(Cette contribution est inspirée par la sortie du ministre du Plan sur ce qui freine l’efficacité de l’action publique)
Le développement du Séné­gal reste entravé par un obstacle fondamental : la faiblesse de la gouvernance publique et l’instabilité politique. Ce double handicap affecte la mobilisation des ressources, la qualité des investissements, la confiance des acteurs économiques et l’efficacité des politiques publiques. Malgré des ambitions affichées dans les plans nationaux, les résultats peinent à suivre, en grande partie à cause de dysfonctionnements institutionnels persistants.
La capacité budgétaire du pays est limitée par une gestion publique qui peine à anticiper les chocs et à planifier les dépenses de manière stratégique. Les tensions politiques récurrentes perturbent la collecte fiscale et ralentissent les réformes structurelles. En parallèle, la dette publique croissante absorbe une part importante des ressources, réduisant la capacité de l’Etat à investir dans les secteurs sociaux et accrus.
Le climat des affaires souffre également de cette instabilité. Les investisseurs, nationaux comme étrangers hésitent à s’engager dans un environnement où les règles du jeu sont floues et changeantes. Les secteurs innovants, comme les technologies financières, peinent à se développer faute de cadre réglementaire clair et de soutien institutionnel. Cette frilosité freine la création d’emplois et l’inclusion économique, notamment pour les jeunes et les populations rurales.
Les grands projets d’infrastructures, censés porter la transformation économique, sont souvent mal planifiés, mal exécutés et peu suivis. Retards, surcoûts et défauts de maintenance sont fréquents, réduisant leur impact socio-économique. Les services publics, notamment en santé et en éducation, restent inégalement répartis et insuffisamment performants, limitant le développement du capital humain et la productivité nationale.
Pour surmonter ces obstacles, plusieurs leviers doivent être activés. Il est urgent de renforcer la transparence budgétaire, en publiant l’ensemble des engagements financiers de l’Etat et en adoptant une gestion à moyen terme des finances publiques. Les institutions de contrôle doivent être consolidées, avec des moyens accrus pour les organes judiciaires, les autorités anticorruption et les auditeurs indépendants. Le cadre réglementaire doit être stabilisé pour offrir aux investisseurs une visibilité à long terme, notamment dans les secteurs stratégiques. Enfin, la gouvernance des projets publics doit être professionnalisée, avec des procédures rigoureuses d’évaluation, de suivi et d’audit.
Le Sénégal dispose de ressources humaines, naturelles et culturelles considérables. Mais sans une gouvernance solide, transparente et prévisible, ces atouts resteront sous-exploités. C’est en réformant en profondeur ses institutions et en rétablissant la confiance dans l’action publique que le pays pourra accélérer son développement et offrir à ses citoyens les conditions d’une prospérité partagée.
Falilou DIOUF
Auditeur Conseil