Livraison des bâtiments : L’Uidt attend les chantiers de Thiès

Dans l’enseignement supérieur, il y a l’épineux problème des infrastructures qui enrage les étudiants et le personnel enseignant qui réclament leurs livraisons. Depuis 10 ans, le débat se poursuit, mais la réalité est la même dans toutes les universités publiques. C’est la même situation aussi bien dans les nouvelles universités que les anciennes qui fonctionnent dans des conditions exécrables, avec des années universitaires qui se chevauchent comme si de rien n’était. Une anormalité devenue la règle.
L’inauguration, quelques mois avant la fin de son mandat, par le Président Macky Sall, du campus pédagogique de l’Université Iba Der Thiam (Uidt) de Thiès, une institution créée en 2007, éclatée, avec plusieurs bâtiments en location éparpillés à travers les quatre coins de la ville, et qui, à travers ce projet, devait se reconstituer au grand bonheur de la communauté universitaire, avait fait renaitre l’espoir dans le domaine de l’enseignement supérieur. Le projet d’extension, estimé à plus de 7 milliards F Cfa, devant apporter un plus à l’Université des sciences et techniques, et élargir la carte universitaire du Sénégal, est pour l’essentiel terminé, mais certains chantiers sont en cours pour améliorer le campus. Cette situation impacte la vie sociale des étudiants et les conditions d’enseignement.Par Cheikh CAMARA –
Face au déficit en infrastructures qui affecte beaucoup le bon fonctionnement de l’institution universitaire qui dépense une forte somme dans la location de maisons pour abriter les différents services du Rectorat, des établissements et des logements d’étudiants, l’Université Iba Der Thiam (Uidt) de Thiès restera confrontée à d’énormes difficultés pour dispenser des enseignements de qualité à ses nombreux pensionnaires. Et que de manifestations pour amener les autorités à s’intéresser davantage aux chantiers du temple du savoir. Depuis 2015, les chantiers de l’université sont là. Les travaux étaient budgétisés. L’Etat devait prendre en charge 3 milliards de F Cfa et les autres 3 milliards, la Banque mondiale. Mais voilà que rien n’avance. Les chantiers ne bougent pas, à l’image de ceux des autres universités.
Ailleurs, les gens parlent d’extension des périmètres universitaires. Une situation d’autant plus préoccupante que le nombre d’étudiants ne cesse d’augmenter et les conditions sociales de plus en plus difficiles, selon le personnel administratif, technique et les étudiants. «Le nombre d’étudiants augmente d’année en année. Les effectifs sont pléthoriques dans les chambres. Il est anormal que les chantiers traînent. La situation est restée telle quelle du fait que les autorités semblent faire la sourde oreille», déplorent les étudiants. Qui trouvent «anormal» que des étudiants orientés «ne puissent pas avoir de salles de classe».
Dès sa création par la loi n°2005-04 du 11 janvier 2005, l’université Iba Der Thiam de Thiès a été confrontée à des difficultés liées au déficit criard d’infrastructures, aussi bien pour la pédagogie que la gestion administrative, ce qui a entraîné une situation d’instabilité quasi permanente. C’est ainsi que l’Etat du Sénégal, constatant «les difficultés que traverse l’institution universitaire pour offrir des enseignements de qualité» et conscient de «la pertinence de l’offre de formation en adéquation avec les besoins du milieu socio-économique», de «l’apport et de l’impact économique et social de l’Université sur la communauté de Thiès en particulier et du Sénégal en général», que «l’Université de Thiès ne pouvait pas faire face aux nombreuses sollicitations malgré la multitude de maisons louées pour servir de locaux pédagogiques et administratifs», a décidé de lui affecter certaines infrastructures (Hôtel du Rail, Auberge des jeunes, Palais des congrès), pour l’accompagner dans sa montée en puissance.
Concernant le site de 52 hectares que l’Armée a mis à la disposition de l’Uidt au niveau de la Voie de contournement Nord (Vcn), l’Etat du Sénégal y a entrepris un projet d’extension afin d’y accueillir un certain nombre de services. Mais la communauté universitaire trouve que «même avec la livraison des infrastructures, avec 1560 places pédagogiques disponibles, l’Uidt, qui était à moins de 3000 étudiants au démarrage des chantiers dimensionnés en 2015, va être confrontée à d’énormes difficultés pour dispenser des enseignements de qualité».
