Pas besoin d’être un économiste pour deviner aisément les effets néfastes des embouteillages.
Les conséquences vont même au-delà du secteur économique, mais affectent sérieusement les usagers de la route du point de vue de leur comportement. L’augmentation de la consommation de carburant, les ralentissements voire retards considérables sur les livraisons, l’allongement du temps de parcours domicile-lieu de travail et vice-versa, le stress, la réduction du temps de sommeil combinée avec les relations interactives de plus en plus tendues dans le milieu du travail et familial sont autant de maux qui contribuent à impacter négativement le vécu quotidien des usagers de la route à cause des embouteillages.
En dehors des facteurs classiques qui favorisent ce «mal» (surcharge de trafic, encombrements des routes, forte concentration des activités au niveau de la ville etc.), il convient de noter que la problématique des embouteillages est liée principalement à la configuration de la ville de Dakar. Une ville ceinturée par l’eau et dont les voies de dégagement sont très négligeables par rapport à la forte densité de personnes qui fréquentent au quotidien un périmètre très réduit, où petits commerces, bureaux, marchés, gares… se bousculent.
Le centre-ville a le malheur d’abriter en même temps des bâtiments administratifs, des hôpitaux des marchés très fréquentés à l’image de Sandaga, Petersen, donnant ainsi un beau monde qui converge au quotidien vers un lieu exigu.
Etant donné que la localisation des activités économiques dicte les logiques de mouvements des populations, il serait pertinent dans la mesure du possible, de procéder à la délocalisation de certaines infrastructures ou à défaut les transformer ; c’est le cas des gares de Petersen et de Lat Dior par exemple.
Rendre le transport public beaucoup plus attrayant :
un facteur clé pour venir à bout des goulots d’étranglement
Le Ter et le Brt sont indiscutablement deux projets qui vont apporter une plus-value au transport public, pourvu qu’ils soient accompagnés par une politique visant à inviter les populations à épouser l’idée d’abandonner leurs véhicules utilitaires au profit du transport public. Par ailleurs, il serait opportun de préparer l’esprit des populations à travers une politique incitative qui leur donnerait l’occasion d’apprécier eux-mêmes les avantages du transport public à travers un gain sur leurs économies et leur temps.
Dakar étouffe et croule sous le poids de la densité du trafic, parallèlement à l’option d’un transport public efficace, instaurer une politique visant à décourager l’utilisation des véhicules personnels en appliquant par exemple des taxes liées à l’encombrement des routes et les mauvais stationnements, contribuerait à réduire considérablement les surcharges de trafic au centre-ville.
Mais faudrait-il que cela commence d’abord par une amélioration conséquente de la qualité du service du transport public qui a été longtemps décriée, car rendre le transport public beaucoup plus attrayant suppose d’abord de corriger dès à présent certaines imperfections observées dans le service proposé par les deux entités que sont Dakar dem dikk et Aftu (Association de financement des transports urbains) qui assurent l’offre de transport public de voyageurs en relation avec l’organe institutionnel chargé de la règlementation des transports publics urbains, le Cetud (Conseil exécutif des transports urbains de Dakar.)
Dakar dem dikk a, lors des dernières années, augmenté considérablement son parc véhicules, mais peine toujours à répondre de manière efficace à la demande de transport. Quant à l’Aftu, elle présente des carences notoires dans les conditions de transport de voyageurs.
La recherche du profit et l’excellence des recettes sont mises en avant au détriment du confort du voyageur. L’Etat, à travers ses démembrements, Cetud, direction des Transports terrestres, adopte une politique de non-assistance face à une situation dégradante qui s’accentue de jour en jour, mettant en danger la sécurité des voyageurs ; une attitude pernicieuse, incomprise qui ne peut être justifiée.
Nous attendons d’eux qu’ils aillent jusqu’au bout dans la politique de renouvellement du parc automobile, afin d’éradiquer l’existence de véhicules qui ne répondent plus aux normes du transport public de voyageurs.
Le Ter qui reste un outil très innovateur, alliant confort et gain de temps, soulève à notre niveau des interrogations par rapport à la tarification qui serait déterminée à cet effet, serait-elle onéreuse, au point d’échapper à la bourse du pauvre «goorgorlu» ?
Tiendrait-il en compte les besoins de transport du «bana bana», qui doit quitter la banlieue avec tout son armada, afin d’exercer son travail au centre-ville ?
Quant au Brt qui reste un système de transport de surface à travers une voie exclusivement dédiée, le fait qu’il ne partage pas la chaussée avec les autres véhicules lui permet d’évoluer sur une vitesse constante avec une rentabilité optimale aussi bien pour le promoteur que pour l’usager. Mais les multiples intersections et les carrefours à traverser constituent un facteur important qui pourrait ralentir sa progression. Reste à savoir le type de bus qui sera proposé à cet effet, et dans ce cas, le meilleur choix serait de mettre en place des bus articulés à haut niveau de service, car la configuration du tracé du Brt, tel que observé, est une ligne principale, quasi droite qui ne présente pas beaucoup de virages.
Au regard de ce qui précède, mon opinion est que, considérer ces projets comme une réponse efficace par rapport aux congestions relève d’une erreur manifeste d’appréciation. Ces deux moyens de transport (Ter et Brt) s’ajoutent à un existant qui jusque-là peine à répondre efficacement aux attentes des populations. Ils peuvent cependant apporter aux usagers, dans une moindre mesure, un gain de temps considérable, mais ne peut venir à bout des embouteillages.
BABOU Bamba Logisticien
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