Les travaux de la 4ème édition du Forum international de Dakar sur la paix et la sécurité se sont poursuivis hier, au Centre international de conférence Abdou Diouf de Diamniadio. Macky Sall avait insisté à l’ouverture sur la riposte militaire pour lutter contre ce fléau des temps modernes. Mais à en croire les spécialistes, cette option fait face à de gros problèmes qui ont pour noms : insuffisance des moyens de défense et la formation des Forces de défense et de sécurité. Hier, au cours d’un panel sur le thème : «Terrorisme et extrémisme violent», le général à la retraite, Mansour Seck, a exposé les difficultés auxquelles ses frères d’armes du continent sont confrontés face à l’ennemi invisible et souvent hyper équipé. «Nous savons que les armées africaines ont des faiblesses évidentes en particulier la formation des hommes, l’équipement. Parce que l’Afrique n’a même pas d’usine de fabrication d’armes sauf peut-être l’Afrique du Sud. Et ensuite le système de renseignement. Nous n’avons pas de satellite. Nous n’avons pas de drone», dit-il.
Selon lui, pourtant ces éléments constituent aujourd’hui des moyens importants dans la connaissance de l’ennemi. Et face aux partenaires comme l’Union européenne, il a posé la question suivante : «Est ce que dans tous ces domaines ou justement ces gens nous accompagnent, il y a des réflexions, il y a des chances, il y a des promesses ?» Avant de demander aussi si les organisations, qui aident les Etats africains, sont prêtes à ouvrir les académies militaires aux cadres des armées du continent. Au-delà de cet aspect militaire, le ministre guinéen de la Défense nationale est lui revenu sur les causes du terrorisme et de l’extrémisme. D’après Mohamed Diane, «le terrorisme et l’extrémisme violent n’épargne aucun Etat qu’il soit riche ou pauvre. C’est en cela que nous sommes convaincus que la première bataille à mener consiste à s’attaquer aux racines du mal, c’est-à-dire les inégalités, la pauvreté et le sous-emploi de la jeunesse». On sait que les autorités sénégalaises, dans leur engagement et leur détermination à lutter contre le phénomène, ont adopté un nouveau Code pénal et code de procédure pénale, qui durcit les peines en matière de terrorisme. Alors selon le ministre, la Guinée est aujourd’hui sur les pas de son voisin avec l’élaboration d’un projet de loi sur la prévention et la répression du terrorisme. Et il est soumis à l’Assemblée nationale pour adoption. Toujours dans le domaine de la prévention, le pays de Alpha Condé, dit-il, a former 500 imams et prédicateurs religieux. Et la jeunesse, qui est aujourd’hui un terreau fertile des recruteurs des réseaux djiadistes, suit aussi une formation pour barrer la route à l’endoctrinement, dit Mohamed Diane. Quant aux différents intervenants, ils ont estimé que l’accent doit être mis également sur la lutte contre la corruption, le trafic illicite. Certains d’entre eux ont appelé les Etats à veiller sur les enseignements coraniques. «J’ai bien peur que tous les remèdes que nous sommes en train de lui apporter risquent d’être des calmants ou risquent d’être des solutions qui sont dictées par le rapport de forces. Mais le problème en lui-même risque de demeurer. Et donc je crois qu’il est extrêmement important de se pencher sur les vraies causes du terrorisme», estime Mahamat Saleh Annadif, représentant du Secrétaire général des Nations-Unies au Mali et chef de la Minusma (Mission multidimensionnelle intégrée des Nations-Unies pour la stabilisation au Mali). Et lors de la conférence sur le thème «continuum défense et sécurité : pour une approche intégrée», le général français, Jean-Paul Palo­meros, a donné de l’importance à la coopération militaire. Au cours de sa prise de parole, le général Cheikh Guèye, chef d’Etat-major général des armées, a partagé avec les participants au forum, la nature des contraintes que rencontrent les Forces armées dans la sécurité intérieure. Il liste : «Premièrement, il s’agit des difficultés souvent rejetées de l’utilisation de méthodes et d’outils de travail spécifique à chaque acteur (…) Au plan opérationnel, le défaut de culture, de doctrine et de procédure commune peut constituer une limitation importante même si le cadre juridique de l’intervention des forces est souvent bien défini». Et d’ajouter : «Un deuxième aspect qu’il ne convient pas de négliger, c’est l’impact des engagements intérieurs sur les capacités des forces. Un rythme d’engagement soutenu et durable sur le territoire peut déséquilibrer le cycle d’activité et affecter négativement la préparation opérationnelle des unités. La troisième contrainte est inhérente à la conduite d’opération sur le territoire national. C’est-à-dire au cœur de la population(…) enfin, c’est le déficit en matière de renseignement.»

Stratégie opérationnelle
Le patron des armées sénégalaises ne s’est pas seulement limité à parler des difficultés de ses hommes. Il a par la même occasion soumis quelques pistes de solution pour une meilleure prise en compte de ces questions soulevées : entre autres, il a cité au niveau du plan opérationnel, le développement des doctrines et des procédures communes visant à favoriser une meilleure connaissance des capacités, des limites et des cadres d’emploi de chacune des forces. Mais aussi, selon lui, un accent particulier doit être porté à la communication de crise et à la gestion des informations sensibles et d’équiper convenablement les différents attelés pour leur permettre d’intervenir en amont pour contrer les menaces et en aval pour limiter leurs conséquences.