Pour ne pas conclure
Tout ce qui précède nous amène à dire que la décision de la Conacoc pour ce mois de zul hijjah au Sénégal est cohérente et reste une option avec laquelle on peut certes ne pas être d’accord sans toutefois la considérer comme non conforme à la Charia.
La question de la détermination consensuelle du mois lunaire reste entière et sa solution dépendra des relations que les pays musulmans établiront entre d’une part la Charia et le Fiqh qui permet d’en déduire des règles et d’autre part, l’astronomie et les sciences connexes. Dans cette optique et sur la base des données de l’astronomie moderne et des productions d’oulémas contemporains comme Faysal Al Mawlawi, deux critères suffisent à établir un calendrier musulman perpétuel qui aurait entre autres avantages de ne pas laisser de place à la discorde : i) la connaissance de l’instant de conjonction ; ii) la connaissance de l’instant du coucher du soleil pour chaque pays. Ce qui nous a amené à énoncer, à la suite de Al Mawlawi, dans notre ouvrage Astronomie et Charia, ceci : «Le premier jour du mois lunaire musulman commence au coucher du soleil qui suit l’instant où se produit la conjonction.»
D’ici là, il s’agit de ne rien faire qui alimente et entretient la discorde au sein des musulmans du monde et notamment d’un même pays. Selon le calcul astronomique, la première visibilité à l’œil nu et/ou à l’aide d’instruments optiques se produit le mardi 22 août 2017. Il en découle ceci :
Le mercredi 23 août 2017 est le premier jour du mois de zul hijjah,
Le jeudi 31 août sera le 9e jour de ce mois,
Le vendredi 1er septembre, le 10e jour.
Toutefois, l’inexistence d’unanimité sur les critères de détermination du mois lunaire au sein de la Oumma et la cohérence de la déclaration de la Conacoc, pas remise en cause par les autorités musulmanes traditionnelles au Sénégal, me conduisent à faire l’option de la prière de Tabaski le samedi 2 septembre 2017 au Sénégal. Je vais prier inshaa-Allah la fête de Tabaski au Sénégal le samedi 2 septembre 2017, tout en invitant tous les musulmans et toutes les musulmanes au Sénégal à faire de même.
Cette option est mon choix, parce-que :
Le hadith précité : «Le jeûne est le jour où vous jeûnez ; la rupture (du jeûne) est le jour où vous rompez le jeûne ; et le sacrifice (de l’Aïd) est le jour où vous offrez le sacrifice» est compris par nombre d’oulémas comme étant une invitation à fêter avec sa communauté locale,
Je fais mes prières de Korité ou de Tabaski dans des mosquées ou des terrains vagues du Sénégal,
Il est plus beau de prier, de fêter, de se souhaiter un sacrifice accepté et de se demander mutuellement pardon le même jour avec toute la famille, tout le quartier, tout le village, (imaginons que dans une famille le père ou le mari prie un jour différent de celui de la mère ou de l’épouse voire des frères et des jeunes de la maison qui ne sont même pas encore concernés par la Sounna du sacrifice !),
Il est plus beau de dire que tel pays musulman va fêter tel ou tel plutôt que de parler d’un groupe,
Je veux que mon pays échappe au désordre administratif, social et économique,
Il est prévu dans mon pays un jour de fête de Tabaski déclaré férié pour toute la communauté musulmane,
Je respecte le consensus des autorités musulmanes traditionnelles de mon pays,
Je prie le matin du jour de la fête à l’heure légale du Sénégal, alors que dans d’autres pays il ne fait pas encore matin ou on est déjà dans l’après-midi,
J’ai des droits et devoirs envers l’Etat du Sénégal dont je détiens la carte d’identité et le passeport,
Je veux prendre l’habitude de régler ce genre de question, où il n’y a pas consensus, d’abord en accord avec les autorités de mon pays pour éviter que des problèmes d’autres pays n’impactent la cohésion nationale du nôtre,
Je voudrais souhaiter mes meilleurs vœux aux musulmans du Sénégal, à ma famille et à mes voisins, en étant sûr que nous avons fêté le même jour,
Je voudrais voir les diplomates des pays musulmans au Sénégal prier avec nous à l’unisson le jour des fêtes,
Je soutiens tout ce qui consolide la cohésion nationale et le bon vivre ensemble au Sénégal pour tout ce qui ne heurte pas des obligations catégoriques de l’islam.
Etant entendu que le problème reste entier quant à une détermination consensuelle du mois lunaire pour toute la Oumma et au Sénégal.
Avec une volonté résolue, une concertation inclusive et une démarche appropriée, Allah nous y aidera.
Ahmadou Makhtar KANTE
amakante@gmail.com