Musicien, poète, romancier, Wilfried N’Sondé s’est imposé en l’espace de cinq romans comme l’une des voix importantes de la littérature africaine de langue française. Alors que les premiers romans de ce fils d’immigré congolais voguaient entre les thématiques de la «migritude» et la négritude avec pour cadre la banlieue parisienne, le cinquième livre qu’il vient de publier est un roman historique situé au début du 17e siècle et dont l’action se déroule sur trois continents. Il raconte l’esclavage, les dévastations causées par l’inquisition, mais aussi les rivalités politiques entre les grandes puissances de l’époque.
C’est en 2007 que Wilfried N’Sondé, fils d’immigrés congolais qui a grandi dans la banlieue parisienne, s’est fait connaître en publiant son premier roman très autobiographique, Le cœur des enfants léopards. Le roman frappait par le souffle rageur de son écriture puissante dédiée à la souffrance de la jeunesse déracinée des banlieues, au destin voué souvent à l’impasse.
Lauréat de nombreux prix dont le prestigieux prix des Cinq continents de la Francophonie et le prix Senghor de la création littéraire, ce premier livre très réussi a établi la réputation de Wilfried N’Sondé comme un styliste hors pair, à l’écriture poétique. Les trois romans qui ont suivi (Le silence des esprits, Fleur de béton et Berlinoise), aux thématiques proches du premier, tout comme le nouvel opus du Congolais à l’inspiration historique, ne dérogent pas à la règle.

Nsaku Ne Vunda
Un océan, deux mers, trois continents qui vient de paraître en janvier est un grand récit historique qui, à travers la vie et les aventures du premier ambassadeur du royaume du Kongo (l’actuel Angola) au début du 17e siècle, met en scène la tragédie de la traite négrière, mais aussi les rapports de force entre les principales puissances occidentales de l’époque.
Raconté à la première personne, ce nouveau roman s’empare de la mémoire du vieux Peuple bakongo de l’Afrique centrale dont l’auteur est issu. Il a choisi de donner corps et chair à cette mémoire à travers la vie d’un ancêtre exceptionnel qui avait fait brièvement irruption dans l’histoire occidentale pré-moderne et dont on peut encore admirer le buste de marbre à Rome.
Nsaku Ne Vunda a vécu à la jonction du 16e et du 17e siècle et fut dépêché par son roi Alvaro II au Vatican pour dénoncer la «prédation généralisée» dont son pays était victime à cause de la pratique de la traite négrière. Sa mission consistait à rappeler au pape le caractère antichrétien de l’esclavage, de témoigner auprès de lui de l’horreur de la traite et des terribles drames et désordres qu’elle suscitait en Afrique. Il devait plaider auprès du souverain pontife la cause des esclaves noirs devenus les enjeux tragiques du commerce triangulaire qui avait pour but d’alimenter en main-d’œuvre le Nouveau Monde. Pour mener à bien sa mission, l’homme traverse à ses risques et périls des océans, des mers et des continents (d’où le titre du livre), avant d’arriver à Rome où il rencontre brièvement le Saint-Père. (…)
Rfi