Le Préfet de Kaolack, qui a utilisé le mot «dégage» à l’endroit du maire Serigne Mboup, est au cœur d’une polémique qu’il a tenté de désenfler en exprimant ses regrets et en refaisant la genèse de cette affaire que la vidéo virale de l’altercation ne contextualise pas. Finalement, les deux hommes se sont retrouvés dans la soirée chez le khalife des Niassènes, qui a sans doute circonscrit le feu après cette rencontre.

A Kaolack, la tension est montée d’un cran entre les deux autorités de la ville. Dans une vidéo devenue virale, qui a choqué tout le monde, le Préfet ordonne au maire de Kaolack de «dégager les lieux», à savoir la cour du Cem Serigne Bassirou Mbacké, situé dans le quartier Ndorong, à l’occasion de la Journée de l’arbre qu’il présidait. Il réitère sa volonté de le «dégager» et demande au commissaire de police de faire «son travail». Ce qui a provoqué la colère noire du maire de Kaolack, qui a répliqué en lui renvoyant les mêmes mots. Des témoins tentent de circonscrire l’incident, notamment un commandant de la police, qui a rappelé aux deux autorités que cette «question ne se règle pas ici». Dépité, le Préfet quitte les lieux. Alors que Serigne Mboup, en colère, lui rappelle qu’il n’a pas le «droit» de le traiter ainsi.

La scène provoque une indignation nationale. Si la vidéo «viralisée» est tronquée, on sait que cette affaire est née d’une activité de reboisement organisée par l’association Bokk Jef Ci Kaolack, qui avait obtenu l’accord du Préfet pour la parrainer. Evidemment, toutes les parties s’accordent sur la genèse de cette affaire qui met le Préfet au cœur de la polémique, qui a pris des accents nationaux. Serigne Mboup s’explique : «En tant que maire de la commune de Kaolack, je tiens à exprimer ma plus vive protestation à la suite d’un incident grave survenu ce matin dans le quartier de Touba Ndorong, dans une école publique, à proximité immédiate de mon domicile.» Il dénonce un «programme structuré de la mairie détourné». Comment ? «Dans le cadre du programme municipal de reboisement, la Ville de Kaolack, à travers ses services techniques, et en coordination avec les Eaux et forêts, a lancé, ce 3 août 2025, une initiative historique : la plantation de 20 000 mangroves sur le littoral, la distribution de 50 000 arbres fruitiers, pour que chaque foyer de Kaolack plante un arbre, dans un esprit structuré, civique et durable. Or, à notre grande surprise, nous avons été informés d’une opération parallèle non autorisée, organisée dans ce même quartier par une association privée basée à l’étranger, en présence du Préfet, avec une mobilisation disproportionnée des Forces de l’ordre pour une action prétendant planter seulement 30 arbres.» Il poursuit : «Après vérification, cette structure s’est révélée être douteuse, s’étant déjà présentée à mes services pour une campagne similaire, que j’avais formellement refusée, après avoir constaté qu’elle collectait de l’argent à l’étranger au nom de Kaolack, sans aucun cadre légal ni transparence.  Nos services municipaux avaient officiellement demandé au représentant de l’Etat de ne pas valider cette initiative, précisément pour ces raisons. Malgré cela, l’opération a été maintenue de manière unilatérale.»

Selon Serigne Mboup, c’est une «atteinte directe à l’autorité municipale», après avoir dénoncé «une tentative manifeste de passage en force, des propos outranciers et irrespectueux du représentant de l’Etat à notre encontre. Et une tension maîtrisée uniquement grâce au sang-froid du commandant de police, que je remercie».

Pape Latyr Ndiaye a brisé le silence pour commenter cette vidéo, largement relayée sur les réseaux sociaux, suscitant de vives réactions outrées. «Je regrette que cela se soit passé ainsi. Cela n’est pas conforme à mon éducation et à ma formation professionnelle», regrette-t-il. Par contre, il a tenu à contextualiser l’incident, plaidant une excuse de la provocation. Selon M. Ndiaye, l’activité de reboisement qui a été organisée par l’association Bokk Jef Ci Kaolack, avec l’accord préalable des Eaux et forêts, avait été validée une semaine plus tôt. Mais, il assure que la veille, le maire aurait tenté de faire annuler l’événement après un coup de fil du Secrétaire municipal. Une «demande rejetée» en admettant que l’initiative, portée par une association de développement, était inscrite dans son agenda officiel.

Dans sa vidéo d’explications, Pape Latyr note qu’en l’absence des membres de l’association, il a procédé à un reboisement symbolique. Mais, il assure que le maire Serigne Mboup, ac­compagné de ses proches, a tenté d’interrompre l’activité, puis le point de presse. Ce qui a conduit à une escalade verbale, à cet «change de propos aigre-doux» qu’il regrette «énormément», tout en réaffirmant son rôle de garantir le déroulement des activités officielles entre les deux parties appelées à collaborer.

Dans la soirée d’hier, les deux hommes ont fumé le calumet de la paix devant le Khalife général des Niassènes, Serigne Mahi Niass. On les voit entourer le guide religieux, qui a réussi à désamorcer la polémique transformée en conflit entre les maires et les administrateurs civils.