Le maire de Kaolack et self-made-man, Serigne Mboup, a parlé au journal Le Quotidien quelques jours après la nomination du nouveau gouvernement. Des problèmes techniques ont empêché la rapide publication de cet entretien dont les propos restent toutefois toujours d’actualité. Dans son style franc et direct, le fondateur du Comptoir commercial Bara Mboup n’a évité aucune question, imposant même au journal, une sévère relecture. Sur la lutte contre la vie chère, son entrée en politique, ses ambitions pour Kaolack et pour son pays, le président de l’Unccias n’y va pas avec le dos de la cuillère.Propos recueillis par Mohamed GUEYE –A deux reprises, il y a eu des manifestations publiques regroupant les acteurs de l’économie, auxquelles vous avez brillé par votre absence. La première a été un point de presse de tous les acteurs du secteur privé dont vous avez été l’absent le plus remarquable. La seconde fois a été la rencontre convoquée par le président de la République autour de la concertation sur la vie chère. Tout le monde était présent, sauf le président Serigne Mboup. Qu’est-ce qui explique cela ?
Permettez-moi avant toute chose, de présenter mes condoléances aux habitants de Kaolack, qui viennent d’être frappés par une tragédie avec la mort de 4 personnes suite à l’effondrement d’un bâtiment (c’était juste la veille de cet entretien, en début du mois. Ndlr). Cela s’est d’ailleurs passé dans mon quartier, et touche des personnes que je connaissais bien. Je n’étais pas présent, mais j’en ai parlé avec le Préfet, et d’ailleurs, nous allons entamer une inspection de certains bâtiments pour voir ceux qui sont vétustes et demandent réhabilitation ou démolition.
En ce qui concerne votre première question, je pourrais dire que je suis à la base de ce point de presse du patronat. C’est moi, en tant que président de l’Union nationale des chambres de commerce du Sénégal, qui ai pris l’initiative d’aller rencontrer Baïdy Agne (président du Cnp. Ndlr), pour lui demander de tenir une rencontre du patronat du secteur privé. On peut avoir des divergences entre nous, mais n’empêche, devant les intérêts du pays, tout le monde se retrouve et échange. Baïdy Agne me dit que les gens avaient pensé à faire une déclaration du patronat, à laquelle serait associée la Chambre de commerce de Dakar. Je leur ai fait comprendre que je ne pouvais pas, en tant que président de l’Unccias, signer une déclaration à côté de la signature de la Chambre de Dakar, qui est une entité de l’Union. Parce que dans ce cas, on devrait autoriser tous les présidents de toutes les chambres de commerce du Sénégal de signer, ce qui ne serait pas possible.
Mais à mon niveau, je ne pensais même pas à une déclaration. Ce qui m’importait, c’est que nous, le patronat, nous nous concertions entre nous, avant de proposer quelque chose aux autorités. J’avais même décidé de ne plus en parler parce que la chose la plus importante, c’est que les gens doivent accepter les changements et les évolutions. On ne peut pas diriger des associations sans accepter des élections. Si les gens veulent se représenter pour un nouveau mandat, ils peuvent le faire, mais ils doivent être transparents et accepter d’aller aux élections.
Pour le second point, je dois dire que j’étais absent, j’étais aux Etats-Unis. Mais, surtout, nous n’avons pas été convoqués. La Chambre de commerce n’a pas reçu d’invitation. Même la Chambre de commerce de Dakar qui, souvent, était associée, n’a pas reçu d’invitation. On n’a vu que le patronat, ce que j’ai trouvé assez étrange. Car quand il faut discuter de la règlementation des prix, on ne peut pas privilégier le patronat, qui n’est là que pour ses intérêts. Pourtant, les textes sont clairs sur les prérogatives de la Chambre de commerce, qui sont, entre autres, de traiter des conditions de commercialisation.
D’accord, n’empêche que vous avez une opinion sur les 15 mesures qui sont sorties de cette rencontre au Palais ?
