La Maison des esclaves de Gorée et Robben island ont signé hier un accord de jumelage entre ces deux sanctuaires symbolisant la souffrance de la race noire. Pour les autorités culturelles du Sénégal et de l’Afrique du Sud, cet acte peut renforcer la coopération culturelle entre les deux pays.
Les 30 ans de la Conférence de Dakar ont été célébrés hier sur l’île de Gorée. Cette rencontre, qui s’est tenue du 9 au 12 juillet 1987, dans la capitale sénégalaise, avait réuni des dirigeants de l’Anc et une délégation sud-africaine de blancs à un moment où l’Afrique du Sud vivait les plus sombres moments de son histoire. La rencontre de Dakar avait, dit-on, ouvert la voie à des négociations officielles qui ont conduit à la fin de l’Apartheid et à l’avènement de la démocratie et de la liberté en Afrique du Sud. La commémoration a été un prétexte pour signer un accord tout aussi symbolique que l’Appel de Dakar puisque la Maison des esclaves de Gorée et le Musée Robben Island d’Afrique du Sud ont signé hier un accord de jumelage.
«Une partie du dénouement de l’apartheid de l’Afrique du Sud s’est passée dans ce lopin de terre au milieu de l’Océan atlantique où beaucoup de choses se sont passées», a témoigné le maire de Gorée. En effet, ces deux sanctuaires ont reçu Nelson Mandela, premier Président noir de l’Afrique du Sud : la Maison des esclaves en tant que visiteur et Robben island en tant que prisonnier pendant 27 ans. La proximité entre ces deux lieux de souffrance a été évoquée hier par les deux délégations.
En termes de symbole, rappelle le Secrétaire général du ministère de la Culture et de la communication, Robben island a représenté un lieu de privation et de détention pour Mandela et ses amis, ce que Gorée a représenté pour la Traite négrière. «Ce sont deux lieux de mémoire à partir desquels nous posons des jalons pour la coopération au niveau culturel puisque la coopération au niveau politique de manière générale entre le Sénégal et l’Afrique du Sud est exemplaire. Nous pensons que ce jumelage doit configurer une coopération à la lumière de notre coopération avec l’Afrique du Sud mais au niveau culturel notamment au niveau du patrimoine», a dit Birane Niang, a l’issue de la signature de l’accord de jumelage.
Pour le vice-ministre des Arts et de la culture de la République d’Afrique du Sud, cet événement marque une pierre angulaire par rapport à l’accord que le Président sud-africain, Jacob Zuma a signé lors de sa première visite officielle au Sénégal. «Cela non seulement nous regroupe mais nous renvoie à l’agenda 2063 de l’Union africaine qui veut que l’Afrique ait une identité culturelle, un patrimoine commun, des valeurs qui nous réunissent tous. Et c’est grâce à cela que nous pourrons chanter et danser notre danse, écouter la musique qui est la nôtre. C’est ainsi que nous pourrons réaliser l’intégration économique du continent, le bien-être économique de nos différentes communautés», a dit Mme Makhotso Magdeline Sotyu.
La vice-ministre sud-africaine des Arts et de la culture pense que le potentiel économique que recèlent le Sénégal et l’Afrique du sud pourra être exploité si les deux Peuples se comprennent et se rapprochent les uns des autres pour exploiter ces potentialités économiques. La cérémonie a été accompagnée de temps à autre par des artistes sud-africains dont les notes ressemblent au sabar (tam-tam sénégalais).
L’autre temps fort de la rencontre a été le vernissage de l’exposition d’archives du Musée de Robben island, à la Maison des esclaves. Des entraves colliers, entraves pour poignets, entraves pour pieds, fusils de traite, prix de la mémoire (France liberté) d’une part et les affiches sur la très célèbre et sécurisée prison de Robben island et des profils des quatre Présidents sud-africains démocratiquement élus ont été vernis par les visiteurs.
Esplanade des droits de l’Homme de Gorée : Nelson Mandela, nouveau parrain de la place
Augustin Senghor a indiqué, à l’occasion de la signature de jumelage entre la Maison des esclaves et le Robben island, que la place de débarcadère, appelée Esplanade des droits de l’Homme, s’appelle désormais Esplanade des droits de l’Homme Nelson Mandela. Une re-nomination qui n’est pas fortuite. «C’est sur cette place, après la cérémonie officielle de l’Appel de Dakar, que la photo de famille des deux délégations avait été prise et donc c’est symbolique à plus d’un titre. S’y ajoute qu’il y a quelques mois, l’ambassadeur d’Afrique du Sud et moi avons eu à planter un arbre pour nous souvenir de l’anniversaire de Nelson Mandela», a dit le maire de l’île de Gorée.
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