Yérim Seck ! Tu connais très mal le conflit de Casamance. On ne peut pas venir à bout de cette rébellion par des armes. On peut certes gagner des parties, mais pas la gagner définitivement par des armes. Tu te trompes lourdement.
En tant que journaliste, je me suis rendu 4 fois dans le maquis casamançais pour des reportages, enquêtes, interviews et recouper des informations. Mes lecteurs du journal sénégalais Le Quotidien, les acteurs de cette guerre, les ambassades étrangères au Sénégal, en Gambie et en Guinée Bissau et la Commission européenne des droits de l’Hom­me ne peuvent pas me démentir. Je sais de quoi je te parle.
Yérim, tu ignores que la théorie est totalement différente de la pratique. Tu ne connais pas le terrain. Ton crime, c’est ton ignorance de la réalité du terrain des opérations militaires.

«La terreur en Casamance»
L’ex-Président Abdou Diouf, qui était pourtant entouré par des experts de guerre pendant plus de 20 ans, avait tenté d’éradiquer la rébellion par les armes. Il a même impliqué des militaires de diverses nationalités. A-t-il réussi ? Le résultat : il a semé ce qu’Amnesty international appelle «La terreur en Casa­mance». A la fin, il a été obligé d’aller négocier avec la rébellion casamancaise.
Je t’informe qu’aucun soldat ou gendarme sénégalais ne veut aller combattre en Casamance à cause de la réalité du terrain. Ils le font par contrainte. Ces militaires, gendarmes et services de renseignements généraux qui sont sur le terrain ne sont pas contents de toi, qui te disant journaliste, parle des choses que tu ne maîtrises pas. Tu le sais bien.

«Défendre les frontières en versant le sang en Casamance»
Toi qui te permets de conseiller l’Etat sénégalais d’aller «défendre ses frontières en Casamance» en «versant du sang et marcher sur des cadavres» au prix de la vie des forces armées, des populations civiles de Casamance et des «rebelles», vas-y toi-même «défendre les frontières sénégalaises» et «verser le sang» des enfants d’autrui.
Tu n’as jamais fait ou vécu une guerre. Tu n’a jamais couvert une guerre. Tu n’ignores pas les conséquences causées par cette guerre qui a duré quatre décennies et qui a fait des milliers de réfugiés en Casamance, à l’intérieur du Sénégal, en Guinée Bissau, Gambie, en Europe et en Amérique.

Macky Sall sur les pas de Abdou Diouf
Macky Sall est en train de suivre les pas de Abdou Diouf. Tant que Macky Sall ne négociera pas sérieusement avec les indépendantistes, il n’y aura jamais la paix en Casamance et dans la sous-région. Et sans une paix réelle en Casamance, le Sénégal ne sera jamais développé. Aucun bailleur de fonds n’ose investir dans un pays politiquement ins­table. Tu dois le savoir, cher confrère.
Le gouvernement sénégalais sait très bien que les pauvres villageois arrêtés et emprisonnés ne sont pas les auteurs du massacre du 6 janvier 2018. Les bourreaux des victimes sont toujours libres. Ils courent toujours. Tout le monde le sait bien. Macky Sall ne devrait pas profiter de ce triste événement pour semer encore le chaos et la désolation en Casamance. La Casa­mance a tant souffert.

Une commission d’enquête indépendante
Si le Sénégal veut réellement savoir toute la vérité sur cette tuerie du 6 janvier 2018, il n’a qu’à créer une commission indépendante pour mener une en­quête sérieuse. A mon sens, cette enquête qui ne privilégie dès le départ qu’une seule piste, le Mouvement des forces démocratiques de Casamance, a mal commencé. Elle est mal orientée. Je sais que sous la torture de la gendarmerie, les suspects accepteront de porter le chapeau.
C’est la première fois dans l’histoire du Sénégal que l’Armée se donne une mission pour aller chercher des «criminels».
L’installation du quartier géné­ral de la gendarmerie scientifique à Néma de Ziguinchor et l’intervention de l’Armée en cours en Casamance ont été préparées plusieurs semaines avant la tuerie de ces pauvres casamançais innocents de cette guerre.
Arrêtez cette farce !
Erick Salemon BASSÈNE
Journaliste et blogueur
République fédérale d’Allemagne
ericksalemon@gmail.com