Le 18 décembre est la Journée internationale des migrants. Elle a été proclamée par l’Assemblée générale des Nations unies le 4 décembre 2000. Elle commémore l’adoption de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

Définition de la migration
Au sens générique : déplacement de personnes d’un lieu à un autre, en particulier d’un pays (émigration) à un autre (immigration) pour des raisons politiques, sociales, économiques ou personnelles, et qui est le fait soit d’une population entière, soit d’individus s’intégrant dans un phénomène de société plus large.

Au sens que lui donne l’Organisation internationale des migrations : terme générique non défini dans le Droit international qui, reflétant l’usage commun, désigne toute personne qui quitte son lieu de résidence habituelle pour s’établir à titre temporaire ou permanent et pour diverses raisons, soit dans une autre région à l’intérieur d’un même pays, soit dans un autre pays, franchissant ainsi une frontière internationale. Il englobe un certain nombre de catégories juridiques de personnes bien déterminées, comme les travailleurs migrants ; les personnes dont les types de déplacement particuliers sont juridiquement définis, comme les migrants objets d’un trafic illicite ; ainsi que celles dont le statut et les formes de déplacement ne sont pas expressément définis par le Droit international, comme les étudiants internationaux.

Remarque : Au niveau international, il n’existe pas de définition universellement acceptée du terme «migrant». La présente définition a été élaborée par l’Oim pour ses propres besoins et n’implique nullement l’existence ou la création d’une nouvelle catégorie juridique.

Depuis toujours, l’humanité a été en mouvement. Certaines personnes se déplacent pour trouver un travail ou d’autres opportunités économiques, pour rejoindre leur famille ou pour étudier. D’autres se déplacent pour échapper à des conflits, à des persécutions ou à des violations massives des droits de l’Homme. D’autres encore se déplacent en réaction aux effets néfastes du dérèglement climatique, des catastrophes ou d’autres facteurs environnementaux.

Migration et peuplement de l’œkoumène (partie habitable de la terre)
La première migration notable remonte à l’aube des temps. Elle concerne un très loin aïeul, Homo Erectus, qui aurait migré il y a deux millions d’années d’Afrique vers l’Eurasie. Ce fut la première «sortie d’Afrique».

En Afrique même, l’Homo Erectus évolua il y a 300 000 ans vers notre propre espèce, l’Homo Sapiens. En Eurasie, il eut des descendants tels que Neandertal et l’homme de Denisova, il y a environ 500 000 ans. Il engendra aussi une espèce originale sur l’Ile de Florés (Indonésie) il y a seulement 80 000 ans.

Une deuxième «sortie d’Afrique» se produit il y a un peu plus de 70 000 ans quand quelques Homo Sapiens s’établirent au Moyen-Orient où ils s’unirent aux représentants locaux de Neandertal et Denisova. De ces unions seraient issus les Eurasiens actuels si l’on en croit les dernières découvertes de la génétique.
Homo Sapiens atteignit là-dessus des régions encore vierges de présence humaine : il y a environ 70 000 ans, il franchit les bras de mer qui séparent la Papouasie et l’Australie de l’Eurasie. Puis, il y a 35 000 ans, il traversa à pied sec le Détroit de Béring qui séparait l’Asie de l’Amérique en profitant du faible niveau des océans pendant la dernière glaciation.

A la même époque, l’Homo Sapiens Moyen-Oriental mâtiné de Neandertal gagna l’Europe où erraient peu de Néandertaliens. Ceux-ci, déjà en déclin démographique, ne tardèrent pas à disparaître, laissant le terrain libre à notre ancêtre, rebaptisé à l’occasion Cro-Magnon.

Qu’on ne s’y méprenne pas, ces mouvements de population non rien à voir avec les formes et caractéristiques actuelles de la migration qui présente un visage hideux, inhumain.

Au nombre de quelques milliers, les premiers humains n’avaient nul besoin de migrer pour trouver de quoi se nourrir. Lorsque les groupes familiaux s’agrandissaient, les cadets s’établissaient un peu plus loin que leurs aînés et, de proche en proche, ces groupes pouvaient ainsi occuper des continents entiers en quelques millénaires, à raison de quelques kilomètres carrés par génération !
De la même façon, ces groupes humains réduits à quelques familles ont pu se diversifier à partir de légères mutations génétiques il y a environ 35 000 ans, à l’apparition du Cro-Magnon et des différents groupes humains qui peuplent la planète (Africains, Asiatiques, Européens…).