Sur ce point, nous n’avons aucun problème, le Président a bien synthétisé. Mais pour la suite, il faudrait qu’il travaille aussi à unir le secteur privé. On a vu, et il l’a dit lui-même, qu’il a eu des problèmes pour donner la parole aux nombreux acteurs qui étaient présents. Et il a également souhaité que l’on produise ce que nous consommons, et que l’on consomme ce que nous produisons. Cela, même à l’époque du Président Wade, on le disait, et jusqu’à présent, cela ne se matérialise pas. L’autre élément important que les gens oublient, c’est la logistique, qui peut fortement influer sur le coût de la marchandise. La logistique peut coûter jusqu’à 40% de la valeur du produit. Or, le Sénégal possède le Conseil sénégalais des chargeurs, Cosec, qui peut jouer un grand rôle à ce niveau pour régler les problèmes d’engorgement du port. Il est même payé pour cela. Chaque importateur paie au Cosec 0,20% de la valeur des marchandises déclarées. Ce montant peut atteindre 20 à 40 milliards selon les années. Je pense qu’il aurait pu servir à financer les conditions de stockage de certains produits ou aider à subventionner le transport. Mais s’il ne le fait pas, c’est du fait du patronat qui est dans le Conseil d’administration, à travers des organisations comme le Cnp, la Cnes, l’Unacois ou le Ges, qui y ont chacune, deux représentants qui, en réalité, ne savent rien du chargement et du déchargement et des enjeux. Nous avons toujours dénoncé cet état des choses. Nous l’avons fortement dénoncé avant le Covid, et nous comptons bien reprendre la dénonciation. Peut-être que les autorités ne sont pas au courant de la situation, mais il faut que tout le monde sache que cela n’est pas normal. Si on ne règle pas la situation au Cosec, nous allons vers la catastrophe. Je ne reproche rien au Directeur général, qui fait son travail de manière admirable. Il aurait même pu faire plus, n’eût été le Conseil d’administration dont 8 membres sur les 11 viennent du secteur privé, et qui ne font rien de bon. On a là des gens du secteur privé qui se sucrent avec l’argent public, sur le dos de l’Etat, et cela sans aucun contrôle. C’est la même situation que l’on retrouve à l’Ipres, à la Caisse de sécurité sociale, et autres. Ce sont des fonds qui n’ont pas été votés par l’Assemblée nationale, sur lesquels il n’y a aucune visibilité. Même les fonds à la disposition du chef de l’Etat, les députés ont un droit de regard dessus. Mais les fonds utilisés dans certaines institutions publiques, personne n’a aucun droit de regard dessus. Je ne reproche rien à mon ami Racine Sy, mais les fonds de l’Ipres doivent être gérés dans la transparence. Je ne puis comprendre que le secteur privé puisse avoir des problèmes avec la transparence, alors que ce sont eux qui devaient en être les porte-étendards.
La transparence que vous prônez devrait aussi commencer au niveau de la Chambre de commerce dont vous faites partie. Et à ce niveau, il y a d’abord cette forte mésentente qui bloque les changements. Comment dépasser cette situation ?
C’est normal que les acteurs de la Chambre de commerce ne s’entendent pas. Mais, c’est à l’Etat de tout faire pour régler la situation. Il doit faire en sorte qu’il y ait élection. Si je ne me préoccupais que de ma situation, j’aurais pu garder le silence et rester dans mon coin. Car je peux dire que j’ai atteint le sommet. Je suis président de la Chambre de commerce de Kaolack et président de l’Union nationale des chambres de commerce. Je pourrais me contenter de gérer mes mandats de manière indéfinie. Mais, cela n’est pas faire preuve de dignité. Il est bon de remettre régulièrement son mandat en jeu. Même si l’on a la possibilité de rester indéfiniment, c’est bien de savoir si on a toujours la confiance des électeurs. Et c’est le rôle de l’Etat de veiller à ce que les choses se passent de cette manière. Car les textes sont très clairs. Je rappelle que lorsque l’on a voulu procéder aux élections en 2014, certains ont convaincu le Président de changer le décret de 2003, en y introduisant de nouveaux éléments. On est allés le dénoncer à la Cour suprême, qui a cassé le décret. C’est dire que les gens ont induit le Président en erreur, et c’est un scandale. Comme on a annulé le décret, nous devions aller aux élections en 2016, et ils ont sorti comme artifice qu’ils devaient faire une réforme pour créer des chambres d’agriculture, distinctes de la Chambre de commerce. Alors que nous sommes à une période d’unification. A l’origine, les chambres de commerce englobaient le commerce, l’agriculture et le reste. Si vous regardez sur le fronton de la Chambre de commerce de Dakar, vous ne verrez écrit que «Chambre de commerce». C’est ce que les Français nous ont laissé. Parce qu’il a été considéré que le commerce englobe aussi bien l’industrie que l’agriculture, ou les autres métiers. Quand on parle de production, cela devient du domaine industriel. Mais enfin, cette prétendue réforme n’avait pour but que de leur permettre de prolonger leur mandat, ce qui n’est pas normal. C’était ma responsabilité morale de dénoncer cela. Il y a des jeunes qui montent, et qui ont envie d’accéder à des responsabilités. Moi, à 55 ans, je commence à prendre de l’âge et je dois songer à laisser la place à d’autres plus jeunes. Ce n’est pas bien que l’on ne voie que les mêmes personnes à la tête de différentes organisations. Et je rends hommage à l’ancien Premier ministre, Mahammed Boun Abdallah Dionne, car il a empêché cette forfaiture de continuer, contrairement aux deux ministres du Commerce qui se sont succédé, à savoir Alioune Sarr et Assome Diatta.
