Nous avons découvert la République à l’âge où les petits qui seront des citoyens apprennent à lire, écrire et compter, remplissent l’encrier, trempent la plume dans l’encre, salissent le buvard, apprennent à être propres, s’exercent au civisme, adhèrent aux valeurs de la République et s’approprient une devise, une bannière, un sceau et un hymne. Autant de symboles de souveraineté qui ont résisté au temps et aux intempéries.
«Le drapeau de la République du Sénégal est composé de trois bandes verticales et égales, de couleur verte, or et rouge. Il porte, en vert, au centre de la bande or une étoile à cinq branches.» C’est ce que nous rappelle avec une rare insistance le foulard de Madame, l’écharpe de Monsieur, la casquette de l’écolier, le tee-shirt du promeneur, les boucles d’oreilles de mademoiselle, la tenue de fête de la serveuse, le badge de l’enfant, les balcons de l’immeuble, le capot avant ou arrière de la voiture, le bureau de l’employé, les drapelets des vendeurs à la sauvette, la devanture de la maison, l’entrée du café, le chapeau du supporter, le bracelet de la petite fille…
Depuis le 6 février 2022, date à laquelle les Lions de la Téranga ont battu aux tirs au but les Pharaons d’Egypte, la bannière requinque l’homme et la femme, le riche et le pauvre, le musulman et le chrétien, l’enfant et l’adulte. Grâce au sport et à la formidable prestation d’une bande de copains, la bannière agrémente les manifestations de joie et installe la République au cœur de la fête.
Il y a seulement quelques jours, le citoyen stupéfié en appelait au sursaut républicain. Aujourd’hui, les amis du très astucieux Sadio Mané se l’imposent puis l’imposent aux supporters de tous les milieux sociaux de nos villes et de nos campagnes.
La République est de retour grâce aux sorties furtives, claquettes et arrêts inédits du gardien du temple, Edouard Mendy, les chevauchées de tous les autres copains et les échappées de Mané.
Pour celles et ceux d’entre nous qui ne connaissent rien au football, l’essentiel est de marquer des buts et de gagner. Sadio Mané réussit le tir au but auquel étaient suspendus 17 millions de Sénégalais. Suffisant pour rassembler 17 millions de champions d’Afrique et hisser pour longtemps encore les couleurs de la République au-dessus de toutes les mêlées.
Inutile d’en rajouter : la République préserve mieux l’égalité des chances, souffle les discriminations mieux que le vent des alternances politiques, dope l’audace citoyenne mieux que les mots d’ordre partisans, suscite la cohésion sociale mieux que les grandes lignes d’un programme électoral, ressuscite les droits et les devoirs mieux que les sommations, donne envie de jouer un rôle aussi grandiose que celui des amis du capitaine Kalidou Koulibaly, permet de mieux réussir dans les autres domaines comme la création de richesses, l’éducation, le logement, la santé, l’environnement, etc., et enjoint mieux chacun de nous à adhérer à l’idée d’une redistribution des dividendes engrangés.
La République est bien de retour comme l’étaient le lundi, 7 février 2022, les Lions de la Téranga. Elle est bien au cœur de la fête grâce au coach Aliou Cissé qui parle peu et agit beaucoup et bien en coulisse pour le meilleur. Merci Aliou !
Nous rendons grâce à Dieu après le sacré sacre africain grâce auquel toutes les Sénégalaises et tous les Sénégalais ne font plus qu’une seule et même personne sous la bannière de la République retrouvée.
La Coupe du monde avait été gagnable en 2002 ! Nombreux sont les supporters qui la lorgnent après Yaoundé. Gagnables sont aussi tous les paris non sportifs sous le parapluie républicain aux couleurs du plus beau drapeau du monde. Vert Jaune Rouge. Espoir Puissance Courage.
Abdoul Aziz DIOP – Essayiste – Conseiller spécial à la Présidence