«Ku bëgg yàpp tax a song ňay, doo am yàpp, doo am jamm.»
Mon frère Bachir, à Ndumbélaan, l’herbe est tout juste bleue ; essayer d’en faire intégrer la couleur naturelle et universelle aux zélés, aux inconscients, aux idolâtres, aux blasphémateurs jusqu’au bout des doigts, aux tarés, aux saltimbanques, aux baladins, aux gougnafiers, aux bouffons, aux troubadours et autres laudateurs qui soutiennent aveuglément les dirigeants actuels du royaume, c’est demander à un nain (excusez-moi du terme utilisé ici, il n’y a aucune stigmatisation de ma part) de sauter une barre placée à deux mètres et demi du sol.

Personne ne saurait rester indifférent à la guerre larvée qui oppose si maladroitement le nouveau et l’ancien régimes sur l’état actuel de nos finances publiques. Le nouveau régime accuse son prédécesseur sur une affaire de colossale «dette cachée», alors que depuis que Maître Pierre-Olivier Sur est dans nos murs, il est (lui aussi) pointé du doigt sur une gravissime affaire de «rapports cachés».

La fameuse ATS, l’inattaquable, l’incontournable, l’élégante, l’éloquente, le grand esprit modéré et mesuré, nous apprend que, là-bas, au pays de l’Oncle Sam, dans les couloirs feutrés du Fmi et de la Bm, Ndumbélaan est devenu le clown Bibi à qui on fait danser la «lambada» de la dérision et puis, le fagot de bois mort qui alimente le feu des discussions les plus hilares. Mon fameux cousin ivoirien se serait écrié : «Mais on est où là ?»

Ndumbélaan se meurt ; les boulets, les piques sans fondements certains, les insanités calculées ont eu raison petit-à-petit de sa splendeur d’antan : Senghor se retourne dans sa tombe, Diouf en perd son latin, Fara Njaak en perd de sa pugnacité légendaire et Sall Ngaari sa réputation. Tout ça parce que «kii topp ci Jomaay, lu ko saf, lu ko neex, lu mu xalaat, lu mu bëgg, wax ko», sans se soucier des conséquences futures sur la vie déjà difficile, sur la fine sensibilité, sur la relative émotivité de ses concitoyens. «Wax (le Verbe) dafa jooy» dans Ndumbélaan : il n’a pas été dit en temps opportun, en lieu indiqué et de manière appropriée. C’est vrai que «tànkatu dàll ci ay carax lay mujj».

Aujourd’hui, les Ndumbela­niens réclament le respect à leurs décideurs : on ne joue pas avec l’honneur d’un Peuple, la réputation d’une Nation, les atours d’une République et la sacralité d’un Etat. Un simple jeu de politique politicienne n’y autorise quiconque !

Le Respect n’est pas forcément l’hypocrisie que nous mettons à baisser le regard et ou la voix devant nos aînés, la duplicité que nous entretenons dans la circonspection et la prudence face aux institutions de toutes sortes, la fourberie que nous nous imposons pour nous rendre dociles et agréables afin de nous attirer les félicitations et autres faveurs de nos supérieurs, les impostures que nous épousons dans chaque situation afin de nous accaparer l’attachement et le penchant de nos semblables ; il est tout simplement plus profond que l’ensemble de ces mues cupides et calculatrices. Le Respect, c’est mettre son prochain à sa place tant que l’on pense au droit légitime de s’arroger le meilleur pour soi-même. Le Respect, disais-je, est donc le fait de penser continuellement -et en tout- à son prochain ; cet autre dont le regard rivé sur vous, scrute à chaque instant le reflet de votre conduite.

Il est indéniable que nos décideurs actuels nous manquent de Respect ; ils nous prennent pour des demeurés parce qu’amnésiques et aphasiques. Ils oublient délibérément que le Grand Peuple de Ndumbélaan les connaît largement abreuvés et suffisamment moulés par et ou dans les sources obscures d’un «populisme hitlérien» des plus carnavalesques, des plus inféconds, des plus sardoniques et des plus outrageants contre la dignité des uns et des autres. Il y aurait «dette cachée si on ne devait pas la payer ; s’il y avait des créanciers identifiés et un mode de paiement secret en dehors des rouages officiels. Ces supposés créanciers seraient-ils des fantômes innommables ? Des prêteurs d’argent sale peut-être ? Allez savoir, car «am na loo xamne politik rekk jaru ko !»».