Ce mardi 11 février 2025, de violents affrontements ont éclaté entre les étudiants de l’université Iba Der Thiam de Thiès et les Forces de défense et de sécurité, plongeant la ville-aux-deux-gares dans une atmosphère tendue. Au cours de ces affrontements, un étudiant a même perdu un œil. Ses camarades, en colère et déterminés à poursuivre leur combat, s’inquiètent de l’afflux d’étudiants qui exacerbe les problèmes à l’université Iba Der Thiam. «L’arrivée de 1494 nouveaux bacheliers à l’Uidt risque d’aggraver les défis liés à l’hébergement et à la restauration sur ce campus», notent ces étudiants, qui demandent aux autorités d’accélérer les travaux sur le campus pour éviter une crise. Ils ont récemment observé une grève pour interpeller le ministère de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation sur «le non-respect de ses engagements concernant les infrastructures du campus».
Ces étudiants expliquent que leur principale revendication concerne l’achèvement du nouveau restaurant universitaire et du service médical. «Ces infrastructures sont vitales pour répondre aux besoins croissants des étudiants, mais leur construction est toujours inachevée malgré des engagements répétés», s’indigne la Conférence des amicales d’étudiants de l’Université Iba Der Thiam (Uidt) de Thiès. Qui rappelle qu’en mai dernier, lors d’un séminaire à Saly, sur la Petite-Côte, le ministre de tutelle avait promis un «accompagnement accru» pour «stabiliser le calendrier académique et renforcer les infrastructures pédagogiques et sociales». Elle constate malheureusement que «ces engagements, réitérés en septembre, n’ont pas été respectés, ce qui impacte directement la qualité de vie des étudiants».
Les assurances du directeur du Crous-T
En tout cas, le directeur du Centre régional des œuvres universitaires de Thiès (Crous-T), Serigne Mbacké Lô, au cours d’une sortie, avait rassuré les étudiants, en reconnaissant les retards évoqués par la Conférence des amicales d’étudiants de l’Université Iba Der Thiam (Uidt) de Thiès concernant les travaux des infrastructures au niveau du campus. Il affirme avoir rencontré les étudiants pour discuter de leurs préoccupations et, selon lui, «les travaux des pavillons de 1000 lits et du restaurant de 1000 places sont à un niveau d’avancement de 90%, le reste étant principalement lié à l’installation des équipements, déjà en grande partie livrés». M. Mbacké Lô remarque que «ces retards ne concernent pas uniquement l’Uidt, mais toutes les universités du pays». Toutefois de rassurer que «sur toute l’étendue du territoire national, les chantiers de Thiès sont les plus avancés». Pour pallier les insuffisances immédiates, le Crous-T a investi ses propres fonds pour doubler la capacité d’accueil du restaurant universitaire. «Nous faisons de notre mieux pour améliorer la situation, mais la résolution complète dépend de l’Etat», confie M. Lô. Le président de la Conférence des amicales d’étudiants (Cae), Adama Sow Kébé, et ses proches collaborateurs, Cheikh Tidiane Seck et Mouhamadou Moustapha Al Amine Cissé, au nom des étudiants de l’Uidt, considèrent que «le retard dans la mise en service de ces infrastructures essentielles aggrave nos conditions de vie et d’études». Ils s’offusquent du fait que «malgré nos multiples tentatives de dialogue avec les autorités concernées, aucune mesure concrète n’a été prise pour résoudre ces problèmes». C’est ainsi qu’ils avaient décrété, ce mercredi 15 janvier 2025, 72 heures de cessation immédiate de toute activité pédagogique, ainsi que des journées sans ticket s’étalant sur la même période. «Notre objectif reste pacifique, mais nous ne pouvons plus tolérer l’indifférence et le mépris manifestés envers les préoccupations des étudiants», indique la conférence, qui se dit ouverte à «tout dialogue sincère», mais exige des «engagements fermes et des solutions immédiates». Ces étudiants ne cachent pas leur déception : «L’inaction et l’indifférence des autorités ne peuvent plus être tolérées. Nous interpellons donc le Mesri, le Recteur de l’Uidt, le directeur du Crous-T, ainsi que toutes les autorités compétentes.»