Lors de son interrogatoire à la barre de la Chambre criminelle, l’ex-masseuse Adji Sarr s’est livrée à des déballages contre son bourreau présumé. Elle avait accusé le leader de l’ex-parti Pastef de l’avoir violée à plusieurs reprises et de l’avoir menacée de mort. Elle déclare aussi que le chef des «Patriotes» lui remettait de l’argent pour acheter la pilule du lendemain, après chaque rapport intime. Alors que son ex-patronne, Ndèye Khady Ndiaye, avait nié avoir déclaré qu’elle confiait Ousmane Sonko, lors des passages de ce dernier à l’institut de beauté, à Adji Sarr pour le massage.

A la barre le 23 mai dernier, l’ex-masseuse Adji Sarr a assuré que le «Patriote» en chef l’avait violée à plusieurs reprises et menacée de mort. Au sujet du «premier viol», Adji Sarr soutient que Ousmane Sonko avait «mis un jean». Avant de poursuivre : «Par la suite, il l’a enlevé. J’étais choquée, mais il m’a demandé de rester tranquille parce qu’il est l’homme le plus suivi. Il m’a demandé de me rapprocher, c’est ainsi qu’il a mis sa main entre mes jambes.» Ainsi, fera comprendre l’ex-masseuse au Tribunal, «il m’a dit : «Je vais coucher avec toi et si tu racontes cela, personne ne te croira.»».

Adji Sarr ajoutera avoir été forcée par Sonko à se «coucher par terre». «Je me suis exécutée et il a mis sa main dans mon sexe», relatait encore la demoiselle. Qui souligne que «la seconde fois, c’était le 21 décembre 2020». «Ce jour-là, il m’a même prise par derrière», révélait Mlle Sarr. Qui continue pour dire : «La troisième fois, c’était le 31 décembre. Il m’a dit : «Tu sais aujourd’hui, c’est un jour de fête, mais je ne peux pas me retenir.».» «Il se faisait sucer jusqu’à éjaculer. Il me remettait 10 mille francs pour acheter la pilule du lendemain, à chaque rapport», révèle la jeune fille devant la barre.

Devant le juge, l’ancienne patronne du salon Sweet Beauté, Ndèye Khady Ndiaye, lâchée par ses avocats qui ont boycotté l’audience, a nié avoir soutenu que Ousmane Sonko choisissait, lors de ses passages, Adji Sarr. Elle a aussi admis que le «Patriote» en chef se rendait à son établissement depuis longtemps.

Ndèye Khady Ndiaye lâchée par ses avocats
Pour Adji Sarr, le récit des viols n’a pas convaincu le juge. La Chambre criminelle a condamné Ousmane Sonko à deux ans de prison pour corruption de la jeunesse. Il est acquitté du délit de viol et menace de mort. Ousmane Sonko devait payer 20 millions F Cfa de dommages et intérêts à la partie civile, ainsi qu’une amende de 600 000 francs Cfa. Et Ndèye Khady Ndiaye, elle, à 2 ans pour incitation à la débauche et a été acquittée de complicité de viol.
Adji Sarr, qui a interjeté appel, réclamait, à l’audience, un milliard 500 millions F Cfa à titre de dommages et intérêts. Alors que le ministère public avait requis 10 ans de réclusion criminelle pour le délit de viol. Le Parquet avait suggéré à la Chambre une requalification des faits en délit de corruption de la jeunesse. Il demandait une condamnation de 5 ans de prison ferme.
L’affaire a été jugée en audience spéciale, le 23 mai dernier. Le procès a duré près de 18 heures. Près de 7 témoins ont été interrogés lors de cette audience. Entre autres, Sidi Ameth Mbaye, le docteur Alfousseyni Gaye, le gynécologue et obstétricien ayant consulté la plaignante à la suite du viol présumé.

Les détails de l’arrêt de la Chambre criminelle

Le 1er juin dernier, la Chambre criminelle de Dakar avait rendu son verdict dans l’affaire Adji Sarr-Ousmane Sonko, qui a tenu en haleine le pays pendant plus de deux ans. Si le juge a disqualifié les accusations de viols et menaces de mort contre Ousmane Sonko, il l’a condamné à deux ans de prison ferme pour corruption de la jeunesse. Ndèye Khady Ndiaye a aussi été acquittée du chef de complicité de viol et de diffusion d’images contraires aux bonnes mœurs, mais a été reconnue coupable d’incitation à la débauche et a été condamnée aussi à 2 ans de prison ferme.

Dans le même sillage, le juge avait ordonné la fermeture de Sweet Beauté. Pour la Chambre criminelle, il ne souffre d’aucun doute que Ousmane Sonko et Ndèye Khady Ndiaye ont profité de la jeunesse et de l’inexpérience de Mme Adji Sarr, l’ont exposée à la perversion, qu’ils ont ainsi gravement porté atteinte à son intégrité morale, psychologique et sexuelle. Ce qui lui cause, dit le juge, des préjudices qu’il convient de réparer. Estimant que le montant demandé par la victime est «exagéré» (1, 5 milliard) au vu des intérêts en présence, la Chambre criminelle lui a alloué la somme «juste et fondée» de 20 millions francs Cfa pour dommages et intérêts que vont payer les accusés solidairement.

Le juge avait ordonné l’exécution provisoire, fixé la durée de la contrainte par corps au maximum et mis les dépens à la charge des condamnés. Il faut savoir que Mmes Ndèye Khady Ndiaye et Adji Sarr ont interjeté appel. Ce qui annonce un nouveau procès pour Ousmane Sonko, condamné par contumace.