Le ministère des Affaires étrangères français a porté plainte devant la bâtonnière de Paris contre l’avocat Juan Branco. Le Quai d’Orsay reproche à l’avocat, héros de jeunes des diasporas africaines en mal de repères, d’avoir mis en danger des fonctionnaires français au Sénégal lors des événements insurrectionnels qui se sont produits dans notre pays les 1er et 2 juin derniers. Devenu «héros» sous nos tropiques, si on se fie aux réseaux sociaux depuis qu’il s’amuse par tropisme exotique, quête opportuniste de buzz, à se faire l’avocat de l’opposant sénégalais Ousmane Sonko, le farfelu avocat, qui dit avoir porté plainte contre l’Etat sénégalais devant la Cour pénale internationale (Cpi), voit le gouvernement de son propre pays vouloir mettre un terme à ses agissements.
A vrai dire, la récréation que des guerriers connectés de la justice sociale et des adeptes d’un grand soir révolutionnaire, depuis le confort de leurs salons et claviers dakarois, ont encouragée de tout leur souffle, a trop duré. Un pays aussi sérieux que le Sénégal ne peut se laisser traîner dans la boue, par un apprenti mystificateur qu’une horde de complexés, alimentant leur machine réactionnaire de tout bois, a fini de draper d’un manteau de «sorcier blanc» qui rétablira justice et démocratie.
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Avant que l’Etat français n’agisse dans un souci de protéger ses agents, l’Etat du Sénégal devait, pour plusieurs errements de l’avocaillon, saisir le Barreau de Paris pour plusieurs actes scandaleux. Le Barreau du Sénégal devait également, sur plusieurs déclarations, par respect pour la Justice de ce pays, et tous ceux qui la servent, avoir une certaine réactivité pour mettre à carreau un agitateur vêtu d’une robe noire, qui n’en a cure de tous les grands principes qu’il convoque (des avocats sénégalais ont été rappelés à l’ordre pour moins que ça !). Juste pour du buzz et de la notoriété, un petit «Toubab» aura miné, à l’aide de «bons nègres», notre vivre-ensemble, piétiné des institutions et craché sur notre Justice. Nos héros du panafricanisme oublient souvent de se regarder dans la glace.
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Une sagesse en pays wolof dit que les gens ne sont bien connus que par les témoignages des leurs. Un bout publié dans la revue Franc-Tireur par Yann Barte et le philosophe Raphaël Enthoven en juin dernier, donnait un sacré portrait de l’aventurier des causes justes, qui veut organiser une «insurrection au Sénégal depuis Twitter». Le texte est d’une lucidité déconcertante, mettant à nu une fraude de cette ère des Internets. Je tenais à partager l’intégralité d’un portrait qui fâchera plusieurs soutiens aveugles du ténor des salles d’audience de Twitter. Nous aurons essayé de leur ouvrir les yeux.
Juan Branco : Guillotin d’opérette (par Yann Barte et Raphaël Enthoven)
«Ce qui frappe d’abord chez Juan Branco, c’est l’innocence de son immodestie : «Good luck, Emmanuel Macron», tweetait-il pour promouvoir un ouvrage humblement intitulé Abattre l’ennemi. Né en 1989 (pas 1789), l’«Ange noir de Saint-Germain-des-Prés», comme Paris Match l’a surnommé, appartient au cercle fermé des gens qui font rire à leurs dépens, parce qu’ils se prennent trop au sérieux. Le problème, c’est que l’homme n’est pas seulement hilarant, il est aussi haineux.
Disons d’abord que Branco a la passion du chaos. C’est avec émotion qu’il parle de «l’acte VIII» des Gilets jaunes, du boxeur Christophe Dettinger qui bastonne des gendarmes et du «Fenwick qui rentre dans la porte de Benjamin Griveaux…». Un acte de pur vandalisme, suivi par la fuite des assaillants, qu’il a savouré comme un «moment de purge extraordinaire» et de «joie». «J’étais là», lance l’adulescent ébouriffé sur la chaîne YouTube Juste Milieu, excité comme s’il avait pris la Bastille. Acteur ou spectateur ? Nul ne sait. Pas même lui.
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Emporté par son lyrisme, Branco s’emmêle souvent entre les «ils» et les «on». A propos de la vidéo sexuelle salement balancée par son ami russe Piotr Pavlenski pour torpiller Benjamin Griveaux, Branco basculera, à trois ou quatre reprises, dans un «on» qui laisse perplexe : «On l’a fait sans haine.» Ah, bon. Mais qui est ce «on» ? «Plus on vous entend, lançait Apolline de Malherbe lors d’une interview en février 2020, plus on se demande si Piotr Pavlenski n’est pas l’exécutant et vous le manipulateur.» «Un grand hommage», répond Branco… avant de saisir le Csa contre la journaliste et de dénoncer une «interview accusatoire». Se faire passer pour la victime d’un interrogatoire tout en laissant entendre qu’il est le cerveau du coupable… L’«ange noir» est, en la circonstance, au sommet de son machiavélisme. Manifestement, le bâtonnier de Paris partageait les mêmes doutes sur sa complicité, puisqu’il a demandé à l’avocat de ne pas défendre l’activiste russe. Echec et kompromat.
