Invités à se produire à Paris dans le cadre des Jeux Paralympiques 2024, et en particulier lors de la cérémonie de clôture, les Maliens Amadou et Mariam comptent parmi les artistes africains les plus actifs et les plus ouverts sur la scène internationale. Actualisé par deux nouvelles chansons, le best-of du duo La Vie est belle en est le reflet.

Sur scène, ce sont des paroles que Mariam prononce avec une tendresse aussi palpable que touchante, en caressant affectueusement l’épaule et le dos de Amadou, qu’elle sait juste à sa gauche : «Avec toi, chéri, la vie est belle», confie-t-elle au milieu de Sabali, l’un des titres majeurs de leur répertoire, à celui qui est son époux depuis 44 ans, également non voyant. Positif, le message résume bien à la fois l’intention du couple malien et le résultat, ce que dégage sa musique. Entre recyclage et rappel, du moins dans les textes, l’inédit La Vie est belle, inclus dans le best-of du même nom commercialisé ces jours-ci, enfonce un peu plus le clou. Le décor électro-pop souligne aussi à quel point la matière brute créée par les voix et les mélodies de Amadou et Mariam, imprégnées par leur culture, possède des qualités de malléabilité qui ont contribué à leur donner une dimension internationale, à travers des collaborations avec des artistes d’horizons très divers.

Le goût des autres
Si la chanson-titre a été produite par le Dj londonien The Busy Twist, auteur remarqué de remixes de musiques angolaises ou encore des Mamans du Congo, la compilation de dix-huit titres revient sur certaines des associations qui racontent en filigrane la carrière du duo depuis Dimanche à Bamako, qui fête ses 20 ans -la compilation Les Années maliennes, parue en 2005, s’était penchée sur la première partie de sa carrière, depuis la fin des années 80. Le rôle déterminant de Manu Chao, d’abord, quand l’ex-Mano Negra décide de produire l’album qui décrochera un Disque de platine (300 000 exemplaires vendus) en France et y sera récompensé aux Victoires de la musique en 2005. Senegal Fast Food porte clairement les traces de son implication, y compris derrière le micro et, deux décennies plus tard, son nom figure également parmi les compositeurs de Mogolu, une des nouveautés du best-of. Si les liens de Matthieu «-M-» Ché­did avec le Mali et ses musiciens ont été exposés au grand jour en rencontrant un succès spectaculaire avec l’album La­mo­mali en 2016, tout a commencé en réalité dix ans plus tôt pour le Français : à l’occasion du festival Les Paris Bamako, il enregistre un single avec Amadou et Mariam qui l’invitent dans la foulée sur leur album Welcome To Mali.

Portée universelle
Autre pilier du réseau que se sont constitué Amadou & Mariam, le Britannique Damon Albarn, rencontré au Mali peu de temps après la création de son organisation Africa Express. L’ancien chanteur de Blur, lui aussi, leur est resté fidèle, comme en témoigne sa participation à leur récent concert à Londres en juillet dernier, dans le cadre d’une tournée qui faisait escale dans une dizaine de pays, aux dimensions de leur renommée. En particulier en Amérique du Nord, où ils se produisent régulièrement. N’avaient-ils pas été conviés à jouer à Washington en 2008 pour la cérémonie d’investiture du Président américain Barack Obama ?
La compilation La Vie est belle se fait l’écho de leur aura aux Etats-Unis : chacun à sa façon, les rappeurs Akon, K’Naan ou encore le chanteur Tunde Adebimpe du groupe Tv on The Radio, aux origines respectivement sénégalaises, somaliennes et nigérianes, ont investi la musique du couple malien. Son caractère intergénérationnel s’est à nouveau illustré en 2022, lorsqu’une de leurs anciennes chansons, Se Te Djon Ye, datant de 1990, est tombée entre les mains de la Dj canadienne Blond:ish et de son confère haïtien Francis Mercier. Ils l’ont revisitée pour en tirer Sete, également sélectionnée pour le best-of, dans un registre afro house qui a fait fureur. Au point de devenir, et de très loin, le titre le plus streamé de la discographie de Amadou et Mariam, ravis que leurs œuvres puissent avoir cette portée universelle dont ils rêvaient, en s’affranchissant des genres comme des territoires.
Rfi Musique