Logements sociaux : Un guichet unique… fast track
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Le Sénégal enregistre déjà, en 2022, un déficit de logements estimé à 325 000 unités, avec une augmentation annuelle de 12 000 unités. Nous sommes, selon l’Ansd, 18 275 743 habitants (taux de croissance annuel de la population projeté à 2.6% en 2023). Ce sont les statistiques du Centre for affordable housing finance.
Notre croissance démographique, l’urbanisation rapide et incontrôlée, les fortes chaleurs dues aux changements climatiques à l’intérieur du pays, la littoralisation de notre économie s’ajoutent aux difficultés à mettre en œuvre des programmes de production de logements abordables et durables pour les moyens et petits revenus dans une économie encore accentuée par l’activité informelle, avec des revenus modestes et irréguliers pour beaucoup de nos compatriotes, situation qui rend presque impossible la solvabilité des 2/3 des Sénégalais éligibles aux logements sociaux.
Le Sénégal, selon les statistiques des Domaines, compte moins de 100 000 détenteurs de baux et titres emphytéotiques, en même temps nous pouvons compter plus d’1 300 0000 ménages sur le territoire -urbain et rural. Par extrapolation, nous pouvons affirmer que le déficit structurel cumulé en logements atteindra bientôt 500 000 unités, c’est-à-dire loin du projet ou programme des 100 000 logements. Ce programme ne peut même plus stabiliser sur le moyen terme l’offre et la demande en logements. Et malheureusement, depuis presque 15 ans, notre pays n’arrive plus à dépasser la production annuelle de 10 000 logements : ni les maîtres-d’œuvre publics : Sicap, Hlm et Cdc … ni les promoteurs privés n’arrivent à assurer 7000 remises de clés per annum. Depuis le Covid, les réalisations de logements clés en main concentrées sur Bambilor-Rufisque plafonnent autour des 3500 unités per annum pour tout le pays…
C’est le déclin partout… Et les acteurs majeurs du secteur sont découragés, même les constructeurs et promoteurs étrangers n’arrivent plus à travailler face notre Administration lente et nébuleuse, et notre système financier national peu fluide et trop peu capitalisé. L’Etat ne parvient même plus à accompagner dans les Vrd -entre autres-, malgré la mise en place de sociétés comme Safru et Dgpu, et les facilités fiscales, etc.
Le salut du logement social et sa relance effective passeront par une mutualisation de toutes les ressources publiques autour d’un programme présidentiel d’au moins 1 000 000 de logements sur le quinquennat, comme en Côte d’Ivoire et au Maroc, avec une fusion de la Sicap, de la Sn Hlm et des filiales immo de Cdc en un guichet unique public du logement social. La Bhs, comme instrument financier dédié, sera reconfigurée dans sa mission et verra ses capitaux propres augmenter substantiellement pour financer Vrd et constructions, puis garantir la caution pour l’acquisition de logements aux Sénégalais ayant des revenus modestes.
La Bhs est le cœur du système, il nous faut urgemment la repositionner dans la chaîne du logement et transférer les moyens et ressources de la Cdc vers la Bhs. C’est le bras financier de l’écosystème habitat social public.
La Cdc ne fait rien dans le logement social, d’ailleurs ses programmes -Sangalkam, etc.-, mal exécutés avec des entrepreneurs douteux, ont complètement dérégulé le secteur. Sa tour de Babel à 33 milliards aux Mamelles est le plus grand scandale de l’ex-régime, et son implication sur les terrains de l’aéroport a juste servi à alimenter la spéculation foncière dans la zone, au grand détriment des acquéreurs moyens. L’implication de la Cdc, du Fonsis et du Fongip dans la promotion du logement doit être évaluée, c’est un gâchis de ressources et un détournement de mission. La Cdc n’a qu’à se recentrer dans ses missions organiques autour de la consignation et du cautionnement. A quoi bon mettre en place un pôle immobilier à la Cdc pour y nommer des politiciens sans Cv avérés. L’un est le Dg et l’autre le Sg… Si la Cdc veut diversifier son intervention, elle n’a qu’à faire comme en France, en appuyant par des prises de participation dans nos Pme à fort potentiel de croissance. C’est ça qui peut aider le nouveau régime, aider à créer des emplois et la richesse.
L’avantage d’un guichet unique du logement est de permettre d’accélérer la chaîne de production du logement avec les synergies qui naîtront des fusions de la Sicap, de la Sn Hlm et autres en une seule et unique entité publique, aussi cela permettra de mutualiser leurs ressources pour lever des fonds conséquents dans le système financier hypothécaire en gestation en Afrique. Il y a 15 000 milliards de F Cfa de fonds dédiés à l’immobilier en Afrique que seuls les Marocains et Ivoiriens, entre autres, arrivent à capter. Le peu que notre pays arrive à mobiliser de ce fonds va vers l’immobilier de luxe à Dakar, avec les immeubles d’appartements haut de gamme.
Avec un guichet unique public, la Bhs, restructurée, relookée et dotée en capitaux propres additionnels par la Cdc, pourra financer plus adéquatement les réalisations massives que le secteur local du Btp peut faire, avec bien sûr les entreprises étrangères en appoint. Le Sénégal, au moment des indépendances, fut un modèle d’urbanisme maîtrisé avec la Sicap.
Il faut rapidement revoir la loi d’orientation 2016-31 sur l’habitat social et repenser notre politique domaniale, et sur ce dernier point, le président de la République et son Premier ministre ont donné des signaux forts et rassurants ce 1er mai à Mbour 4. Dans cette politique, le logement écologique ou le logement vert auront toute leur place par rapport à nos objectifs de climat et bas carbone.
Moustapha DIAKHATE
Ex Conseiller Spécial PM
Expert infrastructures et Pol. Energétique
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