Madame le Consul général, il me plaît de vous adresser la présente suite au refus de l’agent consulaire ayant examiné ma demande de visa pour la France, refus communiqué par lettre du 24/01/2024.
En effet, en mon nom, ma fille installée en France, résidant et travaillant à Nantes avec son mari, a soumis une demande de visa FRA 1 DK20237 1011888.
Le visa a été refusé pour des motifs fallacieux sur lesquels je me garde de revenir pour ne pas rabâcher le blabla familier qui sert toujours de mauvais prétexte pour éconduire la plus grande majorité des demandeurs.
Rassurez-vous. Je ne suis pas demandeur d’asile. Je ne quitte mon pays où il fait mieux-vivre qu’ailleurs que sur invitation et entière prise en charge. J’ai vraiment éclaté de rire lorsque j’ai ouvert l’enveloppe qu’un thiak thiak, contre toute attente, est venu me livrer. REFUS DE VISA. A qui ? A moi qui ai enseigné le français toute ma carrière durant, moi le francophone et francophile tout fier de pondre des poèmes, des pièces de théâtre et des romans écrits dans la langue de vaste partage de Victor Hugo, de Jean Racine, de Balzac et de Sartre !
Mais qui suis-je pour vous ? Je fais des efforts pour l’oublier. Mais elle est têtue, la bêtise qui fait croire que l’Occident est le nombril du monde et que l’Afrique végète toujours aux périphéries de l’Histoire et du monde civilisé et libre.
Non. Je ne contesterai pas la décision auprès du sous-directeur des visas. Je viendrai en France lorsque les circonstances l’exigeront. Sur invitation de Colères du Présent, j’ai observé les Nouvelles Résidences du Nord Pas-de-Calais, après la flambée des banlieues françaises, en 2005. Mais n’est-ce pas un devoir, mieux qu’un droit, pour un père de famille sénégalais d’aller rendre visite à son enfant vivant dans le pays que bon nombre d’Africains de l’Ouest ne considèrent pas comme un pays étranger, mais comme le pays de leurs Ancêtres les Gaulois ? Si ma demande était accordée, je n’irais pas à l’hôtel, mais je séjournerais chez ma fille et son mari durant les courtes semaines que j’avais convenu de passer avec ma petite famille sénégalo-française pour m’assurer qu’elle est convenablement installée et que mes petits-enfants pouvaient grandir en gardant à l’esprit que leurs racines sont là où l’on mange autour d’un bol commun, où l’on se salue quand on se croise dans la rue. Aucune envie pour moi de vivre le restant de mes vieux jours loin du beau pays qui accueille les Français de France sans visa.
Non, Madame le Consul général, je ne conteste pas la décision infondée. Je voudrais tout juste, au nom de toutes celles et tous ceux qui protestent légitimement, signaler la gravité de la situation à revoir de façon urgente, compte tenu du haut degré de frustration qu’elle suscite de la part de demandeurs de visas qui s’estiment floués et ayant affaire à des escogriffes qui ne se cachent point.
Avant d’entrer dans le détail de ce que d’aucuns considèrent comme de l’escroquerie abjecte et délibérée, j’ai remarqué que durant tout le processus de demande, le demandeur ne rencontre pas une seule fois un agent français de couleur blanche. Tout se passe comme si la malsaine machination était perpétrée par des Noirs contre des Noirs.
Malsaine machination, ai-je bien dit, parce que l’ayant vécue.
Pouvez-vous affirmer que vous ignorez que pour obtenir un rendez-vous à Vfs Global, l’intéressé casque entre 50 000 et 300 000 F Cfa ?
Les frais de visa sont estimés à 52 000 F Cfa. Les deux agents africains débarqués chez moi, sans que j’en aie exprimé le vœu, m’ont soutiré 39 300 F Cfa pour des frais de collecte à domicile, en plus des frais de service évalués à 15 000 F Cfa. Qui leur a demandé de se déplacer pour obtenir des renseignements que je pouvais donner sur place, au moment d’aller faire la biométrie ?
Au total, j’ai versé à Vfs Global 106 300 F Cfa qui ne me seront pas remboursés, même partiellement.
Est-ce juste d’empocher l’argent du beurre sans céder le beurre ? Même si les autorités locales, qui devraient protéger leurs ressortissants contre l’arnaque abusive doublée d’une sorte de mépris choquant, ferment les yeux et n’osent pas crier haro sur les forfaitures flagrantes que je dénonce, c’est à vous, en diplomate visionnaire, de comprendre que certains comportements exacerbent l’hostilité contre la France qui n’est plus l’ancienne métropole colonisatrice, mais un pays partenaire qui doit mieux soigner ses relations non avec des gouvernements, mais avec des populations qui contribuent non seulement à la santé économique de la France, mais aussi au rayonnement de sa langue.
En espérant que vous saurez lire entre les lignes de ma lettre que je n’ai pas voulu rendre franchement polémique, je vous prie, Madame le Consul général, de croire à l’expression de ma parfaite considération.
Marouba FALL
Professeur de Lettres modernes à la retraite
Ecrivain
marouba_fall@yahoo.fr