Plus de deux millions de femmes vivent avec une fistule obstétricale non-traitée, dont une grande partie en Afrique de l’Ouest. La Première dame du Niger, également présidente de la Fondation Tattali-lyali («Prendre soin de la famille »), prend la plume pour lancer un «cri d’alarme» face à cette situation.
La première réaction, lorsque l’on entend parler de la fistule obstétricale, est trop souvent le regret de ne pas en savoir davantage. Le terme n’est pas toujours compréhensible et sa réalité est déplaisante, quand elle n’est pas dramatique. Aussi, cette question majeure de santé publique est-elle entourée d’un épais silence. La fistule obstétricale touche des femmes très jeunes et pauvres n’ayant pas accès aux soins obstétricaux. C’est précisément pour mettre fin à cette situation que les Premières dames des pays membres de la Communauté économique de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) ont décidé, en se réunissant à Niamey, la capitale du Niger, de pousser un cri d’alarme relayant les cris de détresse des victimes de cette infirmité.
Un mal qui touche les femmes les plus pauvres
La fistule obstétricale touche des femmes très jeunes, trop jeunes et pauvres n’ayant pas accès aux soins obstétricaux. Il arrive que l’accouchement dure cinq jours ou davantage, provoquant de graves dommages qui rendent la jeune femme incontinente.
Cette dernière va être remplie de honte et de dégoût d’elle-même et parfois placée en marge de la société ou répudiée par son mari, furieux que sa belle-famille lui ait confié une «femme abîmée». Selon les statistiques, à travers le monde, mais surtout en Afrique subsaharienne et en Asie, on estime que plus de 2 millions de jeunes femmes vivent avec une fistule obstétricale non soignée.
Ce sont entre 50 000 et 100 000 nouveaux cas qui sont recensés chaque année. La majorité de ces cas vivent dans l’espace Cedeao. Et un pays comme le Niger enregistre, tous les ans, 750 nouvelles victimes.
La plupart sont des jeunes données précocement en mariage sans leur consentement. Je suis particulièrement émue quand je pense au sort réservé à ces dernières, qui témoigne de l’inégalité du genre dans nos sociétés.
Il faut rappeler sans relâche que la plupart des femmes vivant avec ce handicap sont des jeunes et des adolescentes données précocement en mariage sans leur consentement.
Une exigence des Odd
Je voudrais saisir cette occasion pour leur souhaiter une bonne et prompte guérison, tout en leur assurant que l’ensemble des Premières dames de la Cedeao ne ménageront aucun effort pour renforcer la lutte contre ce fléau. De même, je réaffirme l’engagement de la Fondation Tattali Iyyali à contribuer à l’éradication de cette pathologie. Une éradication qui répond à l’appel du nouvel ordre mondial à travers les Objectifs du développement durable (Odd) dont l’objectif 3 stipule «le bien-être pour tous d’ici l’horizon 2030».
Aucune femme ne devrait endurer un tel problème de santé alors qu’il peut être évité et traité. Tout comme nous parlons de mettre fin à la poliomyélite, au Vih/Sida, et à tant d’autres formes de souffrance, nous devons nous engager à intensifier nos efforts pour éradiquer la fistule obstétricale.
Aucune femme ne devrait endurer un tel problème de santé alors qu’il peut être évité et traité. Notre objectif à long terme doit être de rendre l’existence de cette pathologie aussi exceptionnelle dans les pays en développement qu’elle l’est déjà dans les pays développés.
Il convient de rendre hommage au Fonds des Nations-Unies pour la population (Fnuap) qui a lancé en 2003 la campagne mondiale d’élimination de la fistule obstétricale. Campagne qui s’articule autour de trois axes stratégiques : la prévention, le traitement et la réinsertion socio-économique.
Faire perdre ceux qui font perdre leur dignité aux femmes
Je salue également les efforts accomplis au Niger à travers des actions dans le domaine de la prévention, la prise en charge chirurgicale et la réinsertion des patientes.
Cependant, nous avons toutes conscience que beaucoup d’efforts demeurent à faire pour atteindre l’éradication de la fistule obstétricale. C’est pourquoi, ce Forum de Niamey lance un appel fort pour une mobilisation générale afin que ce combat pour la dignité des femmes victimes de la fistule obstétricale devienne le souci de tous. Comme l’a dit Nelson Mandela : «Tout homme ou institution qui essaiera de me voler ma dignité, perdra.» Faisons donc perdre ceux qui font perdre leur dignité aux femmes victimes de la fistule.
Jeuneafrique