Et que pensez-vous de celui qui vient d’être nommé ?
Je pense que c’est une personne bien, qui comprend les enjeux. Nous avons eu l’occasion d’échanger et il a compris mon point de vue. J’ai aussi confiance au nouveau ministre des Finances, Moustapha Ba. Il m’a un jour dit que c’est aux Etats-Unis, lors d’une rencontre organisée par la Banque mondiale, qu’il a compris l’importance de la Chambre de commerce. Il dit qu’à cette rencontre, ce sont des représentants de la Chambre de commerce américaine qui siégeaient au nom de tout le secteur privé. Et il a pu visiter la Chambre de commerce de Kaolack, et m’a paru une personne très engagée et très à l’écoute. Donc, je pense qu’avec l’appui du chef de l’Etat, ils pourront prendre des bonnes décisions. Car la Chambre de commerce est une institution publique, qui appartient à tous. C’est vrai que qui ne s’y retrouve pas, est libre de ne pas adhérer. Mais ceux qui y sont doivent respecter les règles.
Moi, je ne peux pas imposer à l’Unacois, au Cnp ou à la Cnes, d’organiser des élections, car ce sont des privés.
Vous avez comme autre casquette, celle de maire de la Ville de Kaolack. Depuis votre installation, quel bilan pouvez-vous en tirer ?
Avant cela, je dois vous expliquer ce qui m’a poussé à briguer la mairie de Kaolack. J’étais à la tête de la Chambre de commerce de Kaolack. A l’époque, il y avait le regretté Madieyna Diouf, à la mémoire duquel je rends ici hommage, et avec qui nous avons travaillé en bonne intelligence. Mais quand il y a eu changement à la tête de la mairie, on s’est rendu compte, avec mes équipes, qu’il y avait une sorte d’incompréhension. Tous nos projets étaient bloqués ou empêchés de se développer. Au point que nous nous sommes dit qu’il fallait peut-être que l’on prenne la mairie pour faire bouger les choses. On a mis en place une structure apolitique, And nawlé, qui visait à prendre la mairie, et ainsi pouvoir agir sans pression, ni esprit partisan, pour le bien de la ville et de ses habitants.
Et depuis que nous avons pris les choses en main, nous nous sommes attaqués à la question de la propreté de la ville et à l’amélioration du cadre de vie. Et je pense que qui passe aujourd’hui à Kaolack se rendra compte qu’il y a eu une grande amélioration de ce côté. Et on doit rendre pour cela hommage à l’Ucg. Comme tous les services décentralisés de l’Etat, qui travaille en bonne intelligence avec la mairie. Nous en avons fini avec les dépôts sauvages d’ordures, et sommes en train de finaliser un protocole, qui inclut aussi les petites communes alentour, pour avoir un centre commun de traitement des ordures, et les choses sont en bonne voie. Nous travaillons également avec Promovilles, qui fait de bonnes choses dans la commune.
Il y a également le curage des canaux des eaux usées. L’une des causes des inondations dans la ville était le défaut de curage. Maintenant que cela se fait régulièrement, on peut constater que cette année, on n’entend pas beaucoup de récriminations sur les inondations.
