1-Démoctatie et liberté
Le Premier ministre Churchill disait : «La démocratie d’un pays ne se mesure pas seulement à son processus électoral, mais aussi par les méthodes utilisées par ses enquêteurs et ses magistrats pour appliquer le droit pénal.» Avec l’affaire Khalifa Sall, on a donc de quoi s’interroger sur la démocratie sénégalaise. Elu député le soir du 30 juillet 2017, le maire de Dakar devrait, conformément au Règlement intérieur de l’Assemblée nationale, bénéficier d’une immunité parlementaire.
La convention de l’Union africaine, en son article7, alinéa 5 sur la prévention et la lutte contre la corruption, dispose que «sous réserve des dispositions de la législation, toute immunité accordée aux agents publics ne constitue pas un obstacle à l’ouverture d’une enquête sur les allégations et d’un procès contre de tels agents». Concernant les dispositions nationales, on peut citer la Constitution en son article 61, alinéa 2 et les articles 52 et 34 du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale. Or ici, il n’y a ni ouverture d’enquête ni ouverture de procès. Ce qui fait que l’honorable député Sall aurait dû bénéficier de son immunité parlementaire. Il est ici question de droit, de démocratie, de séparation de pouvoirs et de liberté.
NB : Nul n’ignore que l’immunité n’est pas un privilège, mais un moyen destiné à assurer au député l’indépendance et la liberté d’expression nécessaire à l’exercice de son mandat ; c’est une protection d’ordre public liée à sa fonction et non à sa personne. C’est pourquoi le député ne peut pas y renoncer. L’immunité parlementaire ne protège pas l’élu, mais sa fonction.
2-Conséquentialisme et déontologisme
Dans l’affaire Khalifa Ababacar Sall, on note non seulement le non-respect du Règlement intérieur de l’Assemblée, mais aussi une violation des pouvoirs institutionnels. En violant la loi avec la non-attribution de l’immunité parlementaire, le rôle du député est bafoué et donne ainsi un non-sens à sa fonction. Sur ce, ne croyez-vous pas que les institutions sénégalaises sont en péril ?
Déjà en 2012, le Président Macky Sall affirmait que «la République ce sont des institutions fortes, la République c’est l’équilibre entre les pouvoirs, qu’il s’agisse du pouvoir exécutif, incarné par le président de la République et son gouvernement ou le pouvoir législatif, incarné par la représentation nationale à travers l’Assemblée nationale, ou encore le pouvoir judiciaire, à travers les Cours et Tribunaux. Il faut qu’il y ait un équilibre. Mais lorsque toutes les institutions s’effondrent devant une seule qui fait et défait selon son bon vouloir, nous ne sommes plus en République, nous ne sommes plus en démocratie. Et aujourd’hui, c’est le plus grand danger qui guette le Sénégal, qui mine jusqu’à l’existence de sa République, si on laisse faire parce que la gouvernance – la démocratie – suppose, je l’ai dit tantôt, l’équilibre entre les pouvoirs. Que ceux qui sont investis de mission publique sachent qu’ils doivent rendre compte des pouvoirs qui leur ont été confiés. Mais ça, ce doit être un événement naturel. Mais dans un pays, lorsque exiger que des comptes soient rendus devient un crime, je dis, ce pays est en danger». Après toutes ces années, ne pensez-vous pas que ces valeurs républicaines tant prônées durant la compagne de 2012 sont aujourd’hui en péril ? Sinon comment analysez-vous cette «dichotomie» de faits et de propos ?
L’affaire Khalifa Sall fait la une des journaux et l’opinion publique parle de rivalité politique… En dépit de toute appartenance politique et de toutes opinions, je me dis que notre démocratie est en train de sombrer dans le chaos total. Pour la simple et bonne raison «que la rivalité politicienne a atteint des propositions alarmantes et la soif du pouvoir aura même eu raison sur la rationalité politique au point que 44 listes électorales ne suffisent pas à tirer la sonnette d’alarme sur l’impérieuse nécessité d’accorder les violons et de remonter la pente avant qu’il ne soit trop tard. Pour que le Président Macky Sall puisse réussir aux yeux des Sénégalais ce dernier tournant de son mandat, il faudra impérativement que la promesse d’un Sénégal émergent soit davantage visible à travers l’achèvement des infrastructures ambitieuses promises dans le cadre du Pse (Plan Sénégal émergent). Si le Président veut réussir dans le cœur des Sénégalais et s’y ancrer, alors il faudra qu’il songe à payer le prix de la réconciliation politique et de l’unité nationale afin que règnent dans notre pays l’ordre et la cohésion sociale», disait Amy Sarr Fall, directrice d’Intelligences Magazine (N°76 sept 2017/P7).
Meilleurs vœux 2018 à vous et bien de chose à la famille !
BOCOUM Alassane
Étudiant en Philosophe et en Management