Le goût de la vendetta
Victime, il l’a été un peu, lorsque sa vie sexuelle a été étalée, quelques mois plus tard, par l’une de ses amantes d’un soir, qui l’a accusé de viol. Une sale histoire qui n’a en rien flétri ses pulsions de vendetta : Macron, Attal, Griveaux, Niel… Le sniper ne recule devant rien pour attaquer ses ennemis, le plus souvent au-dessous de la ceinture. Parfois, c’est sans effet, comme lorsqu’il balance sur Twitter l’homosexualité de son ancien camarade de classe, Gabriel Attal, tout juste nommé au gouvernement. Rongé par la jalousie depuis l’Ecole alsacienne dont Juan et Gabriel partageaient les bancs, le premier animait déjà un skyblog pour cracher sur le second. «Gabriel a réussi tout ce que Juan a raté», résumait un de leurs anciens profs en 2019 dans L’Obs.
Envieux et revanchard, Juan Branco nourrit évidemment une vision complotiste du monde qu’il partage sur RT, France-Soir ou Les Incorrectibles, où il explique que les mesures sanitaires contre le Covid-19 n’étaient qu’une «expérimentation à large échelle» destinée à tester le «niveau de consentement» de la population. Dans ta face, l’Etat profond !
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«La seule solution, répète-t-il, faire la révolution.» Que dire ? Branco aime les allitérations. Notre Guillotin d’opérette en est persuadé : «la fin des rois approche, et la lame sanglante, sur leur nuque fraîche et préservée, s’apprête à tomber», prédit-il dans un chef-d’œuvre intitulé Coup d’Etat, où il appelle à «attaquer les préfectures», à «prendre en otage s’il le faut», à mobiliser les engins de chantier «pour mettre en déroute les Forces de l’ordre», voire l’arsenal des chasseurs… Pan-pan ! «Je me verrais bien en procureur de la Nation», confesse-t-il sur Tv Libertés, «pour mettre en prison un certain nombre de personnes». Au lycée, il notait les photos de filles. Adulte, il compte les têtes à faire tomber. Le Saint-Just de Saint-Germain a même des idées originales. Songeant avec gourmandise aux remblais de la Concorde, «où il y a eu la guillotine», il se dit qu’«on aurait pu [y] mettre un peu de Plexiglas et enfermer là les maîtres de notre pays», afin qu’ils se fassent «marcher dessus par les populations».
Objectif : Bordéliser
En vérité, Branco ne jure que par la violence. Tout autre moyen d’action relève, selon ce sage, d’une «immaturité politique». Il s’est bien présenté aux Législatives de 2017, sous l’étiquette La France insoumise, mais pour «foutre le bordel» à l’Assemblée. Un échec. Depuis, Branco méprise ses anciens camarades, qui s’éclatent à «bordéliser» sans lui, et trouve Mélenchon «un peu couard». Avec lui, la terreur, ce serait tous les jours.
Côté face, Branco vend des livres à des révolutionnaires en chambre, s’affiche avec Julian Assange ou se présente comme l’ex-avocat de Mélenchon, de Maxime Nicolle (ex-figure des Gilets jaunes) ou du gifleur de Macron ; côté pile, Branco percevait le Rsa en 2018 et 2019 et n’aurait eu que trois clients en deux ans… dont son père. Quand la vie ne veut pas, il reste sa page Wikipédia qu’il embellit à l’envi. Stagiaire à La Haye, il s’invente un poste d’assistant personnel du procureur de la Cour pénale internationale et à Paris un poste de dircab tout aussi imaginaire auprès de l’ex-ministre de la Culture, Aurélie Filippetti.
En ce moment, Juanito prépare une insurrection au Sénégal depuis Twitter, après avoir été sollicité par le clan du très populiste Ousmane Sonko. Cela reste peu de chose à côté des purges et tribunaux populaires dont il rêve en se rasant. Il imagine même son ami négationniste, Etienne Chouard, à la tête d’une institution succédant au Conseil constitutionnel. Une révolution qui, décidément, tarde à advenir. En attendant la terreur, il lui reste le ridicule.»
Le Quotidien sollicite l’indulgence des auteurs et de la revue «Franc-Tireur», pour avoir publié ces extraits de leur article dans la précipitation et sans attendre d’avoir obtenu leur autorisation. C’est avec la conviction de poursuivre tous le même objectif de dessiller les crédules que nous nous sommes permis cette entorse.
Par Serigne Saliou DIAGNE – saliou.diagne@lequotidien.sn
Je suis pro Sonko mais je n’apprécie pas les agissements de l’avocat sa manière tout ça je doute réellement de sa sincérité seulement la façon dont vous le peigner dégage un acharnement
C’est pas le journal qui le peigne ainsi, ce sont des compatriotes à lui et pas n’importe lesquels qui ont écrit cet article.