Face à la persistance du trafic de migrants, les autorités judiciaires et responsables de l’appareil sécuritaires multiplient les mesures pour stopper ce phénomène, devenu un vrai business entretenu par des réseaux de criminels. Les acteurs intervenant dans ce domaine, à savoir les magistrats, la police, la gendarmerie et les enquêteurs, réfléchissent sur «le traitement judiciaire des infractions liées au trafic illicite des migrants».Par Amadou MBODJI
– Si le trafic de migrants ne cesse pas, la répression est toujours intense. «Des centaines de personnes impliquées dans le convoyage clandestin croupissent en prison», annonce le commissaire Mame Seydou Ndour, directeur de la police de l’air et des frontières et coordonnateur national du Programme opérationnel conjoint. Il intervenait hier, lors du séminaire sur «le traitement judiciaire des infractions liées au trafic illicite de migrants», organisé par le Centre de formation judiciaire en partenariat opérationnel conjoint (Poc). En dépit de la traque, le phénomène persiste à une vaste échelle. «A l’état actuel du nombre des recruteurs, passeurs, capitaines, organisateurs, on a eu à déférer 392 personnes», insiste le patron de la police de l’air. Selon lui, «la répression, au même titre que la prévention, est aussi importante. Elle est dissuasive». Et cela semble porter ses fruits. «On a vu que le nombre de départ, en ce qui concerne l’émigration clandestine par voie maritime, a baissé de manière extraordinaire. Et pour les arrivées pour toute l’année 2021, il y en a eu, venant du Sénégal, que 4», souligne-t-il.
Aujourd’hui, la Division nationale de lutte contre le trafic de migrants, qui a une «compétence nationale» et logée au sein de la police de l’air et des frontières, est en train de se déployer pour anéantir le phénomène. Notamment dans les zones minières, où le trafic de migrants est une fâcheuse réalité. «On aura une antenne de la division à Tambacounda, Kédougou. Nous allons décentraliser l’action pour mieux lutter. Parce que les gens qui font le voyage, ne sont pas tous de Dakar. Il est important que les zones frontalières soient bien maillées dans le cadre de la prévention», annonce l’ex-patron de l’Office central de répression contre le trafic des stupéfiants.
A l’image du trafic de drogue, ce «business», qui génère beaucoup d’argent, nourrit des réseaux criminels, prêts à tout pour contourner les lois. Les acteurs intervenant dans ce domaine, à savoir les magistrats, la police, la gendarmerie et les enquêteurs, participent, essaient de connaître «le traitement judiciaire des infractions liées au trafic illicite des migrants».
Dans le même sillage, Mme Aïssé Gassama Tall, Secrétaire générale du ministère de la Justice, salue le renforcement de la chaîne pénale des infractions liées au trafic de migrants. «Il faut qu’il y ait une répression ferme, sérieuse, pour venir à bout du phénomène», indique Mme Tall. Signataire de la Convention internationale sur la criminalité transnationale et de son protocole additionnel et de la loi du 10 mai 2005 relative à la traite des personnes et les trafics assimilés, le Sénégal s’est engagé dans la lutte contre cette pratique. «En novembre, le ministre de la Justice avait fait une circulaire pour demander à tous les magistrats du Parquet, d’engager des poursuites lorsqu’ils sont convaincus d’un cas de traitement de migrants et de faire en sorte que les magistrats du siège prennent des réquisitions fermes, pour que ces réseaux de criminels puissent prendre des peines de prison assez sévères, qui pourraient être dissuasives.»
ambodji@lequotidien.sn