Sources et faciès actuel du phénomène migratoire.
De façon générale et schématique, les pays pauvres constituent les points de départ des migrants (émigration) et les pays riches pays d’accueil (immigration).
L’intégration croissante des marchés du travail, les inégalités nées du commerce international, la baisse du prix des transports et l’existence de réseaux d’information et de communication et de réseaux sociaux bien établis sont autant de facteurs qui favorisent la mobilité à un rythme et une intensité inconsidérés. Ces migrations culminent avec l’apparition de nouvelles dénominations : émigrations clandestines, émigrations irrégulières (qui touchent toutes les catégories sociales tous les sexes ainsi que toutes les tranches d’âge) avec leurs cortèges de malheurs (pertes en vies humaines à bord de pirogues de fortune, décès enregistrés dans le désert). De nombreuses raisons amènent les gens à se déplacer – que ce soit pour étudier à l’étranger, rejoindre des membres de la famille, chercher un emploi ou des moyens de subsistance, ou assurer un meilleur avenir à leurs enfants.

D’autres migrants quittent leur pays pour fuir la criminalité, la violence, les conflits, la persécution, l’insécurité, la discrimination, les catastrophes et la dégradation de l’environnement, ou encore la pauvreté. Les migrations volontaires comme les déplacements forcés ont toujours été le lot commun de l’humanité. La plupart des gens comptent probablement parmi leurs ancêtres des personnes ayant migré. Aujourd’hui, la migration mobilise de plus en plus l’attention de la Communauté internationale. Mêlés à des éléments d’imprévisibilité, d’urgence et de complexité, les défis et les difficultés des migrations internationales exigent une coopération renforcée et une action collective entre les pays et les régions dans un contexte de dégradation de l’environnement en partie lié aux effets du changement climatique.

Réponses structurelles pour une meilleure maîtrise des flux migratoires actuels
Attaquer le mal à la racine pour réduire les facteurs à l’origine de bien des motifs de la migration sous sa forme actuelle.

Au plan interne aux Etats : Renforcer la démocratie, la justice sociale, assurer une meilleure prise en charge des droits fondamentaux de l’humain (éducation, santé, alimentation, logement, travail), la bonne gouvernance, une politique socioéconomique inclusive, des initiatives en termes d’adaptation aux effets néfastes du changement climatique, une meilleure intégration de la convention de Kampala relative au déplacement interne des populations, renforcer les dispositifs institutionnels et juridiques en faveur de la tolérance et de la paix…

Au plan international, promouvoir un commerce équitable, envisager la réduction de la dette des pays pauvres, par l’ajustement des politiques agro-exportation qui, pour le moment, ont pour conséquence de déstructurer les circuits alimentaires régionaux car la production des villages est intégrée à la production mondiale et les communautés s’appauvrissent mangeant ce qu’elles ne produisent pas et produisant ce qu’elles ne mangent pas. La pauvreté jette sur les routes des hommes, des femmes, des enfants qui cherchent tout simplement à survivre. Les aider à produire, à exporter, à vivre de leur travail réduirait les migrations pour sortir de la misère.

L’Organisation mondiale du commerce (Omc) a aussi un rôle à jouer car elle peut définir des règles commerciales mondiales qui accroissent les possibilités d’exportation et réduisent les coûts d’importation pour les pays pauvres.

Il est important de mener une action politique pour l’encourager dans ce sens.
Agir pour que les entreprises mondiales participent à une croissance économique en faveur des pauvres. Leurs décisions d’investissement ont un impact énorme sur la croissance économique, les conditions d’emploi et l’environnement ; et elles peuvent contribuer à l’expansion des opportunités de travail et aux renforcements de capacités des pauvres.

Les institutions financières internationales (Fonds monétaire internationale, Banque mondiale, autres banques et donateurs multilatéraux) peuvent promouvoir des politiques macro-économiques en faveur des pauvres par les conditions dont sont assortis leurs prêts.

Les migrations étant essentiellement des phénomènes multifactoriels ; il y a lieu d’insister sur la multiplicité des démarches ou actions à entreprendre plus tôt que sur la prééminence de certaines par rapport à d’autres.

Les pays pauvres ont besoin d’une politique internationale éclairée et responsable pour avancer dans la réalisation de tous les droits. Cette aide ne se résume pas à de simples transferts de ressources mais passe davantage par l’instauration d’un environnement mondial facilitant le développement des pays les plus pauvres.

Au total au nom de la dignité humaine, d’une coopération saine entre les Etats, de la recherche de solutions structurelles à ce nouveau défi de migration incontrôlée, cette journée dédiée à la migration doit être un moment de réflexion en vue d’une meilleure politique de prévention, de gestion et d’évaluation du phénomène migratoire dans toute sa splendeur et dans toute sa noblesse.

Abdou SANE
Ancien député, géographe-environnementaliste
Président de l’association africaine pour la promotion de la réduction des risques de catastrophe
Membre de l’observatoire national de la parité,
Conseiller municipal
Délégué auprès du maire chargé de l’urbanisme, de l’environnement et de l’état civil à la mairie de Ziguinchor.
abdousanegnanthio@gmail.com