Moody’s utilise une classification de notation qui fonctionne comme un séquenceur décremental par échelon/niveau /étage/cran (notch) (du haut vers le bas) qui va de :

Aaa (1er Echelon = 20/20 donc sans risque) avec un risque de crédit presque inexistant, donc le plus sûr, à :
C (21e Echelon = 00/20) avec un risque de crédit maximal entraînant un défaut de paiement).

La notation souveraine donne une idée sur le niveau de solvabilité d’un pays.
Au Sénégal, de mars 2011 au 13 avril 2017, Moody’s avait déjà procédé au rehaussement d’un cran de la note souveraine qui progressait alors de B1 (7/20), à Ba3 ((8/20) avec «une perspective stable».

Le 4 octobre 2024, Moody’s Rating alertait avec une dégradation de la note souveraine qui quittait ainsi la «qualité spéculative Ba3 (8/20)» pour redescendre d’un palier et retrouver sa position de 2011, c’est-à-dire une «qualité très spéculative B1 (7/20)» avec un «profil sous surveillance signifiant une perspective négative, pessimiste susceptible de subir une nouvelle dégradation intempestive à court et moyen termes». Cette note est assurément un indicateur précieux de la perception que les marchés financiers se font du gouvernement qui a vocation de se conformer avec un délai au cadre budgétaire communautaire de l’Uemoa et de consolider progressivement ses finances publiques à moyen terme.

Le 21 février 2025, à la suite de la publication du rapport de la Cour des comptes de février 2025, Moody’s décroche le Sénégal au dernier cran de sa catégorie : «qualité très spéculative» assortie en sus d’une perspective négative, donc très proche de la ligne de crête qui tangente la catégorie suivante : «qualité Caa1_Risque de défaut élevé».

Un signal très alarmiste au gouvernement sénégalais, avec à l’appui un abaissement de deux (2) échelons de sa note souveraine. Elle passe ainsi directement de B1 (7/20) à B3 qui est la «pire place de la qualité très spéculative» (équivalent à 5/20).

Nb : Pour affiner la notation souveraine en dehors des catégories Aaa (20/20), Ca (1/20), et C (0/20), toutes les autres classes sont affublées de modificateurs numériques appelés «crans» : (1, 2, 3 avec 1 meilleur que 2 et 2 meilleur que 3). En conséquence, un réel sursaut national est indispensable avec de fortes réformes courageuses et ambitieuses d’ampleur, à mettre en œuvre sans délai, notamment en matière d’emploi et/ou d’attractivité économique avec des résultats probants pour espérer redresser les marges de viabilité qui sont sous forte menace dans un horizon réaliste.

Entre 2019 et 2024, la dégradation des comptes publics au Sénégal semble être hors de contrôle avec, d’une part, une spirale frénétique d’endettement public débridé qui certes a enjambé tous les régimes depuis 1960 avec un ratio de 99, 67% du Pib absorbé, mais à payer de manière discriminatoire, contrainte et forcée, et d’autre part, les charges gargantuesques du service de la dette, absorbant ainsi les capacités de financement du pays.

Toutefois, le poids de la note attribuée est plus indicatif que directif. Hormis les aspects d’analyse fine des ratios macroéconomiques pour déterminer la viabilité de la dette (solvabilité, soutenabilité, liquidité), il est impératif de savoir que, sur les marchés financiers, tout est question d’image et de perception. En effet, le profil de la notation financière s’adresse tout d’abord aux politiques qui arbitrent (en prenant des décisions fortes de correction afin d’éviter de pareils scenarii dans le futur, en réduisant drastiquement le déficit budgétaire, en rationnalisant les dépenses de l’Etat), ensuite aux très rationnels et très connectés marchés financiers (les investisseurs) qui accordent en dernier ressort, la totale légitimité de la décision finale.
Dr El Hadji Malick POUYE