Pouvoir, opposition, Sénégalais anonymes ont assisté hier à la levée du corps de Amath Dansokho à la morgue de l’hôpital Principal. Le président d’honneur du Pit repose désormais à Saint-Louis.

A la levée du corps hier, la morgue de l’hôpital Principal a refusé du monde. Parents, amis, anciens camarades de parti ou de lutte, des anonymes, tous étaient là pour saluer la mémoire du disparu. Natif de Kédougou, Amath Dansokho fut maire de la ville. Après sa mort, beaucoup se sont posé des questions sur le choix de son lieu d’enterrement. Mais son fils a assuré que le défunt avait demandé à y reposer depuis bien longtemps, aux côtés de son «ami exceptionnel», le regretté Almamy Maty Fall. «Ce choix est très naturel pour ceux qui ont connu notre père de près et suscite parfois des interrogations chez d’autres. En effet, Amath Dansokho expliquait cela en disant que Saint-Louis a été le berceau de son engagement dans la politique et le lieu où il a vécu ses plus grandes amitiés naissantes», a témoigné Alcaly Dansokho.
Avant que le cortège ne s’ébranle pour la vieille ville, la Nation lui a rendu un hommage à la dimension de l’homme. Couvert du drapeau national, le cercueil tenu par 6 officiers avançait à un rythme mesuré, sous le son de la musique des Forces armées. Les autres soldats, arme en bandoulière, restaient concentrés. Tout le public est debout pour saluer l’arrivée de la dépouille.

Samba Sy : «Il est mort au service de son Peuple»
«Ça tire en longueur. Les gens vont s’effondrer. Les gens ne sont pas en bonne santé», rouspétait un homme derrière les journalistes. L’attente fut longue. La fatigue se faisait sentir au niveau des jambes. Et le soleil tapait sur les retardataires qui n’avaient pas de place à l’ombre. Dans les discours, les témoignages ont été unanimes sur l’homme. Selon Samba Sy, secrétaire général du Parti de l’indépendance et du travail (Pit), par ailleurs ministre du Travail, du dialogue social, des organisations professionnelles et des relations avec les institutions, il aimait dire «tant qu’il me restera un souffle de vie, je me mettrai au service de mon Peuple. Amath a tenu parole. Il a été inlassablement, continuellement avec opiniâtreté au service de son Peuple». Au nom de la famille, Dr Alseyni Dansokho, frère du défunt, après avoir remercié tout le monde, a rappelé que «la vision de celui que nous pleurons est fondée sur le sentiment que notre destin est lié à celui de tous. Amath a travaillé toute sa vie pour rendre l’humanité meilleure. Il a accompli sa mission. Il était un homme juste et bon. Il détestait la haine. Il savait que seule la fraternité peut rendre les hommes heureux. Au-delà des chapelles politiques, poursuivons son œuvre pour éviter à notre pays des soubresauts aux conséquences incalculables».

Bathily : «La meilleure façon de lui rendre hommage pour les jeunes, c’est de poursuivre ce combat»
Venu représenter le président de la République Macky Sall, qui se trouve actuellement en France pour le G7, Moustapha Niasse, président de l’Assemblée nationale, retiendra de Amath Dansokho un homme «loyal au vrai sens du terme, compétent, un visionnaire». Et pour le Professeur Abdoulaye Bathily, «Amath Dansokho est le symbole de toute une génération. Une génération de combat, de lutte pour la démocratie, le progrès social, la libération nationale et sociale au Sénégal et en Afrique. Il a été de tous les combats ici au Sénégal pour la décolonisation et pour les alternances». Et de renchérir : «Maintenant, il appartient aux jeunes générations de poursuivre ce combat qui n’est pas achevé, qui ne peut pas être achevé parce que la lutte pour la démocratie est un combat permanent. On voit aujourd’hui dans le monde entier comment les conquêtes démocratiques sont confisquées, y compris en Afrique et partout. Et ce combat-là est encore plus que jamais actuel. Donc la meilleure façon de lui rendre hommage pour les jeunes, c’est de poursuivre ce combat.»
L’ambulance du Groupement national des sapeurs-pompiers qui a transporté le corps sur Saint-Louis a laissé derrière elle certains, abattus par la perte de Dansokho, mais aussi par le vol de leurs portables par des pickpockets.