le président de la République, garant du droit à la santé consacré par la Constitution du Sénégal en son article 8». Le Sames, qui dénonce le non-respect des normes édictées dans les structures de santé, accuse le ministre de la Santé «d’acharnement sur la personne du directeur Dr Abdou Sarr au lieu de prendre lui-même ses propres responsabilités». Et les membres de cette organisation de s’interroger : «Comment peut-on expliquer après être resté sourd et muet aux demandes de matériel du directeur pendant plusieurs années, on attend les lendemains de l’accident pour doter le Service de néonatologie du matériel flambant neuf ?» Pour eux, il n’est pas question «d’accepter que les agents de santé, après des années de dévouement, soient l’agneau du sacrifice d’un système défaillant qui ne garantit ni la sécurité des agents ni celle des usagers et qui est gangréné par la politique».
Pour faire face à ce qu’il considère comme une «agression», le Sames a décidé «de décréter un premier plan d’action avec une grève totale de 48h les 10 et 11 mai 2021 sur l’ensemble du territoire avec respect du service minimum et des urgences». Le syndicat, qui va tenir «son Assemblée générale le lundi 10 mai 2021 à partir de 11h à l’hôpital Maguette Lô de Linguère», compte sur le soutien de toutes les organisations syndicales du Sénégal, notamment le Syntras, le Satsus et le Sdt3s et appelle tous ses «camarades à la mobilisation pour la défense des agents de santé et un système de santé de qualité pour toute la population».
«Le communiqué du Parquet est choquant»
Revenant sur la décision prise par le Parquet du Tgi de Louga, le Sames trouve que le communiqué «est non seulement choquant par la célérité de ses conclusions, la légèreté de l’argumentaire pris sur la base d’allégations d’agents de la Senelec qui est elle-même soupçonnée d’être à l’origine de l’incendie, mais également par la chronologie temporelle avec les déclarations du Conseil de ministres». Et le Sames d’ajouter : «Nous doutons que dans ce laps de temps le procureur ait eu recours à un expert pyrotechnique, à celui d’un architecte ou étudié les protocoles au ministère de la Santé pour statuer sur les causes de l’incendie ou le respect des normes et protocoles en matière sanitaire.» D’après les membres de cette organisation, «l’accusation de négligence constitue tout simplement de la diffamation». Par ailleurs, ils soulignent que «la table chauffante artisanale décriée par le communiqué du Parquet a sauvé des milliers d’enfants et c’est ce type de table qui est disponible dans toutes les structures de santé». De même, le Sames renseignent que «les incendies constituent des incidents récurrents de nos structures de santé dont la plupart ont été construites depuis mathusalem, sans aucune norme ou dispositif de détection de fumée». Partant de ce constat, les syndicalistes soutiennent que «les agents qui sont des travailleurs dans ces structures ne peuvent en aucune manière être tenus pour responsables de ces incendies d’édifices publics, construits et équipés par l’Etat».
Dans le but de tirer cette affaire au clair, «les syndicats de la santé demandent une enquête impartiale et indépendante, avec des experts compétents en pyrotechnique et en sécurité incendie». Dans la même veine, le Sames «demande à l’Ordre des architectes du Sénégal d’apporter son expertise dans ce dossier».
Pour éviter de tomber dans les mêmes travers, le Sames «demande à ses membres, dans toutes les structures du Sénégal, de veiller au respect strict des normes, notamment la disponibilité des ressources humaines et matérielles en quantité et en qualité avant d’exercer la médecine et ne mettre en œuvre aucune solution de ‘’débrouillage’’, qui les exposerait à des poursuites et à la vindicte judiciaire».
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