Dans son livre «Islam et politique au sahel : entre persuasion et violence», Dr. Rahmane Idrissa invite à éviter des conclusions hâtives sur l’existence de contradictions «naturelles» entre l’islam et la démocratie.

L’étude méticuleuse des trajectoires du radicalisme salafiste en lien avec l’évolution de la vie politique nationale dans cinq pays du Sahel a permis à M. Rahmane Idrissa de parvenir à des conclusions importantes sur leurs divergences et similarités. M. Idrissa, qui a étudié les trajectoires du radicalisme au Burkina Faso, au Niger, au Sénégal, au Mali et au Nigeria, note que malgré les nombreux points en commun qui existent entre ces pays, ces divergences indiquent en particuliers que les processus historiques, le comportement des dirigeants étatiques et les configurations sociologiques propres à chaque pays comptent et nous poussent aussi à éviter des conclusions hâtives sur l’existence de contradictions «naturelles» entre l’islam et la démocratie. M. Idrissa présentait son livre ce vendredi, en présence de M. Bado Ndoye, Professeur de philosophie à l’Ucad, et du Dr Hady Ba de la même université. Dans son ouvrage, l’universitaire nigérien parle de l’islam persuasif et de la politique violente dans les pays du Sahel. «Les idéologies ont besoin d’ennemi pour prospérer, pas la religion», explique-t-il. Le livre s’attelle ainsi à la tâche ardue de séparer l’islam des idéologies politiques qui, sur la base de ces théologies, s’efforcent de conquérir le pouvoir, de gouverner afin de changer la société. Bien que ces idéologies tirent leur légitimité à la source de la religion, l’auteur montre qu’il s’agit d’entreprises foncièrement temporelles définies par leur confrontation avec d’autres idéologies à l’intérieur de l’arène Etat-Nation. «Leurs objectifs sont similaires et visent à faire usage du pouvoir politique pour changer les sociétés, se servant à cet effet de diverses méthodes de persuasion, mais aussi passant parfois à la violence», souligne-t-il.
D’où viennent ces idéologies ? Et pourquoi mènent-elles parfois à la violence ? Ce sont là les questions qu’il pose dans l’œuvre. Les idéologies du radicalisme salafiste sont à l’œuvre dans ces pays précités, mais la violence a pour épicentre le nord du Mali et du Nigeria. Sur la base d’un cadre théorique qui analyse le développement des idéologies, et diverses méthodes d’analyse historique, théorique, l’écrivain retrace l’émergence du radicalisme salafiste dans chacun de ces pays. Il trouve par la suite son origine en une étincelle allumée par le choc entre des processus concurrents d’islamisation et de colonisation dans les années 1940. Cependant, lorsque l’étincelle a tourné à l’incendie au Mali et au Nigeria, elle n’a créé que des flambées mineures au Niger et au Burkina et n’a guère eu d’effet brûlant au Sénégal.

Stagiaire