Les appels à une enquête transparente se sont multipliés hier mercredi 11 mai, après la mort de la journaliste américano-palestinienne, Shireen Abu Akleh. A l’Onu, les pays arabes ont réclamé une «enquête internationale indépendante» et parlé d’un «assassinat». L’ambassadeur palestinien, Riyad Mansour, a été touché par l’indignation exprimée par ses homologues depuis l’annonce de la mort de Shireen Abu Akleh ; il aimerait toutefois qu’elle soit transformée en actions concrètes. Avec une déclaration du Conseil de sécurité et, avant tout, la tenue d’une enquête internationale indépendante. «Nous la voulons internationale, car nous rejetons le fait qu’Israël puisse mener une enquête crédible comme elle l’affirme… Ce sont les criminels. Et les criminels ne peuvent enquêter sur eux-mêmes. Et nous la voulons internationale pour que nous puissions élucider ce crime», a-t-il déclaré. Pour le représentant de la Ligue des pays arabes, c’est une étape de plus dans l’escalade menée par Israël depuis le Ramadan -rendue possible par le coup d’arrêt au processus de paix. «Tant qu’il n’y a pas d’horizon politique pour le processus de paix en vue, tant que les grandes puissances ne portent pas assez leur attention sur la situation au Moyen-Orient et se concentrent uniquement sur l’Ukraine, alors cette situation misérable, cette misérable confrontation entre les parties perdurera», a assuré Maged Abdelaziz. Les pays arables ont réclamé à ce que le Quartet se réactive sur le dossier.
Les obsèques de la journaliste se tiendront demain, vendredi 13 mai, à Jérusalem-Est. Des dizaines de milliers de personnes y sont attendues et un hommage national lui a été rendu ce jeudi à Ramallah, à la Mou­qata’a, le Palais présidentiel. Hommage parce que Shireen Abu Akleh était une icône pa­lestinienne, une icône du journalisme, extrêmement con­nue des Palestiniens, mais aus­si dans tout le monde arabe…

L’hommage à la journaliste
Il y avait du monde ce matin à la Mouqata’a, le Palais présidentiel palestinien, pour rendre hommage à Shireen Abu Akleh. D’un côté, des officiels palestiniens, le président de l’Autorité palestinienne, ainsi que ses ministres, des gouverneurs et diplomates ; de l’autre, des proches, collègues, membres de sa famille et tous les Palestiniens qui le souhaitaient. De nombreux journalistes ont également fait le déplacement pour couvrir l’événement. Mahmoud Abbas, le Président palestinien, prend la parole. Il précise dans son discours qu’Israël est entièrement responsable de la mort de Shireen Abu Akleh. Il ne croit pas en une enquête conjointe avec les Israéliens et précise qu’il ne leur fait pas confiance. «Nous allons di­rectement aller devant la Cour pénale internationale pour traquer les criminels», insiste-t-il. Après avoir dit que la journaliste d’Al Jazeera avait «pro­bablement» succombé, mercredi, à un tir de combattants palestiniens, Israël affirme ne pas écarter que la balle ait pu être tirée par ses soldats, à Jénine, en Cisjordanie, territoire palestinien occupé par l’Ar­mée israélienne depuis 1967.

La voix des sans voix
Elle rapportait inlassablement la moindre information, de Jérusalem à Gaza, en passant par la Cisjordanie occupée, et se rendait souvent à Jénine depuis les deux derniers mois. «Elle n’a jamais reculé, n’avait pas peur. C’est elle qui donnait une voix aux sans voix, qui allait voir les familles des martyrs, des blessés, des prisonniers…, qui recueillait les preuves, documentait les crimes», nous a confié hier un journaliste palestinien, présentateur pour Palestine Tv.  C’est aussi toute une génération de Pa­lestiniens -tous les moins de 30 ans- qui a grandi avec son visage à la télévision, ses reportages et sa signature emblématique. A Ramallah, des photos de Shireen Abu Akleh sont affichées sur les murs, le panneau de publicité qui orne la Place Al-Manara diffuse désormais son portrait et l’inscription : «Au revoir Shereen.» Des drapeaux noirs ont été hissés sur la terrasse des locaux d’Al Jazeera, à proximité, ainsi qu’une immense banderole en hommage à la journaliste.
Rfi