A côté de cela, il y a la question de développement économique pour appuyer des jeunes et des femmes. Cela demande des fonds énormes, et nécessite des études que nous pourrons présenter au gouvernement, qui pourrait les présenter aux partenaires financiers, qui pourront venir nous financer pour améliorer le cadre de Kaolack. Et surtout revitaliser le Port de Kaolack, pour tirer l’économie. Car l’économie n’a pas besoin d’aide, elle a besoin que l’on mette en place des conditions pour que nous puissions entreprendre par nos propres efforts.
Vous semblez déjà très occupé avec la mairie de Kaolack. Pourquoi alors avoir cherché à briguer un poste de député ?
Moi, au départ, je ne voulais pas y aller. Mais un moment, nous avions pensé que cela pouvait encore plus nous faciliter les choses dans notre gestion de la ville. Mais après réflexion, on s’est rendu compte que cela n’était pas utile. Il faut également dire que sans doute, nous n’avions pas préparé cette campagne, parce qu’elle était notre première et nous nous y sommes pris très tard. Si on s’y était mieux préparés, et plus tôt, sans doute que l’issue aurait peut-être été différente.
L’un de vos différends avec l’équipe municipale sortante a été votre gestion du lieu dit Cœur de Ville. Qu’en est-il exactement ?
C’était juste beaucoup de bruit pour rien. Tout le monde sait que ce projet nous a été attribué par un décret présidentiel et nous le gérons selon les termes du contrat approuvé par la Dcmp. Rien d’obscur à cela. Il n’y a aucun problème à ce niveau. En vérité, entre Mariama Sarr et moi, il n’y a jamais eu de problèmes ; c’est son entourage qui voulait la monter contre moi, c’est tout. Ces affairistes, qui ont voulu me prendre le «Cœur de Ville», en vain, ont tenté de me déloger de la Chambre de commerce, sans succès ; et ils sont allés raconter des choses contre moi au Président. Ce sont eux qui ont fait perdre le Président à Kaolack. Tout le monde les connaît, notamment Rahma…
Quelles sont vos relations avec le Président et son parti ?
Je n’appartiens à aucun parti, j’ai toujours eu de bons rapports avec le Président Macky Sall, comme j’en avais avec le Président Wade dont le parti m’avait d’ailleurs soutenu lorsque j’accédais à la Chambre de commerce. Mais je ne fais pas de la politique partisane, je ne soutiens aucun camp. Je crois à une manière de faire, et je veux travailler pour mon pays et améliorer les choses. Certains contestent en prétendant que la mairie est un poste politique. Non, la politique demande d’avoir une opinion à laquelle on veut faire adhérer les gens. On peut leur présenter un programme, mais pour que les gens renouvellent votre mandat, ils le feront à partir des résultats. Moi je suis convaincu qu’après mes 5 ans à la tête de cette mairie, si je n’ai pas de résultats à présenter, je ne vais pas briguer un autre mandat. Personne ne va m’embarquer dans la voie de la politique politicienne.
Par exemple, il y a les étudiants ressortissants de Kaolack, qui sont venus me voir, pleins d’arrogance, pour demander que la mairie règle leurs arriérés de loyer. En ajoutant qu’ils donnaient un ultimatum à la mairie pour régler leur problème. Je leur ai dit, qu’en plus de faire montre d’arrogance, ils ont fait preuve d’ignorance. Parce que leur loyer ne relève pas d’une compétence de la mairie. Et même si c’était le cas, je pense qu’il y a d’autres priorités. Eux pleurent leur loyer, mais les jeunes élèves du primaire, qui n’ont pas de toilettes, pas de table-bancs en bon état dont certains sont dans des abris provisoires, on ne doit pas s’en occuper ? Ces enfants n’ont pas de bourses, contrairement à ces étudiants, mais ils ne pleurent pas. Sans doute qu’ils n’ont pas le choix ! Ils disent que je dois appuyer leur amicale, mais j’ai des centaines d’amicales à Kaolack ! Je leur ai dit de prendre leur mal en patience et d’attendre l’année prochaine, si nous pouvons dégager un budget pour cela. Et je le leur donnerai sur des bases claires et transparentes, parce que ce n’est pas mon argent, mais celui des Kaolackois. Pour le moment, moi, je me bats pour que les enfants à Kaolack étudient dans des écoles décentes, avec des cours fleuries, parce que leur cadre d’études, c’est quelque chose qui va les marquer à vie. L’éducation sénégalaise ne devrait pas être dans des abris provisoires. On n’en fait pas pour des étudiants, pourquoi le faire pour des enfants ? Parce qu’ils ne protestent pas ? Que les étudiants me comprennent et me laissent le temps. Et ce que je leur ai dit, je le dis à tous ceux qui seraient tentés de me mettre la pression. Que ce soit des étudiants, des commerçants ou autres.
