La Confédération nationale des employeurs du Sénégal fonde beaucoup d’espoir sur les décrets d’application de la loi sur le contenu local. La Cnes, qui exprime des inquiétudes sur ce texte, souhaite voir les décrets d’application en cours effacer ces craintes.
La Confédération nationale des employeurs du Sénégal (Cnes) exprime son inquiétude quant aux modifications apportées sur la loi sur le contenu local. A en croire Mansour Cama, président de la Cnes, le projet initial faisait une différence nette entre l’entreprise locale et l’entreprise nationale. Dans sa première formulation, l’entreprise nationale était définie comme une entreprise détenue à 51% par des Sénégalais et dont la Direction générale est aussi assurée par des Sénégalais. Et «cela ne figure pas dans la loi», s’étonne M. Kama.
De son côté, le Cos petrogaz évoque l’Uemoa qui parle d’entreprise communautaire. Mais de l’avis du président Cama, «l’Uemoa ne doit pas nous empêcher de défendre notre pays et nos intérêts. Ce n’est pas l’Uemoa qui a le gaz et le pétrole mais le Sénégal», soutient-il.
Le Cos petrogaz assure que cette préoccupation sera prise en compte dans les décrets d’application en cours. Une promesse qui ne rassure pas totalement Mor Talla Kane, secrétaire exécutif de la Cnes, qui préconise la vigilance, car pour lui, «la force d’une loi n’est pas celle des décrets d’application».
Des échanges qui augurent d’un grand débat entre le secteur privé et les autorités en charge de l’élaboration des décrets d’application. Le secteur privé national, qui s’est réuni à cet effet pour réfléchir et préparer ces discussions, attend de la part de l’Etat une très grande fermeté sur cette question. Le patronat estime que l’Etat ne doit pas faire de ses ressources naturelles un bien communautaire et ainsi permettre aux intérêts extérieurs d’en profiter.
La Cnes visiblement très intéressée par le contenu local, rappelle à l’Etat les garanties qu’il doit apporter notamment sur les normes qui régissent le secteur des hydrocarbures. «Les gens de ce secteur brandissent des standards et les poussent à l’extrême non pas pour préserver des intérêts, mais pour exclure ceux qui n’en ont pas les moyens», relève le secrétaire exécutif de la Cnes. Le secteur privé se dit conscient du fait qu’il n’est pas pour le moment capable de tirer pleinement profit du contenu local. Pour autant, il ne voudrait pas que sous prétexte que tout est compliqué qu’il soit exclu. Pour M. Kane, la vigilance doit être de mise dans les institutions de veille et de contrôle pour passer au peigne fin ces standards et éviter ce qui s’est passé dans les autres pays pétroliers.
Sur l’absence d’études de prospectives dans le contenu local, Mor Talla Kane prévient l’autorité des bouleversements qui vont s’opérer dans toute la structure sociale du pays. Pour cette raison, estime-t-il, «l’Etat doit veiller à ce que le pétrole n’affecte pas les autres secteurs comme l’agriculture, le tourisme, la pêche, surtout dans les zones impactées. «Le Sénégal doit marcher sur plusieurs pieds et faire en sorte que les retombées pétrolières puissent être investies dans ces secteurs qui seront touchés en bien ou en mal par l’exploitation des ressources», estime-t-il.
Au-delà de ces préoccupations, le patronat attend que ces décrets en cours ouvrent la voie à des bourses d’opportunités. A en croire Mansour Cama, «s’il n’y a pas de bourses d’opportunités ou de recensement pour tous ces métiers et opportunités, la loi sur le contenu local ne servira à rien». Car, «nul n’ignore que les grands majors pétroliers n’attendent pas une loi pour agir. Ils ont déjà leurs sous-traitants dans leurs bagages», fait-il savoir.
Et le rôle du secteur privé dans tout cela. Pour Mor Talla Kane, le patronat doit identifier des niches et se donner les moyens pour y arriver à travers la mise à niveau, la recherche de compétence par la formation. M. Kane a aussi suggéré à ces collègues le regroupement. «C’est le moment opportun pour former des coalitions et des clubs d’investisseurs pour mettre en avant leur compétence», conclut-il.
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