Au lendemain du fameux discours du 3 juillet 2023, on peut affirmer, sans aucun risque de se tromper, que Macky Sall n’est plus face à l’Histoire, mais bien dans l’Histoire, par la grande porte. Monsieur le Président, je vous cite : «Mes chers compatriotes, ma décision longuement et mûrement réfléchie est de ne pas être candidat à la prochaine élection du 25 février 2023.» Quelle élégance ! Quelle grandeur ! Quel ouf de soulagement pour tout un Peuple ! Aujourd’hui, presque partout, aussi bien dans les villes que dans les campagnes, les Sénégalais se dressent comme un seul homme, toutes obédiences confondues -pouvoir, opposition et non-alignés- pour saluer à sa juste valeur cette décision tant attendue et on ne peut plus historique. C’est cela la marque des grands hommes, c’est cela la marque des hommes debout ! Macky Sall est un homme debout ! Mais qu’est-ce qu’un homme debout ? La grandeur d’un homme ne se mesure pas par rapport à son sectarisme, à son ego outrancier, mais bien à sa capacité d’ouverture et de dépassement. Assurément, le Président Sall en a donné l’illustration la plus parfaite, n’en déplaisent ses détracteurs.
L’unanimisme n’existe nulle part dans le monde. Par ailleurs, le rêve de l’homme, c’est connu, est d’être totalement maître de son existence. Il a raison car c’est sa supériorité sur l’animal de pouvoir se regarder, regarder le monde, juger et diriger sa vie suivant les normes de son idéal. C’est cela l’homme debout. Cette attitude se traduit naturellement par des propos concordés à des actes. Exemple : «Je ne brigue pas une troisième candidature.» Quelle grandeur ! Mais beaucoup d’hommes, qui se croient maîtres de leurs actions, sont en fait plus ou moins esclaves de leur corps et de leur sensibilité. Ils n’ont pas réussi à établir et maintenir solide la hiérarchie de leurs puissances. Ou bien ils ne sont pas lucides, ou bien ils ne comptent que sur leurs propres forces pour vivre «debout». De ce point de vue, incontestablement, le Président Macky Sall a magistralement indiqué la voie. L’homme debout, à la manière du Président, c’est celui dont l’esprit, entièrement libre, commande à la sensibilité et au corps. Il ne méprise ni l’un ni l’autre, car tous deux sont beaux et utiles, mais il les maîtrise et les dirige. C’est lui le chef, eux sont les serviteurs. L’homme debout, en ce monde particulièrement troublé par les conflits et difficultés économiques et sociales, c’est celui-là qui œuvre inlassablement pour la stabilité et la paix, sans lesquelles aucune prospérité n’est envisageable ! L’homme debout, c’est la paix. Oui, la paix ! Le Peuple aspire à la paix et à la tranquillité. La paix est une construction patiente du génie spirituel de l’homme. Rappelons-nous le mot de Jean Paul II devant l’Unesco : «La paix est l’une des réalisations les plus hautes de la culture et, pour cette raison, mérite toute notre énergie intellectuelle et spirituelle.» Qu’on se rappelle aussi la formule lapidaire de Populorum Progressio -1967- : «Le développement est le nouveau nom de la paix.» Oui, mais sans paix, point de développement. Assurément, c’est dans l’intériorisation de la paix que réside le véritable humanisme, la véritable civilisation. Les armes, les guerres, les violences, sous toutes leurs formes, sont à exclure des programmes de la civilisation. Dans la conjoncture politico-sociale actuelle de notre pays, pleine de dangers, il y a peu, et nettement apaisée, depuis le discours historique du président de la République, construire la paix apparaît comme une réalisation hautement citoyenne. La paix est essentiellement l’œuvre de la conscience éclairée des hommes, pouvoirs, opposition radicale et non-alignés, tous bords confondus. Et sans la paix, toute forme de culture ne saurait survivre. C’est seulement par l’humanisation de notre société que pourra s’instaurer une véritable culture de la paix. Soyons des bâtisseurs et non des casseurs ! Aussi faut-il que nos gouvernants, nos élus mesurent pleinement leurs responsabilités à quelque poste qu’ils se trouvent. Roger Garaudy dans «Parole d’homme», page 215, nous dit : «Lorsque je vote pour un député ou pour un président de la République, sur la base territoriale, je lui délégue et lui aliène en bloc mes responsabilités pour plusieurs années.» Dès lors, on entre de plain-pied dans la politique ! En effet, le mot politique est l’un des plus polysémiques qui soit. D’ailleurs, il «fonctionne» rarement seul dans les conversations courantes. Il a besoin d’adjectifs «politicienne», «partisane», «publique», «locale», «médiatique», etc., pour que l’on comprenne sa signification exacte. Toutefois, dans le cadre de cet article, il s’agit plus de politique «partisane» sinon «publique» que toute autre. De ce fait, la notion d’intérêt pour la politique, on le voit bien, dépend intégralement des connotations du mot «politique» et, peut-être surtout, du mot «intérêt» pour l’interlocuteur. Pointé ainsi sur le registre de la politique publique, personne ne peut nier les belles réalisations du président de la République debout dans pas mal de domaines qui, sans conteste, ont changé le visage du Senegal. Loin de moi l’idée de lui faire un bilan, l’intéressé le fera, à coup sûr, le moment opportun. D’ailleurs, je n’en suis pas capable. Néanmoins, je pense pouvoir risquer quelques imprudences en tentant de dégager les grands axes de réalisations concrètes du Président. Dans les domaines que voici : infrastructures de transport et de mobilité, pôle de développement, politique d’équité territoriale et sociale, éducation et formation, secteur auquel j’appartiens ; modernisation des techniques de communication, infrastructures sportives et j’en passe, incontestablement l’homme debout a fait des pas de géant. Toutefois, Monsieur le Président, il y a lieu de croire que votre successeur -homme ou femme- aura du pain sur la planche, mais pour des hommes de bonne volonté, il n’y a pas de défis insurmontables. Rien n’est facile, mais tout est possible. Oui, l’agriculture est un défi majeur, malgré les efforts qui y sont faits ainsi que les moyens, les résultats sont encore mitigés. Il en est de même pour l’emploi des jeunes. C’est une bombe à retardement, une imagination fertile est plus que jamais nécessaire ici ! Monsieur le Président, l’homme debout, j’avoue que je ne suis ni de votre parti ni de votre coalition, certes vous avez beaucoup fait, mais les braises sont encore sous la cendre, et là je pense à la politique «partisane». Les propos incendiaires du genre : «sans ma candidature, le pays connaîtra un chaos indescriptible» venant d’une opposition radicale doivent être sérieusement pris en compte. Le premier juin 2023 aura été plus chaud que mars 2021. Pourtant, on nous avait promis que les «choses» ne se passeraient plus comme ça ! Monsieur le Président, à propos de la politique de l’affrontement, j’emprunte ma conclusion à Matthew Arnold : «… le monde qui semble s’étendre devant nous comme un pays de rêve, n’a jamais connu ni joie, ni amour, ni lumière. Ni certitude, ni paix, ni réconfort dans la peine ; et nous voici dans la plaine que l’ombre envahit en proie aux confuses alarmes du combat et de la fuite…»
Quelle profondeur !
Quelle sagacité !
Pensons-y.
Yakhya DIOUR
Inspecteur de l’enseignement élémentaire à la retraite