Parce que justement, la Politique, l’action politique (exclusivement menée pour le mieux-être des populations), pour mieux s’exprimer, n’a pas besoin d’usurpateurs de vertus, de pirates sur des idées de prime abord non comprises et de versatiles sans convictions solides, surtout lorsqu’ils ont un ego surdimensionné capable d’enterrer, d’entraver, d’annihiler les progrès difficilement acquis de son Peuple uniquement pour asseoir sa propre popularité, sa propre expertise auprès d’inconditionnels schizophrènes ; une popularité et une expertise jusqu’ici improductives. Seulement nak, «Solutions» n’a pas encore apporter de solutions à l’emploi des jeunes, à la tyrannie de la marmite à bouillir, au prix exorbitant de l’énergie, aux inondations, à la paupérisation galopante des ménages, etc.

La politique n’est pas un champ pour les gladiateurs, pour les mercenaires cupides et pour les arnaqueurs aux comportements bestiaires et bellicistes. Faire de la politique, c’est faire preuve d’éthique à toute épreuve, de moralité irréprochable, de probité intellectuelle face à toutes les tentations, de loyauté envers soi-même et envers ses concitoyens, de mesure face à la chose publique, mais surtout d’équilibre dans le verbe et dans le geste afin d’épargner à la société les désagréments et les démons de la division. Autrement, elle (la politique) ne devient pas moins qu’une salace offense faite à l’intégrité morale des Ndumbelaniens et Ndumbélaniennes. Aujourd’hui, ceux qui espèrent occuper l’espace médiatique, le cœur de leurs concitoyens et accaparer leur vote massif par un tel comportement, veulent nous faire avaler leurs déloyautés, leurs trahisons et leurs reniements incessants des principes et idéaux qui doivent gouverner toute action politique noble et constructive que l’on veut au seul bénéfice des hommes et de la cité.

Pourtant, un homme politique doit être une icône, un miroir, une référence pour les principales composantes de la société (surtout pour les plus jeunes) qui puisent, dans son verbe et dans son geste, la source de leur inspiration, la caricature de leur modèle, en vue de se forger un chemin sûr. Faire de la politique, c’est agir convenablement sur les archétypes de comportements globaux de son Peuple, c’est le (le Peuple) façonner, le modeler et ensuite le placer sur une orbite, sur une trajectoire qui longe harmonieusement et ou épouse décemment les exaltants et solides pieux qui fondent, et puis soutiennent les vérités (éthique, déontologie et vertus cardinales) de la vie en commun faite de solidarité agissante, de citoyenneté accomplie et de patriotisme avéré. Ridi­culiser son pays à la face du monde est un crime sans commune mesure ; c’est comme ouvrir un pan entier de la frontière à une armée ennemie ou par analogie, un éléphant dans un magasin de porcelaine précieuse. Imaginez les dégâts !

On ne sort pas du néant pour faire le messie politique. L’hom­me ne vaut, n’inspire confiance que par ses antécédents : «Kenn du tari lu mu jàngul.»
«Kii topp ci Jomaay», il se bat pour quoi ? Pour la posture de sixième Président de Ndumbélaan ? Mais peut-on faire d’un Peuple déjà debout, rongé qu’il est par les remords, miné par les gènes au quotidien, un refuge, un réceptacle où on peut expérimenter sans coup férir des ruses politico-politiciennes afin de le berner, de le mystifier et de l’endormir ?

Les fades leçons tirées du populisme, du machiavélisme, des idées de Curtis Yarvin popularisées aujourd’hui par Nick Land ne passeront plus ; nous sommes déjà vaccinés contre le virus de l’amnésie : «Ku bëgga dee wéqu waay.»
Amadou FALL
Inspecteur de l’enseignement à la retraite à Guinguinéo
zemaria64@yahoo.fr