Maïmouna Ndour Faye et Babacar Fall sont libres. Mais la mobilisation des organisations de la presse reste intacte. Hier, devant les locaux de la 7Tv, le nouveau cadre mis en place, le Front de défense de la liberté de presse (Fdlp), a encore une fois appelé à plus de sérénité dans les relations entre l’Exécutif et la presse. Par Mame Woury THIOUBOU – 

«Aujourd’hui, c’est un moment fort parce que nous avons pu vaincre les atteintes à la liberté de la presse.» C’est par ces mots triomphants que le président du Conseil des diffuseurs et éditeurs de la presse s’est adressé aux journalistes et techniciens des médias présents hier après-midi au sit-in appelé par le nouveau cadre mis en place par les organisations de presse, le Front pour la défense de la liberté de presse (Fdlp). Devant les confrères, Mamadou Ibra Kane a salué la libération de Babacar Fall, mercredi après-midi, et celle de Maïmouna Ndour Faye, ce jeudi matin. Arrêtés pour avoir réalisé une interview de Madiambal Diagne, les deux journalistes ont bénéficié de l’appui et de la solidarité de toute la corporation, ainsi que d’acteurs de la Société civile et politiques. «Déjà hier (Ndlr : mercredi), notre confrère Babacar Fall, qui avait été arrêté, menotté, a été libéré. Aujourd’hui (jeudi), c’est au tour de notre consœur Maïmouna Ndour Faya d’être libérée. Et sans pour autant que nos deux confrères n’aient été incriminés par la Justice. Donc c’est ça qui prouve encore une fois que leur arrestation était un acte politique pour museler la presse, parce qu’aucune loi au Sénégal n’interdit de donner la parole à quelqu’un qui est poursuivi par la Justice», souligne M. Kane, qui estime que la mobilisation de tous a permis de faire «reculer» le pouvoir. «Aujourd’hui, nous avons fait reculer le pouvoir, nous avons fait reculer l’illégalité, et il faut que nous poursuivions ce combat-là pour qu’enfin dans ce pays, chaque alternance qui survienne ne se retourne pas contre les médias.»

Selon Mamadou Ibra Kane, les journalistes arrêtés n’ont violé aucune loi. «Nous n’avons fait que notre travail, donner la parole à quelqu’un dont les sénégalais voulaient écouter la version, comme nous l’avions fait à l’époque, en 2023, quand l’actuel Premier ministre était dans l’opposition et qu’il s’était enfui de Dakar pour aller se réfugier à Ziguinchor. Un de nos confrères, Pierre-Edouard Faye, l’a interviewé. Ce n’est pas parce que Pierre-Edouard Faye était d’accord avec les thèses défendues par le fugitif Ousmane Sonko. C’est ça la démocratie, c’est ça la pluralité du système médiatique sénégalais, où nous donnons la parole à toutes les sensibilités.»

Coupure de signal Tnt
Durant cette crise, la société de Télédiffusion (Tds Sa), gestionnaire de la Tnt au Sénégal, a vite fait de couper les signaux de 7Tv et Tfm. Un acte «illégal» que dénonce la corporation. «La directrice de Tds coupe le signal d’une télévision juste parce que sa hiérarchie politique lui a demandé de le faire, en dehors de toute légalité. Ne pouvant couper le signal de la radio, géré par l’Agence de régulation des télécommunications et de la poste (Artp), Tds a coupé le signal de Tfm. Ce sont des violences extrêmes. Et malheureusement, c’est devenu banal», déplore Ma­madou Ibra Kane. Autre dérive dénoncée par la corporation, la rétention des sommes dues aux organes de presse. «L’Assem­blée nationale a voté deux subventions aux médias, ce qu’on appelle l’aide à la presse. A cause de considérations politiques, le ministre de la Communication ne veut pas distribuer l’aide à la presse. Et le Premier ministre a eu l’outrecuidance, en tant que Premier ministre du Sénégal, de demander à tous les démembrements de l’Etat, les ministères, les agences nationales, les sociétés nationales, de résilier de manière unilatérale les contrats de publicité avec la presse privée. La liberté de la presse et la liberté d’expression, consacrées par la Constitution du Sénégal, doivent continuer à survivre à toutes les alternances politiques pour que notre Peuple puisse vivre dans la stabilité politique et sociale, puisse connaître d’autres alternances politiques qui font avancer la démocratie», martèle M. Kane. Pour le Secrétaire général du Syndicat des professionnels de l’information et de la communication (Synpics), l’heure est à l’union. «Unissons-nous, allons vers l’essentiel», appelle Moustapha Cissé.
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