Le fait que vous vous soyez engagé dans une activité politique -on peut considérer que la gestion de la mairie est une activité politique-, ne nuit-il pas à vos activités économiques ?
Non, pas du tout. Cela aurait pu être le cas si j’avais été le Directeur général de Ccbm, mais ce n’est pas le cas. La société a son Dg, appuyé par ses adjoints. Moi je me contente de l’orientation et du contrôle. D’ailleurs, on peut dire que le travail du président de la République est plus prenant, lui qui nomme à toutes les fonctions civiles et militaires et surveille tout le fonctionnement du pays. D’ailleurs, mon père disait toujours qu’il est plus facile de gérer mille entreprises bien organisées qu’une seule société mal organisée.
Si on vous disait que c’est grâce aux privés sénégalais que ce pays a pu éviter d’autres catastrophes du type Le Joola, il faut me croire. C’est vrai que nous avons toujours des drames dans ce pays, toutes sortes de catastrophes. Mais depuis la tragédie du Joola, grâce au courage du Président Wade, des Sénégalais ont repris la gestion de la navette maritime vers Ziguinchor, avec Cosama, et on n’a jamais entendu une seule fois un seul problème. Et ce sont des Sénégalais bon teint qui gèrent cela !
Quel projet vous tient le plus à cœur, que vous aimeriez voir vraiment réaliser ?
Dans le cadre de mes entreprises, j’aimerais être en mesure de produire des véhicules Made in Sénégal. Et également, remettre en place une industrie textile nationale. Car le Sénégal consomme annuellement 400 milliards de francs en importation de tissus. Et pour Kaolack, ce que j’ai promis aux Kaolackois, c’est de leur laisser une ville propre, avec un cadre où il fait bon vivre. Et enfin, que la Chambre de commerce retrouve sa légitimité et son dynamisme. Et pour cela, nous avons aussi besoin de l’appui de l’Etat. Car si la Chambre de commerce se développe, elle pourrait réaliser plus de choses que ne le peut, par exemple, le Conseil économique, social et environnemental. Je ne dis pas que cette institution n’est pas utile, j’en suis d’ailleurs membre. Mais, je sais que la Chambre de commerce pourrait rapporter plus à l’Etat que le Cese. L’Etat devrait tout faire pour que la chambre organise ses élections, et qu’il contrôle sa gestion. La Cour des comptes n’a pas l’aptitude de contrôler le Cnp, la Cnes ou l’Unacois. Mais elle peut contrôler la Chambre de commerce, parce qu’elle gère des fonds publics.
C’est un combat que je veux mener, et je souhaite que personne ne le prenne comme un combat personnel. Et je réitère ici ce que j’avais déclaré à Baïdy Agne. Je luis avait dit : «Tu as une responsabilité morale de regrouper le patronat.» Et pour lui rendre hommage, il faut reconnaître que Mansour Cama s’est battu pour l’unité du patronat. Il n’hésitait pas à se confronter à l’Etat et à lui dire la vérité. Aujourd’hui, la majorité de ceux qui voient le chef de l’Etat ne lui disent pas la vérité, dans l’espoir de gagner des marchés. Alors que ce sont des gens qui ne représentent souvent que leur propre personne.
Que pensez-vous de l’idée d’amnistier certaines personnalités politiques ?
Je pense que c’est le temps de la réconciliation nationale. L’Etat devrait appeler tous les opposants et parler à tous. Que l’on fasse table rase du passé, comme Mandela l’avait fait en son temps. Je crois que l’on gagnerait à mettre en place un mécanisme qui rendrait difficile de détourner les fonds publics. Car après, c’est difficile de demander aux gens de rendre compte. Depuis Senghor, je n’ai jamais vu des personnes à qui on a demandé des comptes et qui ont pu rembourser le Trésor. Rendre difficiles les détournements, c’est ce que je proposerais moi. Et pour le moment, dans un esprit de réconciliation, que l’on fasse table rase du passé pour repartir sur de nouvelles bases.
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